Le coup de gueule de Guillaume de Thieulloy dans Les 4 Vérités :
"le Premier ministre a présenté la semaine dernière un plan pour assouplir les contraintes qui pèsent sur les petites entreprises et favoriser l’embauche. Louable intention… Mais résultat beaucoup plus discutable ! Ce plan, annoncé à grand renfort de trompettes médiatiques, comporte 18 mesures et coûtera officiellement 200 millions d’euros. Mais il laisse perplexe.
On apprend ainsi que le Premier ministre propose de s’attaquer aux seuils sociaux (quand une société dépasse les 11, 20, puis 50 salariés). Mais cette mesure est, en réalité, une usine à gaz. Concrètement, Manuel Valls ne pro- pose que de différer de 3 ans l’acquittement des hausses de prélèvements sociaux et fiscaux. Rien n’est dit sur les plus graves conséquences de ces seuils: les contraintes administratives. Plus exactement, le Premier ministre les évoque, mais déclare avec désinvolture que tout a été réglé précédemment !
On a beaucoup parlé aussi du plafonnement des indemnités de licenciement aux prud’hommes. C’est certai- nement une bonne chose. Mais peut-être faudrait-il surtout aller regarder aux sources du problème. Le problème majeur des prud’hommes, c’est que le patron y est toujours regardé comme un délinquant. Serait-ce trop demander que d’instaurer une justice prud’homale où de vrais dirigeants de PME puissent siéger ? Parmi les mesures phares, on cite aussi la prime de 4000 euros pour l’embauche d’un premier salarié. Comment ne pas voir que cette prime ne va constituer qu’un effet d’aubaine? Si un patron avait prévu d’embaucher, il pourra effectivement profiter de ce petit bonus. Mais, dans le cas contraire, qui va embaucher pour une prime aussi faible ? J’entends d’ici les commentateurs protester : comment, mais 4 000 euros, c’est loin d’être négligeable. C’est même un effort considérable en période d’austérité budgétaire. Alors, précisons : ces 4 000 euros seront, en réalité, versés en 2 fois. Le premier versement de 2000 euros sera versé à l’entreprise à la fin de la période d’essai du salarié. Mais a-t-on réfléchi à ce que représentaient ces 2 000 euros ? Pour mémoire, un smicard coûte chaque mois à son patron 1646 euros. Sans parler du coût de recrutement. Qui croira qu’un patron embauche pour une prime couvrant à peine un mois et demi de salaire ? Cela étant, je ne suis pas naïf et je me doute bien que l’effet d’aubaine est l’effet réellement recherché, puisque 2017 s’approche à grands pas et qu’il serait bon pour l’exécutif socialiste de pouvoir annoncer, à côté des emplois bidons payés par l’argent public, quelques embauches privées.
Décidément, le Premier ministre ignore tout du quotidien d’un patron de petite entreprise. Le problème majeur, c’est que l’opinion publique est formatée à croire que ce patron est un « nanti » qui « exploite » le travail des autres. Alors, rappelons, martelons que le revenu moyen d’un patron de PME est de l’ordre de 4 500 euros nets. Ce n’est pas insignifiant, mais c’est très éloigné du revenu d’un parlementaire. Et ce patron de PME prend des risques, sur son patrimoine personnel, alors que l’immense majorité des « élites » – à commencer par les « élites » médiatiques et politiciennes qui le prennent pour une vache à lait – n’en prend aucun.
Mais on oublie surtout que toutes les entreprises ne se ressemblent pas : ainsi le salaire moyen d’un patron de PME travaillant dans les services aux particuliers est de l’ordre de 2 000 euros nets. C’est peu pour 60 heures de travail par semaine !
Ce que veulent les patrons de PME, ce n’est pas un énième plan de subventions plus ou moins mesquines, c’est d’abord une levée des innombrables contraintes administratives et ensuite la possibilité de pouvoir investir sereinement dans leur entreprise. Combien de sociétés saines sont-elles mises en faillite faute de trésorerie ? Alors pourquoi ne pas exonérer d’IS tout bénéfice réinvesti dans la société ? Ça ne coûterait pas grand-chose à l’État et ça donnerait un grand bol d’air aux sociétés.
Mais il est vrai que, politiquement, ça fait mieux de donner une prime de 4 000 euros pour une embauche ! Personnellement, je serais très favorable à la suppression totale des quelque 120 milliards d’euros d’aides aux entreprises, en échange d’allégements de charges. Si j’avais un seul message à envoyer à M. Valls, de la part d’un patron de PME parmi bien d’autres, ce serait : cessez de nous aider et laissez- nous gérer nos boîtes !"