Vingt savants catholiques, universitaires ou théologiens (de différentes tendances), ont publié mardi 29 avril une lettre ouverte par laquelle ils demandent aux évêques catholiques d’interpeller le pape François à propos des hérésies qu’ils l’accusent de professer, afin qu’il les rejette ou à défaut, s’il s’obstine, de constater que celui-ci s’est librement dépossédé de la papauté. Rien que ça. La démarche est osée, mais observons que c’est la suite logique du mépris affiché suite aux demandes légitimes de plusieurs cardinaux et évêques, formulées au travers des Dubia, et après les faits rapportés par Mgr Vigano, faits qui n’ont pas été démentis et qui méritent pourtant une réponse. Enfin, comme indiqué dans le texte ci-dessous, ce texte est la 3e étape d’un processus qui a commencé en 2016 sans obtenir de réponse. Or, à l’heure où l’on parle beaucoup du problème du cléricalisme, les fidèles -surtout que les signataires sont des universitaires et théologiens renommés et pas du tout des personnages farfelus- ont un droit légitime à obtenir une réponse à leurs questions.
Le texte original et complet en langue anglaise, qui fait foi, se trouve ici.
Le texte français complet, traduit par Jeanne Smits, se trouve ici.
Les auteurs ont publié un résumé de leur long texte, que Jeanne Smits a traduit :
Résumé de la “Lettre ouverte aux évêques de l’Église catholique”
La Lettre ouverte aux évêques de l’Église catholique constitue la troisième étape d’un processus qui a commencé à l’été 2016. A cette époque, un groupe ad hoc de 45 membres du clergé et savants catholiques ont écrit une lettre privée à tous les cardinaux et patriarches catholiques orientaux, mettant en évidence les hérésies et autres erreurs graves qui semblaient être contenues ou favorisées par l’Exhortation apostolique Amoris laetitia du pape François. L’année suivante, après que le Pape François eut continué par la parole, l’action et l’omission de propager beaucoup de ces mêmes hérésies, une Correction filiale fut adressée au pape par beaucoup de ces mêmes personnes, ainsi que par d’autres membres du clergé et savants, soit au total 250 personnes. Cette deuxième lettre a été rendue publique en septembre 2017 et une pétition en sa faveur a été signée par quelque 14.000 personnes. Les auteurs de cette lettre déclaraient toutefois qu’ils ne cherchaient pas à juger du fait de savoir si le pape François était conscient de répandre l’hérésie.
La présente Lettre ouverte aux évêques de l’Église catholique va plus loin en affirmant que le Pape François est coupable du crime d’hérésie. Ce crime est constitué dès lors qu’un catholique nie sciemment et avec obstination une chose dont il sait que l’Église enseigne comme ayant été révélée par Dieu. Prises ensemble, les paroles et les actions du Pape François constituent un rejet total de l’enseignement catholique sur le mariage et l’activité sexuelle, sur la loi morale, sur la grâce et sur le pardon des péchés.
La Lettre ouverte met également en évidence le lien entre ce rejet de l’enseignement catholique et la manière dont le pape François favorise des évêques et autres membres du clergé qui se sont rendus coupables de péchés et de crimes sexuels, comme l’ex-cardinal Theodore McCarrick, ou qui ont protégé le clergé coupable de péchés et crimes sexuels, comme feu le cardinal Godfried Danneels. Cette protection et cette promotion des clercs qui rejettent l’enseignement catholique sur le mariage, l’activité sexuelle et la loi morale en général, même lorsque ces clercs ont personnellement et affreusement violé la loi morale et civile, sont suffisamment cohérentes pour être considérées comme une politique du pape François. Elles fournissent à tout le moins une preuve de la non croyance en la véracité de l’enseignement catholique sur ces sujets. Elles désignent aussi une stratégie en vue d’imposer le rejet de ces enseignements par l’Église, en nommant à des postes influents des individus dont la vie personnelle se fonde sur la violation de ces vérités.
Les auteurs considèrent qu’un pontificat hérétique ne peut être toléré ou dissimulé pour éviter un mal plus grave. Il porte atteinte au bien fondamental de l’Église et doit être corrigé. Pour cette raison, l’étude s’achève sur une description des principes théologiques et juridiques traditionnels qui s’appliquent à la situation actuelle. Les auteurs demandent respectueusement aux évêques de l’Église d’enquêter sur les accusations contenues dans la lettre, afin que, s’ils les jugent fondées, ils puissent libérer l’Église de sa détresse actuelle, conformément au saint adage Salus animarum prima lex (« le salut des âmes est la loi suprême »). Ils peuvent le faire en avertissant le Pape François de rejeter ces hérésies et, s’il s’y refuse obstinément, en déclarant qu’il s’est librement dépossédé de la papauté.
Bien que cette Lettre ouverte soit un document inhabituel, voire historique, les propres lois de l’Église affirment à propos des laïcs que « selon le savoir, la compétence et le prestige dont ils jouissent, ils ont le droit et même parfois le devoir de donner aux Pasteurs sacrés leur opinion sur ce qui touche le bien de l’Église » (Code de droit canonique, canon 212.3). Bien que les catholiques soutiennent qu’un pape s’exprime infailliblement dans certaines conditions strictement définies, l’Église n’affirme pas qu’il lui est impossible de tomber dans l’hérésie lorsque ces conditions ne sont pas réunies.
Parmi les signataires de la Lettre ouverte se trouvent non seulement des spécialistes en théologie et en philosophie, mais aussi des universitaires et des chercheurs en d’autres domaines. Cela cadre bien avec l’affirmation centrale de la Lettre ouverte, à savoir que le rejet par le pape François des vérités révélées est évident pour tout catholique bien instruit qui est disposé à examiner les faits. Les signatures du P. Aidan Nichols OP et du Professeur John Rist sont à signaler à cet égard. Le P. Nichols est l’un des théologiens les plus connus dans le monde anglophone ; il est l’auteur de nombreux livres sur un large éventail de sujets théologiques, dont les travaux de Hans Urs von Balthasar et Joseph Ratzinger. Le professeur Rist, connu pour ses travaux en philosophie classique et en histoire de la théologie, a occupé des chaires et enseigné à l’Université de Toronto, à l’Augustinianum à Rome, à l’Université catholique d’Amérique, à l’Université d’Aberdeen et à l’Université hébraïque de Jérusalem.
La Lettre Ouverte est publiée juste après la célébration de la Semaine Sainte et de la Semaine de Pâques, dans l’espoir que la « passion » actuelle de l’Église puisse céder bientôt la place à une entière résurrection de la vérité salvifique de Dieu.