L’abbaye Notre-Dame de Saint-Rémy de Rochefort est une abbaye trappiste belge. Fondée en 1230, ses moines y brassent trois fameuses bières depuis 1595 ! Mais tout n’a pas toujours été tout rose dans l’histoire de l’abbaye… D’ailleurs, sa devise est « Curvata Resurgo » et signifie « Courbée je me redresse »…
Aujourd’hui Divine Box vous emmène faire un petit tour et on vous raconte tout sur l’histoire de l’abbaye de Rochefort, suivez le guide !
L’abbaye de Rochefort, un monastère de femmes
Tout commence le 13 juin 1230, le Comte de Rochefort Gilles de Walcourt donne sa terre de Saint-Rémy pour y faire ériger un couvent : « Le Secours Notre-Dame ». Il accueillera une communauté de dames pieuses, affiliées à l’ordre cistercien.
Mais au XVe siècle, la discipline des soeurs se relâche, et leur nombre diminue. Car bien souvent à l’époque, les jeunes filles et les dames nobles y étaient placées sans qu’elles aient vraiment souhaité y vivre comme religieuses.
Les abbés de l’abbaye du Jardinet et de l’abbaye de Moulins, sont alors envoyés sur place par le chapitre général de l’ordre de Cîteaux. Ils découvrent un monastère fortement endetté et délabré, qui plus est soumis à la dérision populaire, à cause du comportement scandaleux des moniales qui y vivaient quelques années auparavant.
La décision du chapitre est alors sans appel, et rare : toute la communauté doit partir. Les soeurs déménagent donc à l’abbaye de Félipré, située à côté. Le 11 novembre 1464, les moines de Félipré échangent donc leur place et viennent s’installer au monastère de Saint-Rémy.
C’est le chapitre cistercien, réunià l’abbaye de Cîteaux (ci-dessus) qui prit la décision, en 1464, de changer la communauté de femmes de l’abbaye de Rochefort par une communauté de moines cisterciens – Divine Box
« Courbée je me redresse »
Les premières années des moines à Rochefort sont rayonnantes. L’abbaye devient officiellement la 28e fille de l’abbaye de Cîteaux. Les frères cisterciens exploitent la rivière et le marbre bleu et rouge qui se trouvent sur leurs terres.
Mais au XVIe siècle, les ennuis arrivent : l’abbaye de Rochefort est pillée en 1568 par des protestants calvinistes, et de nouveau dix ans plus tard par les troupes d’un prince de Habsbourg… Malgré ces épreuves, les moines ne baissent pas les bras, ils lancent même en 1595 le brassage de leur propre bière !
Mais les ennuis reprennent de plus belle. En 1636, la peste se présente aux portes de l’abbaye. Et en 1650 rebelote, l’abbaye est à nouveau pillée. Les moines sont même chassés par les troupes du baron de Châtelet, qui s’y installent à la place.
Les moines reviendront tout de même habiter à l’abbaye de Rochefort en 1664. Ils en profitent aussi pour laisser un témoignage de leur détermination.
En effet, lors des travaux de reconstruction, ils installent la devise de leur père abbé sur une pierre, au-dessus de la porte de l’écurie : Curvata Resurgo (« Courbée je me redresse »). Un moyen efficace de rappeler aux passants que malgré le temps et ses épreuves, les moines sont toujours là ! Et cette devise est encore celle de l’abbaye aujourd’hui, et la pierre est toujours en place !
La pierre gravée en 1664 avec la devise « Curvata Resurgo » (Courbée je me redresse) de l’abbaye de Rochefort est toujours à sa place, 4 siècles plus tard – Divine Box
La fin de l’abbaye ?
Cependant au XVIIIe siècle, les épreuves deviennent internes. En effet, la ferveur monastique se relâche. En 1744, un moine de Clairvaux de passage à l’abbaye, raconte en effet avec humour que « la petite bibliothèque ne parait pas fréquentée ; les fenêtres en sont toujours fermées, ce qui cause une quantité de puces que nous y trouvâmes en abondance, en sorte que nous dûmes retrousser nos habits assez hauts… » Comme ambiance, on a vu mieux !
Le père abbé est même obligé de préciser qu’« il est interdit aux moines de prendre du thé, du café, du chocolat, des liqueurs, du vin, de fumer, de jouer aux cartes, sous peine d’être confiné dans sa chambre une journée entière ». Mais en vain…
À la Révolution en 1792, la communauté de cisterciens est dissoute, comme de nombreux autres monastères, et en 1794 l’abbaye est pillée et en partie détruite ! La destruction des bâtiments a une saveur d’autant plus amère pour les moines, que les premiers à piller sont les habitants locaux, ceux que l’abbaye de Rochefort a gracieusement aidés et nourris de générations en générations. « Les ouvriers et manœuvres, ceux que nous avons nourris de pères en fils, étaient les plus acharnés au pillage : quelle reconnaissance ! » se désolait le père abbé… Triste sort, après plus de 560 ans de vie à Rochefort.
