A l'heure où la réforme du collège s'attaque encore plus à la déconstruction de l'apprentissage de l'Histoire de France, deux historiens ont publié un livre sur Charles Martel afin de démontrer que la bataille de Poitiers ne serait qu'un "enjeu mémoriel pour l’extrême droite" et que le souvenir de Charles Martel ne se serait "politiquement construit depuis une quinzaine d’années seulement".
Laurent Wetzel, haut fonctionnaire de l’Education nationale à la retraite, ancien élève de l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm, agrégé d’histoire, démonte cette imposture et montre que Charles martel et la bataille de Poitiers osnt bien présents dans l'enseignement de l'Histoire de France et dans les livres dits "républicains" anciens mais aussi récents:
"A en croire cet idéologue et ces deux « historiens », bien décidés à terrasser les « historiens islamophobes », « la bataille de Poitiers est un événement mineur de notre histoire, qui « ne doit sa survie mémorielle qu’à l’utilisation qui en a été faite, depuis les années 1880, par l’extrême droite et le courant nationaliste » » ; « elle n’est pas historiquement le choc que beaucoup d’autres ont imaginé » ; « les grandes figures de l’enseignement sous la IIIe République – Jules Michelet et Ernest Lavisse – ne lui ont consacré que peu d’attention, Jules Michelet minimisant la bataille et le manuel Lavisse ne lui consacrant pas une ligne ».
On reste interdit devant tant de contre-vérités.
Jules Michelet, qui a publié son Histoire de France des origines à la mort de Louis XI, entre 1833 et 1844, sous la Monarchie de Juillet et non sous la IIIe République, soulignait au contraire dans cet ouvrage l’importance de ladite bataille :
« Les Sarrasins, maîtres de l’Espagne, s’étaient emparés du Languedoc. De la ville de Narbonne, leur innombrable cavalerie se lançait audacieusement vers le nord, jusqu’en Poitou, jusqu’en Bourgogne, confiante dans sa légèreté et dans la vigueur infatigable de ses chevaux africains. La célérité prodigieuse de ces brigands, qui voltigeaient partout, semblait les multiplier ; ils commençaient à passer en plus grand nombre : on craignait que, selon leur usage, après avoir fait un désert d’une partie des contrées du Midi, ils ne finissent par s’y établir. Une rencontre eut lieu près de Poitiers entre les rapides cavaliers de l’Afrique et les lourds bataillons des Francs (732) […]. Charles Martel poussa jusqu’en Languedoc, entra dans Nîmes et essaya de brûler les Arènes qu’on avait changées en forteresse. »
Ernest Lavisse, en 1913, dans son manuel pour le cours moyen, 1re et 2e année, a consacré en réalité trente lignes à Charles Martel, à l’invasion arabe et à la bataille de Poitiers. J’en extrais celles-ci :
« La plus puissante des familles franques, dans le pays de Metz, devint célèbre au temps qu’elle avait pour chef Charles, surnommé Martel parce qu’il a écrasé, comme avec un marteau, les Arabes qui avaient envahi la Gaule. En l’année 732, ils étaient arrivés près de Poitiers, quand ils rencontrèrent Charles Martel qui venait au devant d’eux avec une armée. Les Arabes, montés sur de petits chevaux rapides, et habillés de longs manteaux blancs, coururent vers la cavalerie franque. Les Francs, montés sur de grands chevaux du nord, les laissèrent venir et se défendirent avec leurs haches et leurs épées si bien que les Arabes reculèrent. Alors les Francs se mirent en marche. C’était comme une muraille de fer qui s’avançait. Les Arabes se retirèrent dans leur camp, et, pendant la nuit, ils s’enfuirent. Ainsi, Charles Martel a empêché les Arabes de conquérir notre pays. »
Dans son Abrégé de l’histoire du Moyen Age pour le cours de seconde, Victor Duruy parlait déjà, en 1857, de « la grande victoire de Charles Martel sur les infidèles, qui arrêta, entre Tours et Poitiers, le mouvement de l’invasion de l’islamisme vers l’Occident ».
