Partager cet article

L'Eglise : L'Eglise en France

Au-delà de l’affaire Bétharram, assumer sa foi chrétienne

Au-delà de l’affaire Bétharram, assumer sa foi chrétienne

Alors que le premier ministre François Bayrou fustige une mécanique du scandale autour de « l’affaire Bétharam », le père Danziec revient dans Valeurs Actuelles  sur ce qui fait l’identité du chrétien : proclamer la vérité. Et ce, en dépit des tentatives de déstabilisation.

D’après la sagesse populaire « Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire ». C’est qu’en effet la vérité ne se proclame pas seulement. Elle se transmet. Réclamant d’être reçue, elle impose donc à son apôtre de disposer les esprits à sa juste réception. Il ne s’agit pas de modifier la semence, mais de préparer la terre. Les scholastiques parlaient de captatio benevolentiae, capter la bienveillance de son auditoire. Maissi cette transmission nécessite un savoir-faire délicat, ce dernier ne tient pas d’abord, ou essentiellement, aux qualités de l’intelligence. Après tout, hélas, l’on peut être à la fois plein d’esprit et en même temps très méchant homme… Dire la vérité et la communiquer dans le but qu’elle soit embrassée, et donc partagée, appellent davantage des qualités d’âme que des ressources intellectuelles. C’est ce que traduit l’élégante formule « avoir l’intelligence du cœur ».

Tête au ciel et pieds sur terre

Au milieu des vicissitudes qui traversent la vie de l’Eglise –ses institutions, ses œuvres, ses représentants (clercs ou lcs) – comment donc trouver sa place et indiquer le chemin des vertus alors que le sentiment de crédibilité est passablement entamé ?  Dans la vie des baptisés, dans le quotidien de chrétiens dans la cité, le même questionnement titille l’âme chrétienne soucieuse de professer sa foi : ai-je vécu suffisamment en cohérence avec le message de l’Evangile et de l’Eglise ? Ou me suis-je excusé d’être chrétien par toute sorte de compromissions ? Ai-je raisonnablement témoigné de mon attachement au Christ ou ai-je douté du message en raison de la turpitude de certains messagers ? En ai-je trop dit, voire trop fait… Me suis-je écouté parler ou bien me suis-je mis convenablement à l’écoute de mon prochain pour le comprendre, et donc mieux encore l’arraisonner ?

Proclamer et diffuser les vérités de la Foi n’est pas affaire de théorèmes ou de méthodologie d’instagrameurs. On ne civilise pas les cœurs par l’Evangile comme on enseigne les tables de multiplication. Les audiences cathos sur les réseaux ont leurs atouts propres mais la mentalité postmoderne peut-elle seulement comprendre que l’essentiel se joue ailleurs ? Là où pour le professeur de mathématiques les us pédagogiques peuvent relever d’un choix personnel, où pour le chrétien youtubeur l’incarnation visuelle peut créer une véritable communauté d’abonnés, la manière de transmettre la Vérité, elle, se trouve, chez les catholiques,indiquée avec précision dans les écrits de la Bible. Aux chrétiens de s’y tenir pour garantir à ses pauvres paroles pertinence et justesse. L’apôtre saint Paul écrivait déjà à son ami Timothée, au tout début du christianisme, ces conseils qui encore aujourd’hui ont valeur de trésor pour qui a soif de proclamer les richesses de Dieu : « Prêche la parole, insiste à temps et à contretemps, reprends, censure, exhorte… avec une entière patience et souci d’instruction » (II Tim IV,2). Ce que résume Paul dans une autre épitre, cette fois-ci aux Ephésiens : « Dire la vérité dans la charité » (Eph IV, 15). Ainsi, si la (re)conquête des âmes nécessite pour un chrétiend’avoir « la tête au Ciel » (connaître et aimer la vérité), elle ne saurait faire l’économie d’avoir « les pieds sur terre » (partir de la réalité, parfois complexe, qui nous entoure).

Se taire ? Dire trop ? Ne pas dire assez ? Comme toujours quand il s’agit de recherche de perfection, tout est une question de mesure. Il en va de même pour le chrétien en action. Appelé à devenir la lumière du monde et le sel de la terre, chaque baptisé doit s’efforcer de trouver le bon équilibre. L’obscurité comme une lumière trop vive, un plat fade comme une assiette trop épicée, la conséquence reste la même… Les deux premières nous rendent aveugles, les deux autres insatisfaits.

Trois phares pour résister aux tempêtes médiatiques

Les catholiques de conviction se sentent souvent seuls face aux tempêtes qui secouent la société et parfois tétanisés devant les désordres qui secouent l’Eglise. Reste que pour ouvrir sa bouche et clamer la vérité sur les toits, trois pharesviennent guider la réflexion du chrétien, quelle que soit l’époque où il vit.

Le premier phare, c’est celui de l’humilité. Ce qu’Hélie de Saint-Marc résumait ainsi dans sa lettre Que dire à un jeune de vingt ans : « Il ne faut pas s’installer dans sa vérité et vouloir l’asséner comme une certitude, mais savoir l’offrir en tremblant comme un mystère. »

Le deuxième représente l’équilibre. Selon l’enseignement de François de Sales, évêque au début du XVIIe siècle et modèle de mesure (il est le saint patron des journalistes), « Dans le régime des âmes, il faut une tasse de science, un baril de prudence et un océan de patience. » Cet équilibre invite justement à ne « rien faire par force mais tout par amour ». Dit autremet : l’art de la rondeur et de la nuance.

Le dernier phare, la prière, reste le plus mystérieux pour les générations élevées sans transcendance et sans conscience de l’au-delà ou des « forces de l’esprit ». La prière donne à« contempler la Vérité pour mieux la transmettre » selon la jolie devise des dominicains. A l’image de la prière du Munda cor que récite tout bas le prêtre ou le diacre avant de proclamer l’évangile lors de la messe. Une prière qui demande : « Viens purifier mon cœur et mes lèvres pour merendre capable de proclamer dignement ton saint message de Vie. »

Ne pas avoir peur pour mieux chasser les inquiétudes et soigner les blessures qui frappent notre monde : et si c’était cela assumer sa foi ? En dépit des raccourcis ou des falsifications du message de l’Evangile, la préservation de l’identité chrétienne de la France a ses vertus. Elle a aussi une fonction médicinale. Il s’agirait de ne point l’oublier.

Partager cet article

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services