Le dernier dimanche de Pâques, Bree Solstad, une ancienne actrice pornographique américaine, d’origine protestante, a fait sa première communion. Cette conversion fit pas mal de bruit dans les médias catholiques et sur les réseaux sociaux, où « Miss B » témoigne inlassablement de ce retour vers Dieu, avec joie et courage. Elle a été interrogée par Vexilla Galliae. Extraits :
C’est loin d’être une chose banale, même pour une femme éloignée de Dieu, comment donc êtes-vous tombée dans la pornographie ?
Je suis née et j’ai grandi en Alaska, élevée par une mère célibataire et aimante, qui travaillait très dur. J’étais fille unique et je n’ai jamais connu mon père. J’étais donc une « enfant à clef ».
J’ai été baptisée dans l’Église luthérienne à l’âge de 8 ans. Durant mon enfance, j’ai été active dans ma paroisse et dans des groupes de jeunes chrétiens, mais pendant mes études supérieures, je me suis complètement éloignée de la foi pour adopter un mode de vie d’ivresse, d’insouciance et de promiscuité. Malgré tout cela, je me voyais toujours plus ou moins comme chrétienne, mais je ne pratiquais plus et je n’avais plus de vie de foi. J’ai abandonné mes études, en grande partie à cause de ma consommation excessive d’alcool et de mon comportement autodestructeur et j’ai commencé à parcourir les États-Unis, accumulant toujours plus les partenaires sexuels et buvant toujours plus d’alcool. J’ouvrais dans le même temps un blog sur ce comportement hédoniste.
Ce blog a attiré l’attention d’une travailleuse du sexe à succès, qui m’a contactée et m’a recrutée. Honnêtement, cela me semblait amusant à l’époque : plus besoin de patron, je pouvais quitter mon travail et faire ce que je voulais. Je n’avais aucune boussole morale et je ne m’intéressais qu’à moi-même. Il s’est avéré que j’ai rapidement eu beaucoup de succès et que je suis devenue presque immédiatement l’une des créatrices de contenus les plus suivies et les plus rentables du site qui publiait mes vidéos. Au cours de la décennie suivante, j’ai produit et tourné de la pornographie de domination féminine et de domination financière. Mon travail impliquait également des vidéos webcam en direct, des vidéos personnalisées et du téléphone rose.
Comment, prise dans un tel tourbillon de vice et de péché, avez-vous retrouvé la foi en Dieu ?
J’ai vécu une horrible tragédie il y a quelques années. À cette époque, j’ai renoué avec la prière. Je n’ai jamais prié aussi fort ! Pourtant, j’avais l’impression que Jésus ne me répondait pas, que Dieu m’avait tourné le dos. Je lui ai donc fait la même chose.
Néanmoins, il y a environ un an, j’ai eu l’opportunité d’aller en Italie et j’ai passé des mois à m’y préparer. La majorité des lieux que je voulais visiter étaient des églises, car c’est là que se trouvent les plus belles œuvres d’art. Mais une fois à l’intérieur de ces belles basiliques, cathédrales et églises anciennes, quelque chose a changé en moi et j’ai commencé à apprécier l’art et les églises pour la théologie qu’elles exprimaient. C’était comme si mon cœur était transpercé par la beauté. J’ai commencé à remarquer bien plus que la beauté de l’art.
Contrairement à ce qu’on trouvait dans toutes les églises protestantes où j’étais allée enfant, le Christ était partout présent, juste devant nos yeux ! Ainsi, Son sacrifice par amour pour nous devenait évident dès que j’entrais dans une église. Pour des raisons que je n’arrive toujours pas à expliquer, je me retrouvais à genoux pour me signer à chaque fois que j’entrais et sortais d’une église. À Sorrente et à Rome, la Vierge Marie était partout présente, à tous les coins de rues, depuis les chapelles latérales des églises jusqu’au bracelet de mon barista ! C’était surréaliste, mais j’avais vraiment l’impression que Marie m’appelait. Chaque fois que j’entrais dans une église, je me sentais obligée de la chercher. Je voulais la saluer et lui demander de m’aider concernant la tragédie qui s’était produite un peu plus tôt dans ma vie.
