À Ouzouer-sur-Loire, 900 membres de 12 à 17 ans des Europa Scouts, fêtent le cinquantenaire de ce mouvement scout. En six ans, les effectifs ont augmenté de 40% pour atteindre 2.000 adhérents.
Voici l’homélie prononcée par l’abbé Thibault Desjars de Keranrouë, conseiller religieux national des Europa Scouts, lors de la messe solennelle célébrée pendant le camp national, à l’occasion des 50 ans de l’existence des Europa Scouts, le mercredi 23 juillet 2025 à Ouzouer-sur-Loire :
Chères guides, chers scouts,
En 1975, Perrig Geraud-Keraod, l’un des fondateurs des Scouts d’Europe, donnait vie aux Europa Scouts tel que nous en bénéficions aujourd’hui. 1975-2025 : 50 ans d’existence. Je ne peux pas ici rappeler toute l’histoire du mouvement. Mais nous avons un devoir de mémoire pour ceux qui nous ont précédés, ceux grâce auxquels nous pouvons nous aussi, aujourd’hui, porter l’uniforme et rester fidèles à notre promesse. Dans cette messe, rendons grâce à Dieu et prions-le pour le repos de l’âme des fondateurs du scoutisme, de Baden Powell à Perrig, présidents, chefs, cheftaines, scouts et guides, conseillers religieux.
Combien sont-ils, les anciens Europa Scouts, dans les cimetières de France, qui vont entrer dans la gloire éternelle aujourd’hui même, parce que nous, les scouts et guides de 2025, prions et intercédons auprès de Dieu pour nos anciens ? C’est ça aussi, honorer son pays, honorer sa culture, aider son prochain en toute circonstance, et vivre la fraternité scoute.
Mes amis, le scoutisme est la plus grande école de vie qui ait jamais été inventée dans nos sociétés, pour cette tranche d’âge magnifique qu’on appelle communément l’adolescence. Même si fondamentalement, l’adolescence n’est pas une tranche d’âge, pas un état fixe et stable. L’adolescence au contraire, c’est un passage, un mouvement. De l’enfance à l’âge adulte. Devant moi rassemblés, je ne vois pas aujourd’hui des adolescents ; mais je vois des jeunes hommes et des jeunes filles, un peu enfants, un peu adultes, en mouvement entre les deux. Vous êtes à la fois attirés par le jeu, le rire, la simplicité, la spontanéité de l’instant présent, comme tous les enfants du monde. Vous aspirez aussi à de grandes réussites, de grands projets, de vastes horizons, sachant déjà par expérience le poids du mal et les lourdeurs du monde, comme les adultes. Vous vivez dans vos corps et dans vos âmes le passage splendide de l’enfance à la maturité.
Certains adultes posent un regard exaspéré, fatigué, désespéré sur vos vies mouvantes et passionnées. D’autres, souvent puissants dans ce monde, voient en vous des victimes potentielles : victimes des modes ; victimes du numérique, des réseaux sociaux, des influenceurs en tous genres ; victimes de la publicité ; victimes du regard des autres, de la violence, et j’en passe.
Quoiqu’excessifs, ces regards d’adultes ne sont jamais complètement faux, vous êtes les premiers à le reconnaitre honnêtement quand on prend le temps d’en parler avec vous posément et avec humour. Mais malgré les tempêtes propres à vos âges, le génie de Baden Powell fut d’oser avoir confiance en vous, chers jeunes, comme Dieu a confiance en vous. Aujourd’hui il vous dit, par la voix de vos chefs, cheftaines et conseillers religieux : tout jeune que tu es, rempli des contradictions et des tiraillements entre l’enfance et l’âge adulte, tu es une belle personne, qui vit dans un beau pays, sous la protection d’un Dieu splendide et miséricordieux, dont la beauté du monde n’est qu’un pâle reflet. Dans le scoutisme, l’adulte dit au plus jeune : je crois en toi parce que Dieu croit en toi. Je crois que tu seras bientôt, si tu le veux aussi, un homme, une femme, accompli. Voilà pourquoi, dès l’âge de 12 ans, tu peux promettre sans trembler, comme nombre d’entre vous l’ont fait cet été au camp : sur mon honneur, avec la grâce de Dieu, je promets de servir Dieu, l’Eglise, ma patrie.
