Entretien avec le frère Dominique Joseph. Moine de la Famille de Saint Joseph et directeur de l’Institut Redemptoris Cutos, il coordonne le XIIe symposium international sur saint Joseph qui aura lieu du 25 au 30 septembre 2017 à Puimisson (34480).
1) Pouvez-vous nous présenter le symposium international sur saint Joseph que vous organisez ?
La tradition remonte à la fin des années 60 quand le père Roland Gauthier, frère de la Sainte-Croix (la communauté de frère André Bessette, canonisé par Benoît XVI en 2010) a entrepris un tour des bibliothèques universitaires du monde entier pour recenser tout ce qui avait été écrit sur saint Joseph. Il a ainsi créé un réseau informel de chercheurs passionnés pour saint Joseph. Ils se sont réunis pour la première fois à Rome à 1970. Depuis, tous les quatre ans, la tradition se perpétue. Après l’Espagne, le Canada, la Pologne, le Mexique, Malte, San Salvador et l’Allemagne, pour la première fois, la France sera le pays hôte. Il revient ainsi à Famille de Saint Joseph d’accueillir les amis de saint Joseph dans notre monastère de Saint-Joseph de Mont-Rouge (près de Béziers).
2) Pourquoi ce choix de « marier » études universitaires d’un côté et prière et formation « grand public », de l’autre ?
Effectivement, nous proposons de casser la frontière entre le monde des chercheurs, les circuits de vulgarisation et le monde de la dévotion à saint Joseph. Avant d’être un choix, c'est un reflet de notre identité. Nous sommes des moines et des moniales vivant selon la Règle de saint Benoît, nous sommes enseignants et prédicateurs, nous animons un Centre spirituel et des paroisses. L’alliance entre la prière contemplative, la formation universitaire et l’apostolat caractérise notre quotidien. En France, il y existe une forte dévotion à saint Joseph, elle est en plein renouveau. Il se trouve que je dirige le Réseau Francophone des Amis de Saint Joseph. Je vois la ferveur qui se développe avec discrétion. Par exemple, il y a quinze ou vingt ans, il n’y avait pas de pèlerinage des pères de familles. Aujourd’hui, ils sont très nombreux. Or, pour mieux aimer saint Joseph, il faut mieux le connaître. Nous avons ainsi choisi de placer les spécialistes de saint Joseph face au grand public. Ils vont davantage partager la passion qui les habite qu’exposer leur science, mais les années de recherche qu’ils ont consacrées à saint Joseph les conduiront à offrir une formation solide, au-delà des pieuses considérations trop souvent entendues. En outre, nous avons demandé à nos pasteurs de partager leur expérience avec saint Joseph. Ils s’exprimeront aux côtés des chercheurs. Le Cardinal Barbarin est toujours passionnant, Mgr Léonard est un pédagogue hors pair, Mgr Batut est connu pour sa profondeur théologique et spirituelle, Mgr Sako nous parlera de saint Joseph dans la tradition orientale. Ces conférences seront importantes et accessibles.
3) Beaucoup de théologiens critiquent déjà l’attention excessive que l’Église catholique porterait à la figure de la Vierge Marie. La « joséphologie » ne risque-t-elle pas d’être critiquée encore plus fortement comme détournant du Christ ?
Détourne du Christ ce qui n’y conduit pas. Qui prétendrait que saint Joseph ne conduit pas à Jésus, lui qui accueillit les bergers à l’entrée de la grotte de Bethléem, lui qui fit voir aux mages d’Orient « l’enfant et Marie sa mère » (Mt 2,11) ? En outre, parler ainsi est injuste envers la recherche théologique, quelle que soit la discipline. Nul ne parle de saint Joseph pour saint Joseph, de Marie pour Marie ou de l’Église pour l’Église. Tout discours théologique est une tentative d’expression du mystère du Christ. Il en va de même pour l’étude de saint Joseph, dont saint Jean-Paul II nous dit qu’il est « ministre du salut » (Redemptoris Custos n°8). L’expression est très forte ; nous réfléchirons d’ailleurs à son sens avec le père Stramare, Directeur du mouvement joséphin international. Pour le moins, Jean-Paul II montre qu’on ne peut pas penser l’Incarnation rédemptrice sans considérer la personne et la mission de saint Joseph.
