Dans une lettre aux évêques à l'occasion de la fête des Saints Innocents, le pape François écrit :
"Ecoutons les pleurs et les lamentations de ces enfants; écoutons aussi les pleurs et les lamentations de notre mère l’Eglise, qui pleure non seulement devant la souffrance causée à ses enfants les plus petits, mais aussi parce qu’elle connaît le péché de certains de ses membres: la souffrance, l’histoire et la douleur des mineurs qui ont été abusés sexuellement par des prêtres. Péché qui nous fait honte. Des personnes qui avaient la responsabilité de prendre soin de ces enfants ont détruit leur dignité. Nous déplorons cela profondément, et nous demandons pardon. Nous nous unissons à la souffrance des victimes et, à notre tour, nous pleurons le péché. Le péché de tout ce qui est arrivé, le péché d’avoir omis de porter assistance, le péché de taire et de nier, le péché d’abus de pouvoir. L’Eglise aussi pleure avec amertume ce péché de ses fils, et elle demande pardon. Aujourd’hui, faisant mémoire des Saints Innocents, je veux que nous renouvelions tout notre engagement pour que ces atrocités ne se produisent plus parmi nous. Trouvons le courage indispensable pour promouvoir tous les moyens nécessaires et protéger, en toute chose, la vie de nos enfants pour que de tels crimes ne se répètent plus. Faisons nôtre, clairement et loyalement, la consigne «tolérance zéro» dans ce domaine."
Pourtant, Michael Brendan Dougherty, qui tient une rubrique dans l'hebdomadaire anglo-saxon "The Week", et collabore aux The New York Times Magazine, Slate et The American Conservative, vient de rédiger un article troublant. Extrait de la traduction de Benoît-et-moi :
"[…] Selon deux personnes ayant des liens directs avec le Vatican, François […] fait pression pour annuler les réformes qui ont été instituées par ses prédécesseurs Jean-Paul II et Benoît XVI dans le traitement des affaires de prêtres pédophiles. François poursuit ce plan, même si les officiels de la Curie et les cardinaux qui sont en sa faveur [du plan] ont déjà suscité pas mal de scandale dans son pontificat en le poussant à traiter les agresseurs de façon clémente.
En 2001, le Vatican a engagé une vaste réforme dans son traitement des affaires de prêtres ayant abusé d'enfants. Le pouvoir de traiter ces cas a été retiré à la Congrégation du Clergé et à la Rote Romaine (le Tribunal du Vatican), et confié à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (CDF). Par la suite, le volume et la vitesse avec lesquels l'Eglise catholique a défroqué les prêtres agresseurs se sont accrus. Tel fut l'héritage du pape Benoît pour faire face à «la saleté» dans l'Eglise.
Récemment, François, par le secrétaire d'État du Vatican, le cardinal Pietro Parolin, a demandé l'avis du Conseil pontifical pour les textes législatifs, dirigé par le cardinal Francesco Coccopalmerio, concernant la possibilité de re-transférer la compétence du traitement des prêtres agresseur de la CDF vers le Clergé et la Rote. Le service de Coccopalmerio a donné une réponse positive. Et même si cela n'a pas été mentionné dans les rapports des médias, un fonctionnaire ayant une connaissance directe de la réunion m'a dit qu'à la mi-Décembre, François a également discuté de cette «réforme de la réforme» concernant les affaires de pédophilie lors de la réunion de son groupe consultatif spécial, le Conseil des Cardinaux. Le bureau de presse du Vatican n'a pas répondu aux questions, ni pour confirmation ni pour commentaire.
[…] la réussite de la CDF sur cette question est infiniment meilleure que la situation avant 2001. Alors pourquoi revenir dessus? […] Les rumeurs de cette réforme ont circulé à Rome pendant des mois. Et pas dans la joie. Il est notoire que François et ses cardinaux alliés ont interféré avec les jugements de la CDF sur les cas d'abus. Cette intervention est devenue si endémique au système qu'on sait désormais qu'à Rome, les cas d'abus sexuels par des prêtres sont classés selon deux critères. Le premier est: "coupable ou innocent". Le second est: "avec des cardinaux amis, ou sans cardinaux amis".
Et en effet, il semble que François persévère dans son revirement sur le traitement des abus, même si les cardinaux qui sont favorables à cette "réforme de la réforme" lui ont apporté des ennuis à cause de leurs amis. Prenons le cas du P. Mauro Inzoli [photo] (ndt: nombreux articles dans la presse italienne sur cette affaire nauséabonde). Inzoli vivait de façon flamboyante et avait un tel goût pour les voitures flashy qu'il avait gagné le surnom de "Don Mercedes." Il a également été accusé d'avoir agressé [sexuellement] des enfants. Il aurait abusé de mineurs dans le confessionnal. Il est même allé jusqu'à enseigner aux enfants que le contact sexuel avec lui était légitimé par l'Écriture et par leur foi. Lorsque son cas est arrivéa à la CDF, il a été reconnu coupable. Et en 2012, sous le pontificat du pape Benoît, Inzoli a été défroqué.
Mais à ce que nous avons appris, Don Mercedes était "avec des amis cardinaux". Le Cardinal Coccopalmerio et Mgr Pio Vito Pinto, aujourd'hui doyen de la Rote romaine, sont tous deux intervenus au nom (en faveur) d'Inzoli, et François l'a rendu à l'état sacerdotal en 2014, l'invitant à une «une vie d'humilité et de prière». Ces restrictions ne semblent pas avoir trop troublé Inzoli. En Janvier 2015, Don Mercedes a participé à une conférence sur la famille en Lombardie. Cet été, les autorités civiles ont terminé leur propre procès d'Inzoli, le déclarant coupable de huit délits. Une quinzaine d'autres dépassent le délai de prescription. […]"