Communiqué de SOS Chrétiens d’Orient :
Au lendemain de la chute du gouvernement syrien, SOS Chrétiens d’Orient prend acte de l’évolution politique en Syrie.
Après 14 années de guerre, de divisions et de souffrances, alors que 90% des Syriens vivent sous le seuil de pauvreté, que le pays est en ruine, épuisé par ces années de combats et de sanctions internationales, la guerre civile syrienne touche à sa fin. « Nous espérons bientôt pouvoir nous réjouir que la paix apparaisse à l’horizon pour le peuple syrien » ajoute Benjamin Blanchard, directeur général de SOS chrétiens d’Orient.
« Nous espérons que cette transition politique se fasse dans le calme, que la sécurité de tous, et notamment des chrétiens de Syrie, soit assurée par les futures autorités », continue-y-il. « Nous espérons que ce changement de gouvernement ne soit pas synonyme de persécutions, de représailles et de vengeance. Enfin, nous espérons que la reconstruction de la Syrie se fasse dans le respect de toutes ses composantes ».
Présente en Syrie depuis 2015, SOS Chrétiens d’Orient espère que le travail des ONG sera respecté et encouragé. Avec ses volontaires et fort du soutien de ses donateurs, SOS Chrétiens d’Orient entend poursuivre, en lien avec ses partenaires locaux, son travail auprès des chrétiens d’Orient.
Vendredi dernier, l’association avait quitté Alep :
« Vendredi matin à Alep, la vie suivait son cours habituel. Chacun était absorbé par ses activités quotidiennes. Mais, en fin d’après-midi, l’atmosphère a brusquement changé. Nous avons dû fermer le bureau. Une réunion d’urgence, organisée par la Direction des opérations de SOS Chrétiens d’Orient en France, a rassemblé les collaborateurs de l’équipe à Alep. C’est là que nous avons été informés de la gravité de la situation : les terroristes progressaient rapidement dans la campagne environnante, menaçant de faire tomber la ville à tout moment. Nous devions partir au plus vite.
À cet instant, la panique m’a envahie, accompagnée d’une peur viscérale. L’idée qu’Alep ne resterait plus l’Alep que j’avais toujours connue était inconcevable. Quitter nos maisons, nos souvenirs, nos familles et nos amis, partir sans rien emporter… Ce scénario semblait irréel. Quelques heures plus tard, la crainte est devenue réalité : les terroristes avaient pénétré dans nos quartiers. Nous étions confrontés à un dilemme déchirant : fallait-il rester ou fuir ? Incapables de trancher immédiatement, j’ai tout de même préparé un petit sac contenant des objets précieux et des documents importants, prêt à partir à tout moment. La nuit fut interminable. Nous ne pouvions fermer l’œil, scrutant les nouvelles, minute par minute, échangeant sans cesse avec nos proches pour vérifier qu’ils allaient bien. Le lendemain matin, l’incertitude persistait. Depuis la fenêtre, nous observions les rues. Des voitures circulaient, celles des terroristes mêlées à celles de civils, mais sans confrontation apparente. Mon mari a décidé d’aller à son magasin récupérer des papiers essentiels et quelques affaires de valeur. Inquiète pour sa sécurité, je l’ai accompagné. Nous avons pris la voiture et croisé plusieurs véhicules des terroristes sur notre route, mais ils ne nous ont pas interpellés. Nous avons réussi à récupérer ce dont il avait besoin et sommes retournés chez nous.
Le samedi après-midi, nous avons pris la décision difficile de partir. Abandonner toute une vie derrière soi est une épreuve, mais notre sécurité primait sur tout le reste. Ce qui a été le plus douloureux, c’est de laisser ma famille, qui refusait de quitter Alep. Mon mari et moi avons pris la route, accompagnés d’amis dans d’autres voitures, pour nous soutenir mutuellement en cas d’incident. Sur la route menant à l’aéroport d’Alep, nous avons croisé un important convoi des terroristes, environ une centaine de véhicules. Malgré leur présence oppressante, ils ne nous ont pas arrêtés, et nous avons poursuivi notre chemin. À Al-Safira, des habitants distribuaient des repas aux automobilistes. Mais peu après, à Khanaser, la route est devenue un cauchemar : des embouteillages colossaux, suivis d’explosions et de coups de feu. La peur était à son comble. Tandis que certaines voitures faisaient demi-tour, nous avons choisi d’avancer, convaincus que c’était notre seule chance. Après cette traversée éprouvante, nous avons atteint Athriya. La route était saturée, et les véhicules avançaient à pas de tortue. Nous sommes restés bloqués dans cette zone pendant quinze heures, sans accès à des toilettes, de l’eau ou de la nourriture. Ce n’est qu’au point de contrôle d’Athriya que nous avons trouvé un semblant de répit : des habitants distribuaient du carburant gratuitement pour permettre aux voitures de poursuivre leur route. Enfin, nous avons atteint Salamiyah, puis Homs, avant d’arriver à Damas. Le trajet entre Alep et Damas a duré 28 heures. À chaque étape, SOS Chrétiens d’Orient a été à nos côtés, nous soutenant et nous rassurant. À notre arrivée, l’équipe de Damas nous a accueillis avec une immense chaleur, comme si nous rentrions chez nous. Dans ces moments d’extrême détresse, je suis profondément reconnaissante envers SOS Chrétiens d’Orient, qui ne nous a jamais abandonnés. »