Lu dans Les 4 Vérités sous la plume de Guillaume de Thieulloy :
"Je ne suis pas allergique par
principe aux «gros», aux
multinationales et autres
entreprises employant des
milliers de salariés, des dizaines
de millions de capital,
pour des milliards de chiffre
d’affaires. Je sais fort bien que certains
de ces « gros » font correctement
leur métier. Mais ceux-ci sont,
en France, minoritaires. Je doute, par
exemple, qu’ils représentent plus du
quart des quarante entreprises cotées
dans l’indice de référence de la bourse
de Paris (le CAC 40).
J’ai eu l’occasion de dire, à plusieurs
reprises, dans ces colonnes, que ces
« gros » étaient les véritables fauteurs
de crise. […]Selon moi, le capitalisme est légitime
(et efficace) quand les dirigeants risquent
leur propre argent. Dans le cas
contraire, l’irresponsabilité gagne et
des libertés économiques sans
responsabilités associées sont non
seulement illégitimes moralement,
mais nuisibles économiquement.
Les exemples foisonnent. Mais un
événement, déjà ancien, me paraît
fort bien illustrer ce que je veux dire.
Peut-être vous souvenez-vous de la
mise en vente des licences UMTS (la
téléphonie mobile qui, à l’époque,
devait en être à la «troisième génération»). Trois acteurs majeurs se
partageaient le marché français de la
téléphonie mobile : France Télécom,
SFR (qui, à l’époque, s’appelait encore
Vivendi et était dirigé par le
sémillant Jean-Marie Messier) et
Bouygues Télécom. Les deux premiers
acceptèrent de débourser des
milliards d’euros pour ces fameuses
licences ; mais non le troisième. Les
deux premiers étaient, selon moi, des
parangons d’irresponsabilité. Le troisième,
qui n’était pas beaucoup
moins «gros», non. Pourquoi ? Tout
simplement, parce que l’argent jeté
par les fenêtres par France Télécom
ou Vivendi n’appartenait pas aux dirigeants,
tandis que celui de Bouygues
Télécom, si. Les dirigeants de
Bouygues avaient donc fait un calcul
simple, que leurs concurrents
auraient également dû faire : mesurer
le temps nécessaire pour la rentabilisation
de l’investissement. Il y fallait
quelques dizaines d’années. La décision
s’en était suivie logiquement…
Ne me faites pas dire ce que je n’ai
pas dit : il arrive que des dirigeants
non propriétaires soient responsables ;
il arrive aussi que des dirigeants propriétaires
soient mégalomanes. Mais,
globalement, les choses se passent
ainsi : si vous pouviez gagner beaucoup
d’argent en prenant beaucoup
de risques, et que ces risques soient
garantis par les contribuables ou par
les petits actionnaires, il vous serait
difficile de résister à la tentation. Si, au
contraire, c’est votre argent que vous
risquez, il y a des chances que vous y
regardiez à deux fois !Même si, manifestement, ni les politiques,
ni les journalistes, ni les chefs
d’entreprise ne semblent s’intéresser
à cela, la chose est tellement évidente
que beaucoup de Français en sentent
confusément la réalité.
Ce qu’ils ne perçoivent pas, en revanche,
c’est que l’anti-capitalisme de
type ultra-gauche et la déresponsabilisation
de ces acteurs économiques
sans propriétaire identifié se conjuguent
pour vider de sa substance le
capitalisme lui-même.
Le succès – encore aujourd’hui – des
thèses de l’ultra-gauche fait que
toute constitution de capital est sévèrement
taxée en France. Par conséquent,
les dirigeants de petites entreprises
ne peuvent accéder à l’étape
ultérieure où ils seraient propriétaires
d’une grande entreprise. Il suffit de
jeter un coup d’oeil à l’actionnariat de
la bourse allemande et de le comparer
à celui de la bourse de Paris pour
comprendre de quoi je parle. À Paris,
la plupart des sociétés sont propriétés
d’actionnaires étrangers et, d’autre
part, l’équipe dirigeante est rarement
propriétaire d’une part significative
du capital. Conséquence mécanique :
le CAC 40, vitrine la plus visible du
capitalisme français, n’est pour l’essentiel
ni capitaliste, ni français !
Et, puisqu’il n’y a pas de capitalistes
français, il n’y a que des dirigeants
non propriétaires et irresponsables,
qui aggravent encore l’image du
capitalisme dans l’esprit des Français,
facilitant la mise en application des
doctrines de l’ultra-gauche… Un vrai
cercle vicieux, dont il faut sortir au
plus vite pour l’avenir du pays !"
Sicaire Etienne
Voila une analyse fine et poussée, question économie, encore une fois …
Le fait qu’un dirigeant joue ou non son propre argent est complètement sans lien avec la réussite ou non du capitalisme. Il n’y a qu’a voir ce que font les grandes fortunes du CAC 40. Il est avéré que passé un certain niveau de fortune la rentabilité de l’entreprise n’est plus le motif d’évolution.
Les motifs varient en fonction des détenteurs du capital. Pouvoir, augmentation des dividendes, du prix de l’action … Il n’y a plus de règles.
Réorganiser le capitalisme, ce n’est pas faire de l’idéologie, ce n’est pas repenser le système, c’est simplement vérifier que les intérêts individuels se rapprochent de l’intérêt collectif.
On peut donc revoir le mode de rémunération des patrons certes, mais le point majeur consiste à qualifier l’efficacité de leur travail. Et cela est valable quel que soit le poste.
Le fait de faire en sorte que les patrons jouent leur propre argent est d’une efficacité relative. Il n’y a qu’a voir le nombre de faillites personnelles …