4) Quelles sont les grandes tendances de la recherche actuelle sur saint Joseph ?
Je crois qu’on peut faire commencer le renouveau de la recherche sur saint Joseph en 1947, date du lancement de la première revue scientifique, Estudios Josefinos. Nous la devons aux Carmes de Valladolid en Espagne, lesquels continuent fidèlement leur travail aujourd’hui encore. Autre date importante, 1952 voit la fondation du premier Centre de recherche théologique par le père Roland Gauthier, à l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal. Montréal était alors le centre du monde pour la joséphologie avec les célèbres Cahiers du Mont-Royal. En 1969, au sanctuaire polonais de Kalisz (le plus ancien d’Europe), naissait le Centrum Józefologiczne. Parallèlement, au Mexique (qui appelle saint Joseph son « Roi »), plusieurs Centres de recherche apparaissaient. Je ne peux citer toutes les fondations au Pérou, au Brésil, en Corée, à Malte, en Allemagne, en Autriche, etc., mais je dois souligner la place importante de l’Italie où émerge la figure du père Stramare qui a tenu pendant plus de trente ans la chaire de joséphologie au Marianum à Rome. En France aussi on trouve de belles richesses. Le père Verlinde est sans doute le plus fécond. Il fonda en 1991 la Famille de Saint Joseph, vouée à saint Joseph et vivant de la spiritualité de la Sainte Famille à Nazareth.
5) Pouvez-vous nous dire un mot de l’organisation du symposium ?
Nous souhaitons redonner au terme « symposium » quelque chose de son sens antique : les grecs discutaient de philosophie entre amis, au cours de banquets ou de promenades. Nous voulons établir une telle familiarité entre les conférenciers et les congressistes, c’est pourquoi le programme est conçu pour favoriser les rencontres informelles. Les conférences sont courtes et suivies de long temps de débats. Nous souhaitons que la parole circule, que chacun pose ses questions. C’est, je crois, la vraie nature de la recherche scientifique : elle est, dans le fond, une conversation. Le programme est riche et multilingue (une trentaine de conférenciers de nationalités variées), permettant à chacun de construire son propre itinéraire : iconographie, mariage, paternité, éducation, vie familiale, etc., les champs de la recherche sont nombreux, chacun trouvera des exposés liés à ses centres d’intérêt. Cette semaine sera aussi un temps de fête : concerts, repas folkloriques, spectacles… le symposium peut s’apprécier en famille. Sainte Thérèse de Lisieux l’a bien compris, qui s’est invitée toute la semaine avec ses parents. Une soirée sera en effet consacrée à la vénération des reliques des saints Louis, Zélie et Thérèse. Cette visite providentielle est pleine de sens : petit bébé, sainte Thérèse a été sauvée par saint Joseph. Sans lui, l’Église n’aurait jamais connu cette sainte hors normes ! Nous perdrons le temps de nous le rappeler et de rendre grâce.
6) Comment peut-on participer ?
Il suffit de s’inscrire. Ceux qui ne peuvent pas venir toute la semaine choisiront de passer une journée avec nous, ou de suivre quelques conférences de leur choix, ou encore ils ne viendront que pour les soirées conviviales. Toutes les formules sont possibles. Le programme complet est disponible sur le site internet du symposium : 2017.fsj.fr Nous vous attendons nombreux. Le symposium est organisé dans notre pays pour la première fois en 50 ans d’histoire de ces rencontres ; il est l’occasion pour montrer la vitalité des amis de saint Joseph français et de nous enrichir de l’expérience des autres. Retenez les dates : du 25 au 30 septembre 2017 à Saint-Joseph de Mont-Rouge (34). Nous vous attendons avec joie.