Dans Le Figaro, Jean-Marie Guénois constate que les jeunes catholiques forment une génération décomplexée, sans peur et sans reproche :
"Une nouvelle génération décomplexée qui s'affirme chrétienne non par tradition mais par conviction.
Les jeunes pousses du Champ-de-Mars ne sont peut-être pas les herbes folichonnes du jardinier Delanoë […] L'efficacité redoutable de ces nouveaux militants a prouvé qu'ils ne sont pas des herbes folles. D'autant qu'ils ont surpris. On les avait vus, par exemple, très pieux, dans les colonnes des Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) de Madrid pendant l'été 2011. Ces 50.000 Français ne passaient pas inaperçus mais ils étaient sages. Mais, cette fois, ces jeunes gens plutôt bien élevés ont détonné.
Le dimanche 13 janvier, ils ont troqué leurs polos bien coupés pour enfiler des sweats fuchsia, à capuche… Cette génération, plutôt rangée et avide de spiritualité, n'a pas non plus hésité à plancher sur des slogans «tweeto-compatibles» et percutants. Jeux de mots dignes des méthodes des vieux limiers de l'«agit-prop» pourtant sanctuarisée à gauche… Une fois à la manœuvre, ils ont pris leur monde à contre-pied: avant et pendant la manifestation. Les enfants de chœur avaient mué! Hypermobilisés, innervés par réseaux électroniques ultraréactifs, ils dansaient, totalement décomplexés, sur le toit des «chars» de la manifestation sur les tubes d'une «techno» la plus branchée.
Du coup, la «référence», dont on parlait dans les milieux cathos comme d'anciens combattants évoquaient la Première Guerre mondiale, c'est-à-dire «la» manif de juin 1984 en faveur de l'école libre, a jauni comme un vieux cliché. Il n'a suffi que de quelques heures, ce dimanche 13 janvier, pour réaliser qu'une nouvelle génération était bel et bien née en ce matin glacial. Ils étaient loin, les impers et les cravates des parents d'élèves de l'enseignement libre qui avaient donné tout son tonus à la manifestation de 1984. Deux manifestations monstres qui n'ont décidément plus rien à voir entre elles. […]Un sociologue des religions, Philippe Portier, qui avait mené une étude sérieuse sur la génération des JMJ de Madrid en 2011, s'est glissé dans les rangs des manifestants. Il a été effectivement frappé par le poids de la tranche des 18-25 ans et des 30-50 ans alors que «les cheveux blancs» caractérisent plutôt le milieu catholique français. Ce chercheur a surtout constaté une forme d'«engagement nouveau» qu'il n'avait pas perçu il y a encore deux ans: «Les jeunes des JMJ souffraient encore d'une timidité sociale.» Elle semble avoir disparu et il analyse ce passage à l'acte par le fait que cette génération a su emprunter «les codes d'expression de la rhétorique moderne et les comportements en cours et admis» pour «traduire» d'une nouvelle façon «un discours de solidité morale». Ce faisant, ces jeunes ont su trouver «une audience dans l'opinion». Ce qui concourt, selon lui, à une «republicisation de l'Église», alors que les sociologues annoncent toujours sa fin, car le discours catholique s'est comme «déringardisé».
[…] Thibaud Collin, également impliqué dans ce mouvement d'ensemble, connaît bien cette génération qu'il a devant lui, en classes préparatoires, et confirme que le schéma de guerre des deux France avec «ingérence du religieux» a connu une «déroute»: «Cette génération a su entendre les alertes de Benoît XVI sur le relativisme actuel. Elle a bien intégré la méthode exposée par ce Pape: en matière sociale et politique, il faut intervenir au service de la conscience et de la justice et non pas en confessionnalisant son discours.» […]"