Guillaume Cuchet, professeur d’histoire contemporaine à Paris I-Panthéon-Sorbonne, auteur de Le catholicisme a-t-il encore un avenir en France ?, a été interrogé dans La Nef sur l’avenir de la paroisse et la mission. Extrait :
La « génération Jean-Paul II » qui, dans ses premières cohortes, a aujourd’hui 50 ou 60 ans et qui, pour une part, gouverne l’Église, est à l’heure des premiers bilans. Elle s’était fondée sur l’idée que si Vatican II n’avait pas produit les bons effets attendus, c’était parce qu’on l’avait mal compris ou mal appliqué, ou qu’il était intervenu dans une conjoncture trop contraire. Dès lors qu’on l’aurait remis sur les bons rails et appliqué dans un contexte assaini, il pourrait produire ses bons effets. Et, de fait, dans les années 1980-1990, le catholicisme français a pu penser un temps qu’il en serait bien ainsi, notamment avec le succès des JMJ de Paris en 1997. Il y a même eu à ce moment-là un court moment d’euphorie dans ses rangs. Je ne suis pas sûr qu’on en dirait autant aujourd’hui, alors que tous les indices sont au rouge, sans parler des effets du Covid et de la crise des abus sexuels dans l’Église. Une certaine perplexité, voire un doute, s’est emparée de la génération Jean-Paul II vieillissante et la suivante est un peu en panne de projet apostolique de rechange. Comme pour l’Action catholique, on s’aperçoit que la génération a transformé le catholicisme français, mais qu’elle n’a pas réussi à inverser les courbes de la sécularisation. C’est tout le paradoxe de ces mouvements apostoliques qui se suivent depuis le XIXe dans l’Église de France qu’ils prétendent à chaque fois inverser le cours de l’histoire mais que leur résultat réel, in fine, consiste surtout à transformer le catholicisme subsistant. Ce n’est pas rien, mais ce n’était pas le but premier de l’opération.