En 1904, dans son manuel pour la classe de 5e, l’historien Charles Seignobos, républicain et protestant, insistait, avant de raconter la bataille de Poitiers, sur « les guerres qu’avait dû faire Charles Martel toute sa vie de tous les côtés, surtout dans le Midi contre les musulmans ».
En 1925, dans son manuel pour la classe de 4e, Arthur Huby, plus tard doyen de l’Inspection générale d’histoire-géographie, insistait aussi sur cet « événement exceptionnel » : « Sa victoire sur les Arabes tira Charles Martel hors de pair. La victoire de Poitiers (octobre 732), qui marqua l’arrêt de l’offensive arabe contre l’Europe, eut un immense retentissement. Charles Martel apparut comme le sauveur du monde chrétien tout entier. »
Sans oublier Jules Isaac (futur militant du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes) qui écrivait à la même époque, dans le fameux Malet-Isaac : « Charles Martel eut la gloire d’arrêter à Poitiers, en 732, une terrible invasion arabe. »
En 1935 enfin, dans leur petit manuel pour le cours élémentaire, 1re année, Mon Premier Livre d’Histoire de France, Léon Brossolette et Marianne Ozouf, père et sœur du héros de la Résistance, ont illustré une page entière d’une image en couleurs sous-titrée « Charles-Martel à Poitiers – Les rois francs, qu’on appelle les rois fainéants, ne savent plus commander leurs armées. Le duc Charles-Martel les commande à leur place. Il bat à Poitiers les rapides cavaliers arabes qui attaquent la Gaule ».
On observera cependant que ne figurent nulle part, dans les actuels programmes d’histoire du primaire et du collège, ni Charles Martel, ni la bataille de Poitiers, tous programmes signés, en 2008, par Xavier Darcos, avec la bénédiction de Nicolas Sarkozy et François Fillon, trois phares de ce qu’on appelle la « droite républicaine ».
Ce qui n’empêche pas Philippe Nemo, dans son excellent manuel d’histoire pour les CE2-CM1-CM2, de préciser pour nos écoliers : « Les Arabes avaient conquis un immense empire qui s’étendait jusqu’en Europe. Ils s’étaient emparés de l’Espagne, et maintenant ils voulaient aussi envahir la France. Charles Martel gagna contre eux la bataille de Poitiers en 732 après J.-C. et il les força à se replier en Espagne. Le prestige acquis par Charles Martel à cette occasion fut très grand. » (La Librairie des Ecoles, 2012, p. 52)."
Bernard Mitjavile
Surtout, on ne devrait pas se cantonner aux historiens français plus idéologues qu’historiens mais lire les historiens anglo-saxons pour qui la bataille de Poitiers fut un événement majeur et fondateur de l’histoire de l’Europe.
Yvon
Charles Martel condamné pour islamophobie ?
jo
Bizarre.
Le projet Rivkin s’intensifie !!!!
Ma scolarité est déjà ancienne et a donc plus de quinze ans d’âge depuis qu’elle est terminée !!!! et je me souviens d’avoir appris cette bataille dans notre Histoire de France ! Mais veut-on encore apprendre réellement aux jeunes d’aujourd’hui scolarisés l’Histoire de la France ???
Quand on voit toute la réécriture propagande qui est diffusée sur les chaînes TNT pour ceux qui s’en contentent. Des élections doivent encore avoir lieu en décembre, donc sont programmés à haute dose de nombreuses émissions sur la seconde guerre notamment. Version réécrite, évidemment ! C’est d’autant plus facile lorsqu’il n’y a pas le son !
Martina
On a l’impression d’être le pot de terre contre le pot de fer, mais il faut se battre. Bravo à tous ceux qui luttent contre le mensonge.
