Analyse d'Antoine de Lacoste pour le Salon beige :
Pendant que les occidentaux montrent leurs muscles et bombardent des sites improbables, les Russes eux, continuent à lutter contre les islamistes. Jeudi 12 avril, la police militaire russe s’est déployée dans Douma après de dures négociations.
L’histoire s’est donc spectaculairement accélérée ; en effet, l’issue inéluctable d’une nouvelle offensive et les manifestations répétées de la population exigeant la reddition du groupe et la fin des combats, ont contraint le groupe Jaich al-Islam et son chef Issam Bouwaïdani à accepter de négocier avec les Russes.
Ces derniers voulaient aller vite afin de parachever la victoire de la Ghouta avant toute frappe franco-américaine. Pour cela, ils ont demandé à l’armée syrienne de ne pas entrer encore dans Douma, afin de ne pas compromettre les négociations. La haine est en effet telle entre les deux adversaires syriens, armée et islamistes, que toute étincelle peut vite dégénérer en reprise des combats.
L’évacuation a commencé dans la nuit de jeudi à vendredi sous le contrôle de la police militaire. Ce n’est pas la première fois que celle-ci est utilisée dans le conflit. A Alep Est, déjà, ce sont ces militaires qui patrouillaient après la reddition et l’évacuation des islamistes vers Idleb. Ce sont en général des Caucasiens, musulmans, dont l’encadrement s’est souvent illustré dans la guerre contre les Tchétchènes. Certains sont d’ailleurs eux-mêmes tchétchènes et sont des soutiens très sûrs de Poutine. En Tchétchénie aussi, il y a plusieurs camps.
L’état-major russe estime que ces hommes sont très utiles pour dialoguer avec la population syrienne et la rassurer alors qu’elle vient de subir de durs combats.
Les islamistes évacués n’ont été, pour une fois, pas dirigés vers Idleb, mais un peu plus à l’Est, à Al Bab. Cette localité avait été reprise à Daesh par l’armée turque il y a quelques mois qui préparait ainsi déjà son occupation du nord de la Syrie. Pourquoi Al Bab et non Idleb comme d’habitude ? C’est une exigence des dirigeants de Jaich al-Islam qui ne tenaient nullement à se retrouver sous la coupe d’Al-Nosra qui règne sur les autres groupes islamistes dans la province d’Idleb.
Les Turcs ont accepté avec empressement : les combattants aguerris qui sont arrivés pourront éventuellement servir de chair à canon en cas de combats contre les Kurdes…
Aujourd’hui le drapeau syrien flotte sur Douma et c’est une victoire de prestige considérable dans toute la Syrie. Evidemment on se perd quelque peu en conjectures sur ce soudain revirement de Jaich al-Islam. Pendant des semaines, ce groupe refuse obstinément toute évacuation. Il s’obstine alors même que tous les autres mouvements se sont rendus et qu’il ne tient qu’un ou deux km2 de territoire. Puis, le 7 avril, c’est l’attaque chimique. Deux jours après, comme si sa mission était accomplie, le groupe reprend les négociations et accepte l’évacuation sans la moindre difficulté.
Il y a tout de même de quoi se poser des questions…