Malgré tous les pillages et destructions de l’histoire, le porche de l’abbaye de Rochefort, datant du XVIe siècle, peut toujours être admiré aujourd’hui – Divine Box
À un accouchement près
En 1796, les biens et les bâtiments restants de l’abbaye sont confisqués, et vendus publiquement aux enchères en 1805. Le père abbé ne baisse pas les bras et a une petite idée… et des amis ! Réfugié avec la caisse d’argent de l’abbaye chez l’un de ses amis médecin, ce dernier accepte de participer à la vente pour racheter la propriété… Avec pour projet de la redonner ensuite aux moines !
Mais le jour de la vente, patatra : cet ami médecin est appelé en urgence pour un accouchement. Futé, le bonhomme n’oublie pas sa promesse : il envoie donc le mari de sa patiente à la vente ! L’homme accepte et s’y rend… et remporte l’enchère ! Mais il décide finalement de garder l’abbaye pour lui. Le coquin !
Il abat l’église et une partie des bâtiments pour en faire une ferme, mais les affaires ne prennent pas, et il doit revendre lui aussi son bien. Ce qu’il reste de l’abbaye de Rochefort passe ainsi de propriétaire en propriétaire pendant plusieurs années…
Ci-dessus, Côme papote avec un moine de l’abbaye de Rochefort – Divine Box
La renaissance de l’abbaye de Rochefort
Un beau jour, l’un des propriétaires successifs des ruines de Rochefort se trouve être un aumônier militaire à la retraite, qui en fait don à l’abbaye d’Achel. Des moines trappistes d’Achel arrivent donc en 1887 sur place, et reprennent vite les constructions et le travail manuel (agriculture, lait, fromage, boulangerie et… brasserie !).
Les moines choisissent d’appeler leur abbaye « Notre-Dame de Saint-Rémy de Rochefort ». Pourquoi ce nom à rallonge ?
• « Notre-Dame »: dans la tradition cistercienne et trappiste, les abbayes sont dévouées à la Vierge Marie. Elles prennent donc très souvent le nom de « Notre-Dame » ou de « Sainte-Marie ». L’abbaye Notre-Dame de Cîteaux ou l’abbaye Notre-Dame d’Aiguebelle en sont de bons exemples !
• « Saint-Rémy »: car l’abbaye de Rochefort se trouve en réalité dans le petit village de Saint-Rémy, juste à côté de Rochefort. Les locaux l’ont donc toujours appelée « l’abbaye Saint-Rémy » !
Pour plaire à tout le monde, le nom « Notre-Dame de Saint-Rémy de Rochefort » fut donc adopté !
Très vite, les frères trappistes rayonnent dans la région et financent aisément leurs travaux grâce à la brasserie ! Ils terminent leur nouvelle église en 1900, assistent massivement la population lors de la Première guerre mondiale (ils réalisent par exemple trois tonnes de pain par semaine !), et accueillent même la communauté d’Achel pendant la Seconde guerre mondiale.
C’est grâce à l’abbaye d’Achel (ci-dessus), que l’abbaye de Rochefort a pu reprendre vie après la Révolution – Divine Box
Au feu les pompiers !
Le 29 décembre 2010, catastrophe à l’abbaye de Rochefort : pendant que les moines dînaient au réfectoire, un important incendie se déclare.
Il emporte en quelques instants quelques parties de l’abbaye. Quatre cuves de 27 000 litres de bière trappiste sont même détruites ! Bien heureusement, personne n’est blessé, et la brasserie et la bibliothèque ont pu être sauvées à temps. Ouf ! Plus de peur que de mal !
Et aujourd’hui ?
Les moines trappistes de l’abbaye de Rochefort se portent bien et cherchent toujours Dieu en silence dans la prière (sept offices par jour, le premier à 3h30 !) et le travail. Les dernières activités agricoles ont été abandonnées en 1974, faute de rentabilité. Mais côté artisanat monastique, les moines brassent encore et toujours leurs fameuses trappistes !
Ils ne sont plus physiquement impliqués dans le brassage à proprement parler, car ils sont désormais trop peu nombreux, et la communauté se fait vieillissante. Mais ce sont encore eux qui s’occupent de toute la gestion de la brasserie et de ses bières (et ça fait du travail) : la Rochefort 6, la Rochefort 8et la Rochefort 10!
La Rochefort 8 et la Rochefort 10 sont d’ailleurs notées 100/100 sur RateBeer, un site d’experts qui classent et notent plus de 200 000 bières du monde entier, parmi plus de 16 000 brasseries ! De quoi se forger une sacrée réputation, non ?
Aujourd’hui encore, les moines de l’abbaye de Rochefort s’occupent de leur brasserie, et ce depuis 1595 – Divine Box
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