Suite de l'entretien avec Ludovine de La Rochère (lire ici le début) :
Quelle est, selon vous, la plus grave attaque contre la famille du quinquennat ?
A l’évidence, la loi Taubira est le plus grave de toutes les attaques menées contre la famille par François Hollande. Prétendre que deux hommes ou deux femmes pourraient se marier est une aberration puisque c’est contraire au sens même du mariage et à la réalité de notre humanité.
Cette loi porte très gravement atteinte non seulement au mariage et à la famille, mais aussi au principe même du droit et au rôle du politique. En effet, quel sens peut avoir une loi contraire au réel ? Pour qui se prend le législateur lorsqu’il croit pouvoir changer le réel à l’aide de quelques mots ? Et que font les politiques de leur responsabilité lorsqu’ils piétinent ainsi le mariage, clé de voûte de la famille, et les besoins les plus élémentaires de l’enfant : avoir un père et une mère ?
Christiane Taubira parlait d’un « changement de civilisation ». Je partage – une fois n’est pas coutume ! – son analyse… Il s’agit bien d’une déconstruction volontaire de la civilisation parce que c’est le démantèlement d’une organisation sociale qui protège les plus vulnérables, en l’occurrence la mère et l’enfant… mais aussi le père. En effet, par la présomption de paternité, le mariage « fait » le père : l’époux est reconnu comme tel du fait du mariage. Le mariage authentique protège le père, la mère et l’enfant.
La loi Taubira correspond à un changement de paradigme, au rejet des repères objectifs – donc communs à tous -, au rejet de tout ce qui paraît contraire à l’égalité aux yeux de quelques idéologues. Pour eux, le mariage doit donc être transformé jusqu’à en perdre tout son sens, c’est-à-dire disparaître en tel que tel. Au final, il ne doit rester que le mot, mais vide de sens.
Bien-sûr, ce que je décris là est conscient chez quelques uns, comme le sociologue François de Singly, tandis que beaucoup croient simplement que le mariage n’est qu’une histoire de sentiments entre deux personnes, conception du mariage qui date du XIXe siècle. Ils n’ont pas compris ou ne savent pas que le mariage suppose de « regarder ensemble dans la même direction », selon les mots de Saint Exupéry, c’est-à-dire qu’il implique un amour qui dépasse le seul désir et le simple sentiment amoureux. Et étonnamment, ils ne voient pas que le mariage concerne tout autant les enfants à venir.
Pensez-vous qu'il soit possible, juridiquement et politiquement, d'abroger la loi Taubira ?
Juridiquement, il est tout à fait possible d’abroger la loi Taubira. Personne ne le conteste. Le spécialiste de droit constitutionnel Didier Maus ainsi que de nombreux juristes expliquent sereinement l’idée que l’abrogation de cette loi inique ne soulève pas de difficulté.
Il faut préciser que l’abrogation d’une loi est toujours comprise pour l’avenir et non le passé : l’article 2 du code civil indique en effet que « la loi ne dispose que pour l'avenir [et] n'a point d'effet rétroactif. » Ainsi, quand des politiques font l’amalgame entre abrogation et démariage, ils sont soit ignorants, soit malhonnêtes…
D’un point de vue politique, l’abrogation de la loi Taubira est avant tout une question de liberté, mais aussi de volonté et de sens des responsabilités. Dans le contexte actuel, cela suppose évidemment courage et cohérence, ce qui ne sont malheureusement pas les qualités les plus répandues chez nos politiques… Mais ne nous lamentons pas : nos élus sont le reflet de notre société, cela n’a donc rien d’étonnant. Dans l’autre sens, cela signifie que si le peuple français fait lui-même preuve de courage et de persévérance, nous pouvons tout à fait espérer que des politiques agissent dans le même sens… Ce dont je suis certaine, c’est qu’il faut faire tout notre possible pour que ce moment advienne le plus vite possible : tous les efforts de La Manif Pour Tous sont tendus vers cet objectif.
Comment réagissez vous devant les abandons du combat contre la loi Taubira par de nombreux dirigeants de l'opposition ?
A vrai dire, cela ne me décourage pas, bien au contraire : cela me fait redoubler d’ardeur. Il est vrai que notre combat est très difficile.
Seul le manque de courage ou l’ignorance peuvent expliquer de tels revirements. Dans les deux cas, ils ont cédé à l’influence du lobby LGBT, ce qui est un comble pour ceux d’entre eux qui se targuent de redonner du crédit à la parole politique.
Car enfin, un changement de position sur un thème aussi majeur ne se fait pas du jour au lendemain. Soit la personne n’avait pas réfléchi à son engagement sur ce sujet fondamental pour la France, et nous pouvons alors douter sérieusement de ce qui motive réellement sa carrière de politicien, soit elle a décidé de se ranger derrière le vote d’une loi faisant violence à ses convictions, et alors nous ne pouvons que nous détourner de ces politiques incapables de penser la loi en dehors du cadre imposé par leurs adversaires.
Mais les victoires que nous avons obtenues sont évidemment des encouragements immenses à poursuivre le combat. Il faut se rappeler, en effet, que la légalisation de la PMA « sans père » était prévue avec la loi Taubira. Trois ans plus tard, grâce à tous ceux qui se sont mobilisés, elle ne l’est toujours pas… et la lutte se poursuit quotidiennement pied à pied. Nous avons aussi obtenu le retrait complet et définitif du projet de loi « Familles » de la ministre Dominique Bertinotti, ainsi que le recul de la gauche sur l’accès à l’adoption pour les couples pacsés et concubins… Au-delà de ces belles victoires législatives, le réveil du peuple français, et en particulier des jeunes, est une magnifique nouvelle. Et au-delà de nos frontières, le réveil d’autres pays – Croatie, Finlande, Italie, Mexique, Taïwan, etc. – est aussi le fruit de la mobilisation française.
C’est pourquoi j’adresse un immense bravo à tous ceux qui se sont levés… Mais attention, seule une persévérance héroïque conduira à la victoire ! Nous donnons donc rendez-vous dimanche 16 octobre à 13h Porte Dauphine pour écrire ensemble une nouvelle page de notre histoire.
On ne lâche rien, jamais !