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L'Eglise : Vie de l'Eglise

Après Mgr Strickland et Mgr Rey, à qui le tour ?

Après Mgr Strickland et Mgr Rey, à qui le tour ?

De Jean-Pierre Maugendre :

Personne ne pourra reprocher au pape François de ne pas gouverner ! Le Saint-Père poursuit un dessein explicite : transformer l’Église catholique, « mère et maîtresse de vérité », en une Église « synodale » et « inclusive », « hôpital de campagne après la bataille ». Son approche « pastorale » qui consiste à réaffirmer officiellement la doctrine traditionnelle tout en multipliant les dérogations à l’application cohérente de cette même doctrine semble inspirée de la fameuse formule de Clemenceau : « Il faut s’appuyer fermement sur les principes. Ils finissent toujours par céder ». On pense également au constat du cardinal Montini, futur Paul VI, alors archevêque de Milan sur les rapports de l’Église et du monde :

« La capitulation est voilée par tout un langage, par toute une phraséologie. Les vieux amis qui sont restés sur la voie droite sont regardés comme des réactionnaires, des traîtres. On ne considère comme vrais catholiques que ceux qui sont capables de toutes les faiblesses et de toutes les compromissions » (4 septembre 1956).

Doté d’une volonté qui étonne à son âge l’hôte de sainte Marthe déploie, imperturbablement, son œuvre de transformation de l’Église en écartant sans ménagement les prélats ou institutions qui s’opposeraient à sa volonté.

Des mises à l’écart ciblées

Ainsi le samedi 11 novembre le pape François a destitué Mgr Strickland de sa charge d’évêque de Tyler au Texas. Le prélat était connu pour ses réticences aux nouvelles orientations données par le Saint-Père. Il déclarait ainsi le 13 mai dernier : « Je rejette son (celui du pape) programme visant à saper le dépôt de la foi ». À la suite de cette déclaration une visite apostolique, dont le rapport est à ce jour inconnu, fut diligentée dans le diocèse, des pressions furent exercées sur Mgr Strickland pour qu’il démissionne. En vain. Le pape a donc destitué Mgr Strikland de sa charge, ce que lui permet le droit canon. En période de synodalité et de transparence il apparaît curieux que les raisons officielles de cette destitution soient toujours ignorées.

Le mardi 21 novembre Mgr Touvet, alors évêque de Châlons-en-Champagne, était nommé coadjuteur, avec « pouvoirs spéciaux », de Mgr Rey, évêque de Fréjus-Toulon. Depuis un an et demi les ordinations sacerdotales étaient suspendues, une dizaine de séminaristes étant ainsi pris en otage. Une « visite fraternelle » du cardinal Aveline, archevêque de Marseille, puis une visite canonique de Mgr Hérouard, archevêque de Dijon, ont accouché de cette solution. Elle revient, en vertu des « responsabilités spécifiques » qui lui ont été confiées à transmettre à Mgr Touvet la direction du diocèse avec une attention particulière accordée à la « formation des séminaristes et des prêtres ». Quand on sait que Mgr Touvet, en huit années d’épiscopat à Châlons a ordonné 1 prêtre, en 2022, et Mgr Rey, dans le même temps, 41 prêtres sans oublier la dizaine d’ordinations en suspens on se demande si tout cela est bien sérieux. Ou au contraire très sérieux s’il s’agit de détruire ce que Mgr Rey et son prédécesseur Mgr Madec avaient réussi à bâtir en plusieurs décennies : le seul diocèse de France dans lequel toutes les paroisses ont un curé. Les évêques français voulaient la neutralisation de Dominique Rey, coupable de réussite. Dès lors, la nomination de Mgr Touvet, un « classique » peut aussi s’interpréter comme la moins mauvaise des solutions. On ne tardera pas à savoir ce qu’il en est.

Ces évêques rejoignent la longue liste des prélats destitués ou poussés à la démission : Mgr Mario Oliveri, évêque d’Albenga Imperia en Italie, Mgr Hector Aguer, archevêque de La Plata, en Argentine, etc. sans oublier les cardinaux Burke, Muller ou Sarah à ce jour sans fonctions officielles. Tous ces prélats ont en commun, à des degrés divers, un attachement à la doctrine traditionnelle de l’Église, une sympathie pour la messe traditionnelle, et, pour les évêques diocésains, des séminaires prospères (21 séminaristes au diocèse de Tyler pour 120 000 catholiques). Cette politique méthodique d’élimination de toute forme d’opposition à la conception synodale de l’Église apparaît d’autant plus choquante que « en même temps » ne sont pas sanctionnées les divagations doctrinales les plus extravagantes comme celles portées par l’Église d’Allemagne et tolérés des comportements parfaitement scandaleux, comme, pendant des années, les commerces de lit du cardinal Mac Carrick avec certains de ses séminaristes.

