Le 20 juin 2025, le pape Léon XIV a reconnu comme martyrs 50 Français exécutés en 1944 et 1945 par le régime nazi « en haine de la foi ». Leur béatification est célébrée le 13 décembre 2025 en la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Ces hommes – prêtres, séminaristes, religieux, militants d’Action catholique et scouts – appartenaient à la Mission Saint-Paul, initiative lancée par le cardinal Emmanuel Suhard et l’abbé Jean Rodhain pour accompagner spirituellement les jeunes Français envoyés de force en Allemagne dans le cadre du Service du travail obligatoire (STO).
Dans France catholique, Guillaume Zeller écrit :
[…] En réalité, ils seront désormais 51 bienheureux martyrs du STO car ils ont eu un précurseur, Marcel Callo, jeune jociste de Rennes, mort le 19 mars 1945 à Mauthausen, béatifié le 4 octobre 1987 à Rome par Jean-Paul II.
De quoi parle-t-on? Le décret, publié le 20 juin dernier par le dicastère des Causes des saints, pose le cadre. « Pendant la domination nazie, de nombreux prêtres, religieux et laïcs engagés dans des associations catholiques ont suivi les travailleurs français sur le territoire allemand pour leur apporter un soutien moral et spirituel », expose le document. Il s’agit là d’un cas de figure bien spécifique: ces hommes ont connu un destin singulier dans le système de persécution mis en place par les autorités du IIIe Reich: ils n’étaient ni des résistants arrêtés et déportés ès qualités, ni des prêtres persécutés en tant que tels, comme le fut par exemple le clergé polonais, ni bien sûr des victimes de persécution raciales. Pour la plupart, ils ont été réquisitionnés dans le cadre du Service du travail obligatoire (STO) mis en place en septembre 1942, et durci en février 1943, pour faire tourner les usines du Reich. D’autres les ont volontairement rejoints. Et c’est dans ces circonstances qu’ils se sont tous attachés à entretenir et développer une vie chrétienne parmi les ouvriers.
Cette activité missionnaire était pensée et coordonnée. L’initiative est imputable au cardinal Emmanuel Suhard (1874-1949), nommé archevêque de Paris en 1940 en pleine débâcle. Comme beaucoup de penseurs chrétiens de l’époque, le cardinal est très sensible à la question de la présence de l’Église auprès des ouvriers et travailleurs – le célèbre livre La France, pays de mission?, rédigé par les abbés Henri Godin et Yvan Daniel, sera publié en 1943. À ce titre, influencé notamment par la figure de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, le prélat a été un acteur essentiel de la création de la Mission de France en 1941, afin de lutter contre la déchristianisation du pays. C’est donc logiquement qu’il se soucie d’accompagner les ouvriers envoyés en Allemagne, non plus officiellement cette fois-ci, mais dans le secret. À ses côtés, l’abbé Jean Rodhain (1900-1977), ancien aumônier de la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), combattant de 1940, qui, pour sa part, œuvre à l’accompagnement des prisonniers de guerre détenus dans les stalags et les oflags (camps de prisonniers de guerre non officiers et officiers) depuis la défaite. Leur décision est prise: la mission Saint-Paul est créée. Pourquoi Saint-Paul? En référence aux emprisonnements que connut l’Apôtre des Gentils, qui furent aussi de puissants moments d’évangélisation. Discrètement, on se met alors à identifier des jeunes réquisitionnés ou à chercher des volontaires pour partir outre-Rhin, comme, dans cette dernière catégorie, le Père Pierre de Porcaro, à qui son évêque demande personnellement de partir en Allemagne en avril 1943. Les hommes qui vont prendre le chemin du départ viennent de tous les horizons. L’Église a voulu souligner cette diversité dans les documents diffusés depuis juin dernier: pour des raisons de simplicité et de lisibilité, ne pouvant détailler la biographie de tous les futurs béatifiés, venus de cinquante diocèses différents, elle a choisi d’isoler quatre noms qui incarnent les quatre principales trajectoires des membres de la mission Saint-Paul: le Père Raymond Cayré, le Frère franciscain Gérard Cendrier, le séminariste Roger Vallée et le laïc Jean Mestre. […]
