20e extrait de l'encyclique Evangelium Vitae :
« La vie humaine connaît une situation de grande précarité quand elle entre dans le monde et quand elle sort du temps pour aborder l'éternité. La Parole de Dieu ne manque pas d'invitations à apporter soins et respect à la vie, surtout à l'égard de celle qui est marquée par la maladie ou la vieillesse. S'il n'y a pas d'invitations directes et explicites à sauvegarder la vie humaine à son origine, en particulier la vie non encore née, comme aussi la vie proche de sa fin, cela s'explique facilement par le fait que même la seule possibilité d'offenser, d'attaquer ou, pire, de nier la vie dans de telles conditions est étrangère aux perspectives religieuses et culturelles du peuple de Dieu.
Dans l'Ancien Testament, on craint la stérilité comme une malédiction, tandis que l'on ressent comme une bénédiction le fait d'avoir beaucoup d'enfants: « Des fils, voilà ce que donne le Seigneur, des enfants, la récompense qu'il accorde » (Ps 127 126, 3; cf. Ps 128 127, 3-4). Dans cette conviction entre en jeu aussi la conscience qu'a Israël d'être le peuple de l'Alliance, appelé à se multiplier selon la promesse faite à Abraham: « Lève les yeux au ciel et dénombre les étoiles si tu peux les dénombrer… Telle sera ta postérité » (Gn 15, 5). Mais ce qui compte surtout, c'est la certitude que la vie transmise par les parents a son origine en Dieu, comme l'attestent les nombreuses pages bibliques qui parlent avec respect et amour de la conception, de la formation de la vie dans le sein maternel, de la naissance et du lien étroit qu'il y a entre le moment initial de l'existence et l'action de Dieu Créateur.
« Avant même de te former au ventre maternel, je t'ai connu; avant même que tu sois sorti du sein, je t'ai consacré » (Jr 1, 5): l'existence de tout individu, dès son origine, est dans le plan de Dieu. Job, du fond de sa souffrance, s'attarde à contempler l'œuvre de Dieu dans la manière miraculeuse dont son corps a été formé dans le sein de sa mère; il en retire un motif de confiance et il exprime la certitude d'un projet divin sur sa vie: « Tes mains m'ont façonné, créé; puis, te ravisant, tu voudrais me détruire! Souviens-toi: tu m'as fait comme on pétrit l'argile et tu me renverras à la poussière. Ne m'as-tu pas coulé comme du lait et fait cailler comme du laitage, vêtu de peau et de chair, tissé en os et en nerfs? Puis tu m'as gratifié de la vie et tu veillais avec sollicitude sur mon souffle » (Jb 10, 8-12). Des accents d'émerveillement et d'adoration pour l'intervention de Dieu sur la vie en formation dans le sein maternel se font entendre également dans les Psaumes.
Comment imaginer qu'un seul instant de ce merveilleux processus de l'apparition de la vie puisse être soustrait à l'action sage et aimante du Créateur et laissé à la merci de l'arbitraire de l'homme? Ce n'est certes pas ce que pense la mère des sept frères qui professe sa foi en Dieu, principe et garant de la vie dès sa conception, et en même temps fondement de l'espérance de la vie nouvelle au-delà de la mort: « Je ne sais comment vous êtes apparus dans mes entrailles; ce n'est pas moi qui vous ai gratifiés de l'esprit et de la vie; ce n'est pas moi qui ai organisé les éléments qui composent chacun de vous. Aussi bien le Créateur du monde, qui a formé le genre humain et qui est à l'origine de toute chose, vous rendra-t-il, dans sa miséricorde, et l'esprit et la vie, parce que vous vous méprisez maintenant vous-mêmes pour l'amour de ses lois » (2 M 7, 22-23). » (§ 44)