Les communautés religieuses aussi

Mais le « renouveau » ne s’arrête pas là.  Ainsi la prospère communauté des Franciscains de l’Immaculée (350 religieux, 300 religieuses en 2011) qui avait le tort de s’intéresser à la messe traditionnelle et de s’interroger sur certains textes du concile a été « recadrée » à partir de 2013, son fondateur, le père Manelli, déposé, plusieurs couvents fermés dont celui de Bénévent, siège de la congrégation. Un commissaire politique – pardon, apostolique -, le père Volpi a été nommé et est décédé sur ces entrefaites après avoir été condamné par la justice pour avoir accusé, faussement, le père Manelli de détournement de fonds. Une opération analogue se déroule actuellement en France sous la houlette du cardinal Ouellet, ancien préfet de la congrégation des évêques, à propos de l’Institut des dominicaines du Saint-Esprit qui regroupe une centaine de sœurs. Agrégé à l’ordre dominicain en 1943 cet Institut, fondé par l’abbé Berto, théologien de Mgr Lefebvre au Concile, avait réussi, depuis 1969, à maintenir la célébration de la messe romaine traditionnelle dans ses établissements scolaires. Le récent motu proprio Traditionis custodes semble avoir convaincu la direction de la communauté de s’ouvrir aux réformes liturgiques post-conciliaires.

Enfin, concernant la vie religieuse le décret Cor orans du 15 mai 2018 signe, tout simplement, la fin de la vie contemplative féminine, les communautés devant se regrouper et les religieuses étant astreintes à multiplier les déplacements pour suivre des formations « communautaires ».

Ni étonnement ni découragement

Si tout cela est bien contrariant, cela ne doit ni surprendre ni décourager. En 357 le pape Libère excommuniait Athanase, patriarche d’Alexandrie et approuvait la profession de foi, bien ambigüe, de Sirmium. Le fait est là. Massif ! Comme le dit St Jérôme : « Le monde entier gémit, stupéfait de se réveiller arien ». Pourquoi notre époque devrait-elle être préservée des errances qui furent, parfois, celles de nos Anciens ? Hier le pape et une grande partie de l’Église faisaient cause commune avec l’empereur, arien. Aujourd’hui le pape et une grande partie de l’Église se rallient aux valeurs dominantes de la société post-moderne. Malgré cela nous savons que l’Église a les paroles de la vie éternelle et que les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle. Il est, de plus, conforme à la nature humaine que dans l’Église, comme dans toute société, clercs et laïcs se répartissent, face aux changements et aux ruptures voulus par l’autorité suprême en trois catégories distinctes. Tout d’abord ceux qui, par conviction ou opportunisme, partagent ce projet novateur. Ensuite, ceux pour qui l’obéissance aveugle tient lieu de conscience, souvent en réalité mus, ou plutôt figés, par la peur. « Il aura fallu que j’arrive vers la fin de ma vie pour comprendre le rôle que joue la peur dans la vie des hommes » écrivait le père Calmel (o.p.) qui, lui, n’avait pas peur. Enfin ceux qui par fidélité à ce qui « toujours, partout et par tout le monde a été cru dans l’Église » se voient contraints de résister aux nouveautés. Par nature ces résistants à l’air du temps et aux abus de pouvoir de l’autorité ont vocation à être humainement peu nombreux. Mais sont-ils si peu nombreux ? On voit, par exemple que la « résistance » liturgique malgré toutes les persécutions et restrictions est en pleine croissance ; on observe aussi que la critique des errances actuelle et même parfois du Concile Vatican II est de plus en plus largement partagée. En tous cas tous ceux qui n’avalisent pas le ralliement de l’Église à la modernité savent qu’ils ont choisi le camp de la victoire, celui du Christ et de ses anges, celui des saints. Ils savent aussi que seul le retour de l’autorité à sa mission première de « conforter ses frères dans la foi » permettra de résoudre la terrible crise que vit la Sainte Église.

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