À Assise, j’ai été impressionnée par saint François mais j’ai surtout été émue jusqu’aux larmes par sainte Claire. Je me suis agenouillée devant son tombeau et j’ai de nouveau demandé de l’aide. Je ne suis pas une mystique, et je n’avais jamais vécu quelque chose de semblable auparavant mais, en un instant, sainte Claire était réellement présente devant moi. Elle me disait qu’elle allait prendre toute ma douleur et mon anxiété pour les offrir à Dieu. J’ai senti qu’elle me disait que je pouvais compter sur elle et que je pouvais lui faire confiance, ainsi qu’à Jésus. Elle était vêtue d’une belle robe semblable à celle d’une demoiselle d’honneur, et son visage était éclairé par une lumière brillante magnifique. Elle m’a montré son cœur, ses doux bras et ses genoux, elle me disait que je pouvais y déposer tous mes problèmes. J’ai pleuré, mais j’ai aussi ressenti la paix pour la première fois depuis longtemps. À partir de là, tout en Italie est devenu un tourbillon d’agenouillements, de prières et de questions théologiques, tout cela devant les plus belles œuvres d’art du monde.
Quand je suis rentrée à la maison, j’ai vite réalisé que je n’aimais pas ma vie. Je détestais ce que je faisais. Je me sentais dégoûtante et coupable du travail que je faisais depuis dix ans. Je ne pouvais pas m’empêcher de penser à tout ce que j’avais fait et à toutes les vies que j’avais affectées avec la pornographie. Je me sentais grotesque. En même temps, je commençais à fréquenter régulièrement une vieille et belle église catholique près de chez moi, dans le but de renouer avec les sentiments que j’avais ressentis en Italie. Peu de temps après, j’ai pris rendez-vous avec un prêtre, avec lequel j’ai longuement parlé. C’est à ce moment-là que tout a vraiment changé pour moi. Entre autres choses, il m’a dit que Dieu m’aimait et voulait que je sois heureuse. Quand il a dit cela, c’était comme si une lumière chaude m’enveloppait, comme si le soleil se levait pour la première fois depuis des années. J’avais enfin l’impression que je pourrais peut-être me reconstruire. C’était comme une étreinte d’un autre monde, je sentais que tout irait bien maintenant. J’ai commencé à pleurer et je n’ai plus vraiment arrêté depuis. Avant de parler au prêtre, j’avais parlé à sa secrétaire pendant 10 minutes, et pendant ces 10 minutes, j’avais réalisé que je voulais avoir ce qu’elle avait. Elle était attentionnée, gentille et pleine de foi. Je voulais être quelqu’un de meilleur. Je voulais être heureuse et faire rayonner en moi l’amour de Dieu.
Je sais maintenant que Jésus répond toujours aux prières, mais pas de la façon dont on le souhaite ou dont on l’attend. Il a répondu à mes prières désespérées, au milieu de la plus grande tragédie de ma vie, en me conduisant à Son Église et en me faisant voir enfin la vérité sur les graves péchés que je commettais, me poussant à grandir en vertu et à me tourner vers Dieu, loin du péché, afin que je puisse être avec Lui et mon bien-aimé au Paradis. Je suis maintenant très reconnaissante et mon cœur est constamment comblé.
Vous êtes donc née dans une famille protestante, mais c’est l’Église catholique qui vous est apparue comme la véritable Église du Christ, pourriez-vous développer ce point ?
Tout d’abord, ma conversion s’est produite au sein de l’Église catholique, grâce à notre Bienheureuse Mère, la Vierge Marie, et à Claire d’Assise, une sainte catholique. Deuxièmement, en fréquentant mon église catholique locale et en parlant pour la première fois avec un prêtre, j’avais juste l’impression que Dieu m’appelait à rentrer à la maison, dans l’Église que son Fils avait fondée ici-bas. Enfin, j’ai fait mes propres recherches.