Armel Le Péach
Pas très “Charlie” votre Martel…
Pierre
En résumé, et pour faire court, l’histoire de Charles Martel ayant vaincu les Arabes à la bataille de Poitiers se resumerait donc à un paragraphe de ‘”Histoire de France “, par Jules Michelet, entre 1833 et 1844, suivi, au fil des décennies, que dis-je, de deux siècles, des enseignements des petits manuels d’histoire, ceci allant de celui de la classe du CE1 au niveau extrêmement élevé de celui de la classe de 4ème… Cela me laisse assez perplexe, et je suis désolé, de devoir l’écrire ici, mais comme référence, avec un minimum d’honnêteté intellectuelle, cela ne fait quand même pas grand chose…
claude
Au fait qui pourrait me dire s’il existe une rue ou une école Charles Martel dans cette province ouest de l’UE , qu’on appelle encore la France ?
Car des lieux Lénine , Staline ou Robespierre ça existe !
PK
Je ne vois pas ce qui est choquant à ce que l’histoire de Charles Martel apparaisse tardivement. Le culte de Jeanne d’Arc aussi !
Premièrement, l’extrême-droite n’existe pas dans les années 1880. La droite – la vraie – est catholique et donc implicitement monarchiste.
Deuxièmement, l’étude de l’histoire n’est pas une science exacte et linéaire. Des découvertes récentes peuvent bouleverser un savoir ou dans ce cas, une absence de savoir. Un contexte peut être compris des années plus tard.
Exemple : le traité de la dévotion à la Vierge Marie de Louis Marie de Grignon de Montfort a été découvert – tout à fait par hasard – 150 ans après la mort du saint. On n’en a donc pas parlé avant !
On peut très bien retourner cet argument à tous les détracteurs : les lois mémoricielles et la demande de pardon systématique sont très récentes. Elles n’ont donc – selon les détracteurs de Charles Martel – aucun poids.
Et le pire, c’est qu’en l’occurrence, c’est vrai ;-)
Enfin, on parle d’une histoire très ancienne et donc relativement peu documentée à une époque où les écrits se sont mal conservés. Arguer de mauvaise foi est facile dans ce contexte : mais on peut faire la même chose avec plein d’exemple… L’homme de Cro-Magnon n’a pas existé car on n’a aucun témoignage ;-)
Bref, manipuler l’histoire est facile mais c’est surtout une arme. A double-tranchant. Nos ennemis savent le faire depuis 150 ans avec une persévérance qui forcerait presque l’admiration.
De notre côté, nous avons une batterie d’auteurs qui combattent sans relâche cette désinformation. Mais qui les lit ?
Interrogez-vous : connaissez-vous ces auteurs ? Ces dix dernières années, combien de leurs livres avez-vous acheté ou même lu ?
JRFB
A l’avis de ceux qui mettent en doute l’importance de la bataille de Poitiers on peut aussi opposer les résultats des travaux du professeur Delay, qui montrent un fort taux d’un groupe sanguin courant chez les Arabes, mais rare en France, chez les habitants actuels de la région de Poitiers. L’explication serait que les survivants de l’armée vaincue sont restés dans la région et y ont fait souche, et transmis leur groupe sanguin. Comme les restes des légions romaines vaincues ont fait souche en Roumanie.
alpha
C’est la vérité qui rend libre.
Leur mensonge est donc synonyme d’esclavage.
Faire de l’argent avec l’inculture, et l’ignorance, le mensonge.
Former de futurs esclaves.
Leurs jours sont désormais comptés.
Le mensonge et l’inculture à ce point ne peuvent conduire qu’à la pire des barbaries.
