Lu dans Monde & Vie :
"Christine Boutin, 67 ans, fonctionne à l’intuition, hésitant en permanence entre courage politique et soumission au politiquement correct. Elle rêve désormais de s’émanciper de l’UMP, qui, à la différence de l’attitude adoptée pour le cas de Jean-Louis Borloo, n’essaye pas de la retenir. Elle a quasiment annoncé son intention de se présenter à l’élection présidentielle de 2012, comme elle l’avait fait en 2002 où elle avait obtenu 1,19 % des voix. En 2007, elle avait soutenu Nicolas Sarkozy, qui l’avait récompensé en la nommant au gouvernement comme ministre du Logement, poste où elle fut l’instigatrice du très contestable droit opposable au logement, qui fait le délice de nombre de familles d’immigrés de fraîche date.
Avec deux députés (tous les deux élus dans la Loire), sept conseillers régionaux et cinq conseillers généraux, son Parti Chrétien Démocrate (PCD) est un second couteau de l’actuelle majorité présidentielle, comme le MPF ou le CNIP. Et comme tel, il intéresse assez peu l’Elysée, tout occupé qu’il est a empêcher la renaissance de l’UDF. Pour mieux comprendre qui est politiquement Christine Boutin, il faut se souvenir que, loin de venir de la droite de conviction, elle a commencé son parcours politique au CDS de Jean Lecanuet, c’est-à-dire au centre droit démocrate-chrétien et pro-européen, étiquette qu’elle revendique toujours.
Qui se souvient qu’en janvier 1999, quelques jours avant le vote sur le PACS durant lequel elle devait prononcer le discours fleuve qui la fit entrer sur le devant de la scène politique française, elle était l’une des rares parlementaires à s’opposer à Versailles à la modification constitutionnelle préalable à l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam, rejoignant même les rangs de l’Alliance pour la souveraineté de la France ? Elle avait voté non au référendum sur Maastricht, et fait de même en 2005. Ces élans souverainistes sont bien éloignés de l’admiration que le PCD voue aujourd’hui à la figure de Robert Schuman, père de l’Europe. Idem pour son retournement concernant la prostitution, puisque après avoir réclamé la réouverture des maisons closes, elle milite aujourd’hui pour une très hypothétique abolition de la prostitution. Les hésitations récurrentes de Christine Boutin ne vont pas sans créer des remous au sein de ses propres troupes. Sabine Faivre, Secrétaire nationale « Vie, famille, santé » du Parti Chrétien Démocrate, vient de démissionner de ses fonctions, dénonçant l’« évolution consensuelle » de Christine Boutin et son recentrage. En effet, Jean- Louis Borloo était présent lors du dernier conseil national du PCD, ce qui pourrait augurer d’un rapprochement entre ce dernier parti et la Confédération des centres qui est en train de voir le jour à l’instigation du président du Parti radical. Pourtant, certains centristes (Hervé Morin, président du Nouveau Centre, par exemple) voient d’un mauvais oeil une intégration de Boutin à leur nouvelle UDF : ses positions sociétales effraient ces libéraux, très progressistes en la matière. Pour Christine Boutin, rejoindre la confédération des centres serait, dix ans après son départ de l’UDF, un retour au bercail qui pourrait lui aliéner la frange la plus droitière de ses soutiens et effrayer ses élus soucieux de conserver leurs sièges. Les catholiques du PCD et les radicaux laïcs dans la même structure, ce serait un peu l’union de la carpe et du lapin…"