J’avoue que j’avais de nombreuses idées fausses et que je développais même inconsciemment ce que j’appellerais un « sectarisme anti-catholique », qui couvait quelque part en moi depuis l’enfance. Pendant le RICA (ndlr : Rituel de l’Initiation Chrétienne des Adultes), des préjugés insensés ont surgi de moi, sans que je sache vraiment d’où venaient ces opinions anti-catholiques. Chaque fois qu’un doute advenait, je l’examinais et je faisais des recherches ou j’interrogeais quelqu’un de mieux formé, et je me rendais compte à chaque fois que ce que l’Église catholique enseignait était vrai. On m’avait fait avaler beaucoup de mensonges sur Martin Luther, sur la Réforme protestante et sur les prêtres catholiques. Le RICA m’a vraiment aidé à surmonter les préjugés protestants de mon enfance. Honnêtement, je suis tombée amoureuse de l’Église catholique ! Elle est d’une telle richesse ! La Sainte Trinité, Marie Mère de Dieu, tous ces saints héroïques, les sacrements, l’histoire, la tradition, la beauté, l’esthétique, tout ! Mais ce qui m’a le plus touché, c’est l’Eucharistie. Jésus est physiquement présent dans toutes les églises catholiques du monde entier. C’est incroyable pour moi. Lorsque j’ai reçu ma première Communion à la veillée pascale, c’est toute ma vie qui a changé ! J’ai énormément pleuré de joie après avoir reçu le Corps et le Sang de Jésus ! Ma vie ne sera plus jamais la même.
Et ce que j’aime vraiment dans l’Église catholique, c’est que tout ce que nous croyons se trouve dans le Catéchisme. C’est la même chose pour tout le monde. Je peux aller à la messe en Italie, j’y serai comme dans une petite ville du Wisconsin. À l’inverse, vous pourrez visiter deux églises protestantes dans une même ville, vous y ferez et y entendrez des choses totalement différentes. J’ai vraiment adoré suivre les cours du RICA pendant plusieurs mois avant d’être officiellement confirmée dans l’Église lors de la veillée pascale.
Au départ, il m’était vraiment difficile de comprendre la doctrine de la Sainte Trinité, jusqu’à ce que mon instructeur me raconte l’histoire de Saint Augustin à propos d’un enfant tentant de faire entrer l’océan tout entier dans un trou qu’il avait creusé. C’est encore délicat, mais cela m’a fait réaliser que les humains ne comprendront jamais pleinement le mystère et la grandeur de la Trinité. Tout ce que nous avons vraiment besoin de savoir, c’est que la Trinité engendre l’épanouissement absolu et éternel de l’amour entre le Père et le Fils.
J’ai appris beaucoup de choses lors du RICA… que saint Pierre était le premier pape, par exemple ; que les apôtres furent les premiers évêques ; que Martin Luther avait retiré des livres de la Bible ; ou encore que Marie était la nouvelle Arche d’Alliance. Aussi, apprendre l’existence de la succession apostolique a été pour moi incroyable, cela a vraiment solidifié ma foi en notre Sainte Mère l’Église.
Il est encore parfois difficile de remettre ma vie entière entre les mains de Dieu et d’unir mes souffrances aux Siennes, mais j’y travaille perpétuellement et j’ai déjà beaucoup grandi depuis ma conversion.
Comment votre conversion a-t-elle changé votre vie ?