Info65
“Voilà ce que tout le monde sait (cf. la bataille de Poitiers), mais, ce qu’on ignore généralement, c’est que d’après ces annales de Fulde, écrites pour ainsi dire en face des événements, cette grande victoire de Poitiers fut remportée le 13 mai fête de Servatius, et due à l’intervention de ce grand saint. Ce fut la conviction de l’armée franque et de son chef. Aussi Charles Martel se rendit immédiatement à Paris pour y faire célébrer ce qu’on appellerait aujourd’hui un Te Deum solennel, et installer officiellement le culte de son puissant protecteur dans cette grande ville. Ce n’est pas tout encore. Il envoya un de ses lieutenants Willigisus à Maestricht pour voir si le temple élevé à la gloire de Servatius était en bon état de conservation, avec ordre de tout restaurer au besoin et dans la perfection. Cet officier s’acquitta de sa mission avec beaucoup de zèle, et il plaça sur le tombeau du saint un ciborium où l’or et les pierres précieuses brillaient comme un miroir : « Ciborium auro et gemmis instar speculi lucidissimum W. » Tous ces détails ont été racontés dans un très grand nombre de manuscrits du Moyen-Age. Le P. Jésuite qui a rédigé dans les Bollandistes l’article sur Servatius dit qu’il a trouvé en 1668 à Maestricht dans l’église de S. Servais un vieux parchemin donnant la description de cette célèbre bataille de Poitiers.” (…)
Cf. tiré de ce lien :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0003-391x_1903_num_19_3_1181#
Info65
Saint Fris est un soldat du VIIIe siècle ayant participé à la lutte contre les Sarrasins. La tradition en a fait un neveu de Charles Martel et l’a identifié au corps d’un guerrier en armure découvert aux abords de Bassoues, dans un site vite devenu un lieu très fréquenté de pèlerinage et de guérisons. L’église qui y fut construite par la suite a été restaurée plusieurs fois et porte le titre de basilique.
http://nominis.cef.fr/contenus/saint/12386/Saint-Fris.html
ODE
@Pierre: c’est votre argumentation qui est faiblarde!
J’ai le Lavisse d’époque sous les yeux: comparons… 1 page 1/2 consacrée à Charles Martel, dont une petite partie est citée dans l’article qui nous intéresse ici. Sur Charlemagne, à la suite: 3 pages.
Alors? D’après vous, le nombre de pages fait l’importance du sujet? Il me paraît au contraire bien normal qu’un manuel d’histoire sélectionne ses informations. On peut considérer comme importantes toutes celles déjà sélectionnées, et argumenter ensuite sur le nombre de pages.
Max
Ils ont un peu raison.
Le vrai vainqueur fut Eudes de Toulouse en 721. C’est lui qui a levé la première armée française, du Languedoc a la bourgogne en passant par la neustrie. C’est la première grande victoire : 3750 sarrasins morts.
Au moment du siège de Toulouse, Charles Martel avait levé une armée pour faire la guerre contre les saxons.
Ce sont les languedociens qui ont repoussé les sarrasins des deux côtés des Pyrénées
Et qui votent FN aujourd’hui …
Will
Euh, on parle un peu partout de Charles Martel, depuis plus de 15 ans ! Vous n’avez pas cité la petite histoire de France de Jacques Bainville. Il y en a plusieurs pages, me semble-t-il…
Jean
Un journaleux de foot qui ose se dire historien (peut-être une licence en Histoire) s’en était pris à Lorant Deutsch parce qu’il avait mentionné Poitiers. Et il avoue n’avoir pas lu le livre en entier parce qu’il le considère comme réac : https://www.youtube.com/watch?v=PolvTYLO11o
candide
Certes, la bataille de Poitiers (ou celle de Ballan Miré ?), ne fut pas mineure pour l’époque et elle a marqué les historiens depuis des siècles. En revanche j’ai des doutes sur la présence d’arabes à Poitiers en 732! J’avais plutôt le souvenir que la masse des guerriers musulmans était berbère, voire un peu ibérique. Leurs chefs étaient peut-être arabisants ou arabophones, mais les congolais ou les canadiens qui parlent français n’en sont pas pour autant des français, ni des latins, ni des européens.
candide
Autres précisions : la bataille a certainement eu lieu entre Poitiers et Tours, et les chroniques dénomment les adversaires des francs comme “maures” ou “sarrasins”, ou encore “mahométans”.