Chers amis, le système des patrouilles imaginé par Baden Powell, protégé et chéri par les Europa Scouts, est une invention de génie. Un jeune de 16 ans, secondé par un plus jeune de 15, responsables ensemble de 5 ou 6 autres encore plus jeunes. Qui oserait faire un tel pari ? A l’époque de Baden Powell, personne. Aujourd’hui, les chefs et cheftaines partout répandus dans le pays. On vous confie des responsabilités adaptées à votre âge. Vous apprenez, par la vie de patrouille, à déployer vos talents, vos compétences, pour les mettre au service de la communauté. Soyez toujours enthousiastes dans vos postes d’action. Ne laissez jamais personne vous dire que vous n’êtes pas compétent. Un scout, une guide, qui travaille avec effort le chant, l’animation, la prière, l’infirmerie, le brelage, le froissartage, la lutte, l’observation, le morse, la liturgie, et que sais-je encore : ce scout et cette guide sont dignes de leur uniforme. Vous expérimentez dans vos patrouilles que vous n’êtes pas égaux en tout. Certains sont plus doués, d’autres moins, c’est ainsi. Les dons de Dieu ne sont pas égaux. Mais au bout du compte, seule importe la charité fraternelle. Le cul-de-pat timide, ce 4ème de patrouille lent à apprendre, ce CP trop chétif pour gagner le combat, ce second qui manque encore de personnalité, celui-là est peut-être le plus saint de votre patrouille ! N’oubliez jamais cela : la sainteté n’est pas proportionnelle à vos talents humains. Évidemment, la sainteté consiste aussi à déployer ses talents, même pour le plus faible, mais dans le seul et unique but de l’amour et du service du prochain. Voilà pourquoi nous plaçons le pouce sur l’auriculaire en saluant fièrement : parce que le plus fort n’est fort, que si et seulement si, il protège le plus faible. Et qui sait ; quand vous serez adultes, peut-être que le plus faible de votre ancienne patrouille, sera devenu le plus fort dans le monde. Il pourra à son tour vous protéger, vous tendre la main, pour continuer ensemble de grandir jusqu’au Ciel. Ainsi vit-on dès maintenant, concrètement et chaque jour dans nos patrouilles et nos camps, le grand dogme de la communion des saints. C’est cela qu’on désigne par la belle expression : la fraternité scoute. Dans vos patrouilles, ne laissez jamais personne derrière ; n’abandonnez, ne rejetez, ne critiquez jamais votre camarade de patrouille. Soutenez ses efforts, corrigez ses défauts. C’est ensemble que vous vaincrez, ensemble que vous perdrez, ensemble que vous vous entraînerez jusqu’à la vie éternelle. Telle est la volonté de Dieu pour vous : soyez les gardiens de vos frères et sœurs.
On entend souvent dire par les temps qui courent, que notre société, notre pays va mal. On entend parler de guerre, de crimes, de changements climatiques, de chômage, de dépression. Tout cela est malheureusement vrai sous beaucoup d’aspects. Mais nous, scouts et guides, ne voulons pas nous attarder à regarder avec un sentiment de fatalité cette triste réalité. Nous voulons plutôt, de toutes nos forces, œuvrer pour un monde meilleur. Un monde meilleur commence dans la patrouille : le confort de votre coin de pat, la chaleur humaine de votre ambiance, les rires, beaucoup de rires ! Le monde est plus beau quand les scouts et les guides l’animent. Un monde meilleur aussi en défendant la nature que Dieu nous donne : en respectant les lois de notre pays, celles qui encadrent le soin de la nature, des plantes, des animaux. Il y a beaucoup de lois intelligentes en France, qui protègent les forêts, les campagnes, l’alimentation, les biens de consommation, et l’usage des 4 éléments fondamentaux que sont le feu, l’eau, l’air et la terre. Nous devons en être fiers, et protéger ces lois en apprenant aux plus jeunes à les respecter en toute circonstance. Un monde meilleur en travaillant de toutes nos forces pour réussir nos études, en visant haut avec ambition. Nous devons aimer les responsabilités, pratiquer de beaux métiers, investir tous les domaines : culture, art, armée,politique, entreprises, associations, familles, Eglise dans les séminaires et les couvents ! Le scout s’engage partout, met ses forces à disposition pour le pays, pour l’Eglise, pour sa famille, pour lui-même, et tout cela pour la gloire de Dieu. A tous les oiseaux de malheur dans ce monde fatigué, nous voulons opposer notre amour de la vie. Tel est le cri qui jaillit de nos cœurs, quand nous hurlons nos cris de patrouille. Ce n’est pas un concours de voix, c’est le jaillissement spontané de la vie, qui fait du bruit, qui occupe le terrain, qui ne se laissera jamais dompter par les forces du mal, les puissances de mort, la tristesse et la morosité. Le scoutisme est une école de joie sainte, parce qu’il cueille la vie à sa racine, et l’élève jusqu’au Ciel.
Chers amis, soyez des missionnaires. Rayonnez par l’uniforme, attirez par votre conduite et votre joie de vivre. Le monde a besoin de vous. La jeunesse de notre pays a besoin de votre témoignage. Dieu veut vous écouter chanter, vous voir jouer, vous consoler dans les larmes, vous réjouir dans la prière du soir sous les étoiles, rire avec vous aux éclats. Tel est Dieu, telle est l’Eglise, telle est la bénédiction du scoutisme. Que St Georges nous aide à construire ensemble un monde fraternel, où chacun respecte son voisin, et tous protègent le bien commun que Dieu nous a confié. Telles sont les grâces que nous demandons aujourd’hui à notre Seigneur Jésus-Christ, par l’intercession de St Georges et de la Vierge Marie. Vive l’Eglise, vive la France, vive le scoutisme, vive les Europa Scouts. Ainsi soit-il.