Alors que nos gauchistes réclament le droit d’éliminer les personnes âgées ou souffrantes, le pape vient de publier son message à l’occasion de la journée mondiale du malade, dans lequel il développe une réflexion autour de la souffrance, que notre société athée veut éliminer en supprimant le malade :
[…] « L’espérance ne déçoit pas » (Rm 5, 5), elle nous rend même forts dans les épreuves.
Cette expression est consolante mais elle peut soulever des questions, en particulier chez les personnes qui souffrent. Par exemple, comment rester forts lorsque nous sommes touchés dans notre chair par des maladies graves, invalidantes, qui nécessitent peut-être des soins dont les coûts sont au-dessus de nos moyens ? Comment le rester quand, en plus de notre propre souffrance, nous voyons celle de ceux qui nous aiment et qui, tout en étant proches de nous, se sentent impuissants à nous aider ? Nous ressentons dans ces circonstances le besoin d’un soutien plus grand que nous : nous avons besoin du secours de Dieu, de sa grâce, de sa Providence, de cette force qu’est le don de son Esprit (cf. Catéchisme de l’Église catholique, 1808).
Arrêtons-nous donc un instant pour réfléchir sur la présence de Dieu auprès de ceux qui souffrent, en particulier sous trois aspects qui la caractérisent : la rencontre, le don et le partage.
1. La rencontre. Lorsque Jésus envoie les soixante-douze disciples en mission (cf. Lc 10, 1-9), il les exhorte à dire aux malades : « Le Royaume de Dieu est proche pour vous » (v. 9). Il leur demande, en d’autres termes, de les aider à saisir dans l’infirmité, même si elle est douloureuse et difficile à comprendre, une occasion de rencontrer le Seigneur. Dans la maladie, en effet, si d’une part nous ressentons toute notre fragilité de créatures – physique, psychologique et spirituelle -, nous faisons d’autre part l’expérience de la proximité et de la compassion de Dieu qui, en Jésus, a partagé notre souffrance. Il ne nous abandonne pas et nous surprend souvent par le don d’une ténacité que nous n’aurions jamais cru avoir et que nous n’aurions jamais trouvée par nous-mêmes.
La maladie devient alors l’occasion d’une rencontre qui nous change, la découverte d’un rocher inébranlable auquel nous pouvons nous accrocher pour affronter les tempêtes de la vie. C’est une expérience qui nous rend plus forts même dans le sacrifice parce que nous sommes davantage conscients de ne pas être seuls. C’est pourquoi l’on dit que la douleur porte toujours en elle un mystère de salut : elle nous fait expérimenter la proche et réelle consolation qui vient de Dieu, au point de « connaître la plénitude de l’Évangile avec toutes ses promesses et sa vie » (Saint Jean-Paul II, Discours aux jeunes, Nouvelle-Orléans, 12 septembre 1987).
2. Et cela nous amène à la deuxième piste de réflexion : le don. Jamais comme dans la souffrance nous ne nous rendons davantage compte que toute espérance vient du Seigneur, et qu’elle est avant tout un don à accueillir et à cultiver en restant, selon une belle expression de Madeleine Delbrêl, « fidèles à la fidélité de Dieu » (Cf. Nous autres, gens des rues, Livre de vie, 1966).
De plus, ce n’est que dans la résurrection du Christ que notre destin tout entier trouve sa place, dans l’horizon infini de l’éternité. Seule sa Pâque nous donne la certitude que rien, « ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les principautés, ni le présent, ni l’avenir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra jamais nous séparer de l’amour de Dieu » (Rm 8, 38-39). Toutes les sources de lumière qui permettent de surmonter les épreuves et les obstacles de la vie naissent de cette “grande espérance” (cf. Benoît XVI, Lett. enc. Spe salvi, 27.31). De plus, le Ressuscité marche avec nous, il se fait notre compagnon de route, comme pour les disciples d’Emmaüs (cf. Lc 24, 13-53). Comme eux, nous pouvons partager avec Lui notre désarroi, nos inquiétudes et nos déceptions, nous pouvons écouter sa Parole qui éclaire et enflamme nos cœurs. Nous pouvons le reconnaître présent dans la fraction du Pain en saisissant, dans le fait qu’il est avec nous même dans les limites du présent, cet “au- delà” qui nous redonne courage et confiance en se faisant proche.
3. Nous en arrivons ainsi au troisième aspect, celui du partage. Les lieux où l’on souffre sont souvent des lieux de partage, où l’on s’enrichit mutuellement. Combien de fois on apprend à espérer au chevet d’un malade ! Combien de fois on apprend à croire en se tenant près de ceux qui souffrent ! Combien de fois on découvre l’amour en se penchant sur ceux qui sont dans le besoin ! En d’autres termes, on se découvre être des “anges” de l’espérance, des messagers de Dieu les uns pour les autres, tous ensemble : malades, médecins, infirmières, membres de la famille, amis, prêtres, religieux et religieuses ; là où l’on se trouve : dans les familles, les cliniques, les centres de soins, les hôpitaux et les dispensaires.
Et il est important de savoir saisir la beauté et la portée de ces rencontres de grâce et d’apprendre à les inscrire dans notre âme pour ne pas les oublier : garder dans le cœur le sourire bienveillant d’un soignant, le regard reconnaissant et confiant d’un patient, le visage compréhensif et attentif d’un médecin ou d’un bénévole, celui, plein d’attente et d’inquiétude, d’un conjoint, d’un enfant, d’un petit-enfant, d’un ami très cher. Ce sont autant de lumières à garder précieusement qui, même dans l’obscurité de l’épreuve, non seulement donnent de la force mais enseignent le vrai goût de la vie, dans l’amour et la proximité (cf. Lc 10, 25-37).
Chers malades, chers frères et sœurs qui portez assistance à ceux qui souffrent, vous avez plus que jamais en ce Jubilé un rôle particulier à jouer. Votre marche avec les autres est un signe pour chacun, « un hymne à la dignité humaine, un chant d’espérance » (Bulle Spes non confundit, n. 11) dont la voix va bien au-delà des chambres et des lits des établissements de soins où vous êtes. Vous stimulez et encouragez dans la charité « l’agir harmonieux de toute la société » (ibid.), dans une symphonie parfois difficile à réaliser mais très douce et forte, précisément pour cette raison, capable d’apporter la lumière et la chaleur là où elle est le plus nécessaire. […]