Cette relique, portée par le Christ, de la Cène jusqu'à la crucifixion, sera exceptionnellement exposée du 25 mars au 10 avril 2016 en la basilique Saint-Denys d'Argenteuil dans le Val d'Oise. La dernière ostension a eu lieu en 1984. La tunique y est conservée depuis près de 1200 ans.
La tunique aurait été achetée par Ponce Pilate qui l'aurait revendu à des chrétiens. L'apôtre Pierre en aurait été le dépositaire puis, chassé de Jérusalem, l'aurait emmené avec lui à Jaffa où il se réfugie chez le juif Simon. Elle est retrouvée vers 327 ou 328 par sainte Hélène, mère de l'empereur Constantin. Grégoire de Tours dans son « De gloria martyrum » et Frédégaire dans sa « Chronologie » rapportent qu'en l'an 590, après avoir été longtemps cachée dans un coffret de marbre à Jaffa, le juif Simon révèle sa cachette. L'empereur sassanide Khosro II ayant envahi la Palestine lors de la guerre perso-byzantine de 602-628, la tunique aurait été transférée dans la basilique des anges à Germia, près de Constantinople où elle aurait été conservée jusqu'au VIIIe siècle.
Elle aurait été ensuite offerte à Charlemagne au début du IXème siècle par l'impératrice Irène de Constantinople. Charlemagne confiera la relique à sa fille Théodorade, prieure du monastère d'Argenteuil. Dissimulée dans un mur lors des invasions vikings, découpée et enterrée par un prêtre à la Révolution française, volée puis restituée dans les années 1980… la relique porte les stigmates du temps mais elle a toujours fini par retrouver sa châsse d'Argenteuil.
La Tunique d'Argenteuil est une tunique de dessous de dimensions 122 centimètres (à l'origine 148 centimètres) de hauteur pour 90 centimètres de largeur sous les bras. Les fibres de la tunique sont en laine et le fils sont d'une grosseur très régulière. Il s'agit d'un tissu souple et léger. Le tissage est uniforme et régulier torsadé en "Z", réalisé sur un métier à tisser primitif. Le résultat est remarquable pour un travail entièrement manuel. La tunique est primitivement "inconsutile", c'est-à-dire sans couture, tissée d'un seul tenant, y compris les manches. Il s'agit d'un procédé de tissage régulier dont la technique ne s'est pas perdue en Orient. Son tissu brun foncé est contemporain des tissus orientaux des premiers siècles de l'ère chrétienne. Le tissu a été teint avec un mordant de fer, comme la garance, très utilisée à l'époque par les gens de condition modeste (le pourpre n'était réservé qu'aux riches).
Visible seulement deux fois par siècle, la prochaine ostension aurait dû avoir lieu en 2034. Mais l'évêque de Pontoise a décidé de précipiter les choses pour 2016. En raison d'une conjonction de trois événements importants en 2016 :
- Le diocèse de Pontoise fêtera son cinquantième anniversaire
- la basilique d'Argenteuil soufflera ses 150 bougies.
- 2016 sera l'année de la miséricorde, décrétée par le pape François.
Mgr Lalanne, évêque de Pontoise, déclare :
«Or, cette tunique est le témoignage concret de la miséricorde du Christ, mort sur la croix pour le pardon de nos pêchés». «Tout le monde est invité à venir la voir, quelle que soit sa religion, et que ce soit dans une démarche de foi ou par simple curiosité.»
Depuis le XIXème siècle, de nombreux scientifiques se sont penchés sur cette tunique. Il a été démontré que la matière, la teinture et la méthode de tissage correspondent aux pratiques en vigueur en Syrie et en Palestine dans les premiers siècles de notre ère. Une étude réalisée entre 1932 et 1934 a par ailleurs décelé la présence de sang sur le dos et les épaules, à l'endroit où la croix portée par le Christ aurait reposée lors de sa montée au calvaire. Une datation au carbone 14, réalisée en 2004, a cependant apporté un bémol, déclarant que la tunique avait été tissée entre 530 et 640. Un résultat à relativiser, tant il a pu être faussé par l'histoire tumultueuse de la tunique, longtemps enfouie et plusieurs fois au contact de matière organique en décomposition.
Le sang retrouvé sur la tunique appartient au même groupe AB que celui présent sur le linceul de Turin et le Suaire d'Oviedo. Par ailleurs, sept pollens communs ont été retrouvés sur les trois reliques, et deux d'entre eux proviennent uniquement de Palestine: ceux d'un pistachier, Pistacia palestina, et d'un tamarin, Tamarix hampeana.
L'ostension de la Sainte tunique se tiendra du 25 mars au 10 avril 2016 dans la basilique d'Argenteuil. Elle aura lieu de 10h à 22h tous les jours, hors des offices religieux.
- 25 mars 2016: Ouverture de l'ostension. Chemin de croix à 15h, suivi de l'Office du Vendredi Saint.
- Samedi 2 avril 2016: Procession aux flambeaux et veillée d'adoration eucharistique toute la nuit.
- Samedi 9 avril 2016: Procession aux flambeaux et veillée d'adoration eucharistique.
- Dimanche 10 avril 2016: Vêpres solennelles à 16h30 et clôture de l'ostension.
Evangile selon St Jean, chapitre 19 (23-24) :
"Quand les soldats eurent crucifié Jésus, ils prirent ses habits ; ils en firent quatre parts, une pour chaque soldat. Ils prirent aussi la tunique ; c’était une tunique sans couture, tissée tout d’une pièce de haut en bas. Alors ils se dirent entre eux : « Ne la déchirons pas, désignons par le sort celui qui l’aura. » Ainsi s’accomplissait la parole de l’Écriture : Ils se sont partagé mes habits ; ils ont tiré au sort mon vêtement. C’est bien ce que firent les soldats."