Tous les ans, l’université Jiao Tong de Shanghai publie un classement des 500 premières universités mondiales. Le classement 2005 est un nouveau désaveu pour les universités françaises, et plus largement européennes, à l’exception du Royaume-Uni. 35 des 100 premières universités mondiales sont en Europe. 11 sont britanniques, 7 scandinaves, 5 allemandes et 4 françaises – en tête de ces dernières : Paris VI, au 46ème rang mondial.
Tout classement est sujet à contestation : on pourrait reprocher à celui-ci, qui se fonde en particulier sur le nombre d’articles publiés dans les revues scientifiques de référence ou le nombre de prix Nobel, de trop favoriser les sciences "dures" ou les travaux anglophones. On pourrait aussi contester que les critères utilisés portent presque exclusivement sur la recherche : un reproche fait aux grandes universités américaines est justement de trop la privilégier, au détriment de l’enseignement dispensé aux étudiants. Et en France, une grande partie de la recherche est menée hors-université, au CNRS.
Mais on ne peut pas balayer d’un revers de main ce classement, ne serait-ce que parce qu’il a "un immense retentissement sur les élites du monde entier et leur perception du rayonnement de chaque pays" d’après Challenges. Mais ce magazine semble penser que regrouper des universités parisiennes sur un "campus urbain" suffirait à créer "une université exceptionnelle se classant dans les cinq premières mondiales" – ce qui revient à dire qu’il n’y a pas de vrai problème, autre que cosmétique.
The Economist estime au contraire que ce classement traduit un réel décrochage de l’enseignement supérieur européen. Le coupable : le rôle excessif de l’Etat.
Les gouvernements ont forcé les universités à éduquer au rabais d’immenses armées d’étudiants, en les privant des deux libertés dont elles ont besoin pour concourir sur le marché international : le droit de sélectionner leurs étudiants et de payer leurs enseignants au prix du marché.
Pour l’hebdomadaire, cette faillite rend "absurde" l’ambition affichée en 2000 par les dirigeants européens de faire de l’UE "l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde" d’ici 2010. L’UE ne doit pas se demander
… si elle peut dépasser les Etats-Unis comme première économie de la connaissance [knowledge-based] du monde d’ici 2010, mais comment éviter d’être elle-même dépassée par la Chine et d’autres tigres asiatiques.