Cela peut sembler très cliché, mais j’ai aujourd’hui la sensation d’avoir été complètement sauvée et d’être bénie de Dieu. Malgré ce que j’étais et après tout ce que j’ai fait, Jésus ne m’a pas tourné le dos. Cela se traduit chez moi par de la gratitude et de la joie en abondance. Je pense toujours que celle-ci va se dissiper, mais au contraire elle réapparaît chaque fois que je reçois l’Eucharistie ou que je me confesse. Je suis tellement heureuse, tellement joyeuse ! Il y quelque chose d’enfantin dans tout cela, mais je n’en ai pas honte du tout ! Et c’est un tel soulagement de ne plus avoir à faire ce qui m’a rendu si malheureuse dans le passé. Même cette prise de conscience est un soulagement et une source de joie. Avant ma conversion, je vivais au jour le jour en pensant que tout allait bien, mais j’ai découvert que rien n’allait en réalité et que je pouvais adopter une vie bonne, et même mieux que bonne. Qui ne serait pas ravi d’avoir découvert cela ? Il est impossible pour moi de ne pas être joyeuse, d’autant plus que beaucoup de catholiques m’encouragent, m’aiment et me soutiennent.
Il faut voir à quel point mon temps de rétablissement moral, après une tragédie ou un évènement triste, a changé lui aussi. C’est vraiment incroyable. Autrefois, je m’enfonçais profondément et longuement dans la tristesse. Maintenant, si quelque chose de mauvais, de triste ou de tragique me touche, je l’offre à Dieu, tout en conservant mon Espérance et ma confiance en Lui. C’est une sensation fantastique ! Au cours des derniers mois, j’ai senti la douleur dans ma vie diminuer. J’ai aussi vécu des accès d’amour et de charité envers les autres, qui semblaient venir de nulle part.
Depuis plusieurs années, encore, je consultais un psychologue chaque semaine et participais presque chaque jour à des thérapies de groupe. En février, mon thérapeute m’a suggéré que je n’avais plus besoin de venir aussi souvent. N’est-ce pas formidable ?
Lors de ma première confession, j’ai ressenti la miséricorde divine : Dieu m’enveloppait dans une étreinte apaisante de pardon. J’ai beaucoup pleuré, mais Il nettoyait mes larmes. Après ma confession, j’aurais pu prier et faire ma pénitence à plusieurs endroits dans l’église, mais j’ai été attirée à l’extérieur par une petite statue de saint François d’Assise, sous un grand chêne. Je me suis assise par terre et j’ai fait ma pénitence. Plus tard, j’ai réalisé que j’avais choisi cet endroit parce que je m’y sentais comme une enfant. J’avais l’impression d’être née à nouveau. Il y avait en moi une joie enfantine et un sentiment de liberté totale.
Néanmoins, la première fois que j’ai pensé à renoncer aux revenus somptueux qu’engendraient mes activités dans la pornographie, cela a été un véritable combat intérieur ! mais je savais que pour vraiment me convertir, donner ma vie à Jésus et devenir un véritable témoin auprès des autres acteurs pornographiques et de ceux qui luttaient contre leur dépendance au porno, je devais tout arrêter. Cela m’angoissait, mais je savais que je voulais faire quelque chose qui apporterait foi, espoir et beauté dans la vie des gens, or avant de me lancer dans le porno, j’avais travaillé pour l’un des plus grands créateurs de bijoux de la côte Est des États-Unis. Il m’a donc semblé intéressant de revenir à mes racines et d’utiliser la créativité et le sens de la beauté que Dieu m’a donnés pour Lui exprimer ma gratitude et me maintenir connectée à Lui et à Sa Mère. Ainsi, je conçois et je fabrique à la main des chapelets personnalisés qui sont ensuite offerts comme cadeaux de baptême, de confirmation ou d’anniversaire. J’en suis très fière ! J’ai pu notamment réaliser un rosaire pour un prêtre dominicain. C’est incroyable qu’on m’ait fait confiance pour cela, compte tenu de mon passé.
Dans ma vie antérieure, rien de ce que je faisais n’élevait qui que ce soit, ne me rendait fière ou ne me faisait me sentir spéciale. Au contraire, je me vautrais dans la luxure et la vanité. Je suis tellement reconnaissante envers Dieu pour ma nouvelle vie ! […]