Extraits de la dernière lettre de Paix Liturgique, consacrée à l’incendie de la cathédrale de Nantes :
[…] Nantes a déjà effectivement connu l’incendie de la cathédrale le 28 janvier 1972 – un choc pour de nombreux nantais qui se rappelaient, ce matin, de leurs souvenirs de cet incendie, certains habitent toujours au pied de la Cathédrale 48 ans après. Mais surtout et aussi, il y a eu l’incendie des voûtes de Saint-Donatien en juin 2015, une basilique presque aussi monumentale que la Cathédrale, dont la restauration prend fin l’année prochaine ; et comme la cathédrale, les circonstances étaient similaires quoique d’origines différentes : un chalumeau, lors de travaux de restauration sur les toits, qui a créé un point chaud où l’incendie a couvé avant d’éclater, fulgurant et ravageur, dans les charpentes. Dans les deux cas, les tours et les façades ont pu être sauvés.
Il y a-t-il eu récemment des tentatives d’incendies ou de dégradation des églises nantaises ?
Oui, et en nombre, cela aurait du alerter les pouvoirs publics. Le 13 janvier 2016, une paroissienne a éteint un feu de prospectus sur une table à l’église Saint-Nicolas, au cœur du centre-ville nantais ; peu avant, elle avait vu deux personnes s’affairer autour de la table où a eu lieu le départ de feu.
En 2010, des appels à brûler les églises Saint-Donatien et saint-Clément, à l’est de Nantes, avaient été tagués; ils étaient d’inspiration nettement anarchisante. En juin 2013, des tags anarchistes et obscènes avaient été tracés dans la cathédrale – faut-il être obscur d’esprit pour s’attaquer à la cathédrale la plus lumineuse de France ? Et déjà, la porte de l’escalier d’accès de l’orgue, qui donne accès à la tribune et aux galeries hautes, forcée.
Située au cœur du quartier piétonnier, l’église Sainte-Croix, sommée de l’ancien beffroi de la ville située jadis sur la prison du Bouffay, est en première ligne. Le 10 janvier 2017, en pleine Adoration, un africain portant sur lui le signe ACAB (all cops are bastards c’est-à-dire tous les flics sont des batards), un signe de ralliement anarchiste, entrait dans l’église, urinait dedans, puis se répandait en injures contre les policiers et la France avant d’être viré manu militari par les fidèles. Le 5 octobre 2017, en pleine messe, un individu a mis en joue le prêtre avec un pistolet, avant d’être maîtrisé par les fidèles et remis aux policiers. Depuis, il y a un vigile dans l’église Sainte-Croix, et pendant le confinement, c’était la seule église du centre-ville à être tout le temps fermée, alors que les autres avaient été maintenues ouvertes même s’il n’y avait plus de messes.
Comment les autorités ont-elles réagi par exemple après l’incendie de Saint-Donatien ?
L’église a été rapidement fermée au culte, la sacristie nord, sur laquelle des débris de toits étaient tombés, interdite à tous, même aux curés de la paroisse… et personne n’a bravé l’interdit pour au moins mettre à l’abri les Saintes Espèces et l’orfévrerie religieuse. Et pendant de longs mois, rien n’a bougé. Le 15 décembre 2015, je suis entré dans l’église Saint-Donatien par une petite porte du côté du cimetière – elle est toujours entourée par son cimetière, et au milieu une chapelle, Saint-Etienne, dont deux des murs datent du VIe siècle, c’est le plus ancien édifice religieux de Nantes encore debout… qui sert de remise pour le service des espaces verts de la Ville. C’est dire…
De là, j’ai visité la basilique de la crypte aux voûtes : les œuvres d’art étaient toujours dans les chapelles et sur les murs, à l’eau et à l’air – les voûtes n’avaient même pas été couvertes. Les reliques étaient dans la crypte, accessibles à tout un chacun – même si on n’a pas la Foi, c’est quand même un pan important de l’histoire de Nantes, et qui date de la fin du IIIe ou du début du IVe siècle en plus [295 ou 304 selon les sources], c’est important de s’assurer de leur conservation… rien n’avait été fait. Je suis monté jusqu’aux toits, où il y avait encore les débris de la voûte, comme au lendemain de l’incendie. Dans la nef, les chaises baignaient dans la flaque d’eau de pluie et d’eau déversée par les pompiers pour éteindre les voûtes.
Cela en dit long sur le degré de « jm’enfoutisme » des autorités, tant de la mairie que de l’évêché. Quand je suis rentré – je suis parti par l’entrée principale du chantier pour bien marquer le coup, après avoir fait exprès de me faire voir du chef de chantier – j’ai appelé mairie et évêché pour dire que c’est Noël, et qu’ils ont quinze jours pour mettre reliques et orfèvrerie à l’abri, sécuriser les accès du chantier, ranger chaises et œuvres d’art… bref, faire le nécessaire. Sinon j’allais sortir le canon et faire connaître cette honte tant dans la presse locale que nationale. Ils ont fait le nécessaire et début janvier, ils posaient un énorme parapluie pour protéger les voûtes, la restauration commençait. Depuis, il y a une vraie clôture tout le tour du chantier, des alarmes silencieuses, de la vidéo-protection… c’est nettement mieux.
Est-ce que les autres églises de Nantes sont sécurisées ?
A l’automne 2019, Breizh Info faisait un point sur la facilité d’accès aux parties hautes de plusieurs éminentes églises nantaises. A Saint-Clément, personne ne referme l’accès pendant le triduum de Pâques. A Saint-Nicolas, l’accès à l’orgue reste ouvert pendant les messes, et la serrure de l’escalier du clocher est en applique, un tournevis suffit pour dévisser les deux vis de la gâche s’offrir un Voyage à Nantes… dans les hauteurs. A Sainte-Thérèse, pendant le chantier, la porte d’accès au clocher et à la chaufferie est restée ouverte…
On pourrait ajouter à cela qu’un bénévole de la Cathédrale samedi matin disait que les accès n’étaient pas sécurisés, que la sortie de secours nord donnait sur un endroit dépourvu de vidéo-protection, qu’il n’y avait ni fouille ni vigile pour accèder à la Cathédrale et donc qu’on pouvait y rentrer n’importe quoi.
Lors du chantier de Notre-Dame de Bon Port, il n’y a eu de réels efforts de sécurité faits après que des vandales ont sorti des armoires et brisé les croix de procession de l’église, vidé les tiroirs du grenier de la sacristie et volé des ornements, détruit des missels grégoriens. L’une des portes d’accès à l’église est restée ouverte des nuits durant, et les codes des cadenas de l’entrée officielle du chantier ainsi que de la porte principale étaient facilement disponibles : ils étaient au dos du bulletin de chantier destiné aux divers intervenants qu’on pouvait trouver, abandonné sur les tables, à l’entrée de l’église…
Les priorités de la ville de Nantes semblent définitivement ne pas être dans la sauvegarde du patrimoine ?
Anne François de Bretagne : Pas vraiment, non. En revanche il y a des millions d’euros d’argent public pour faire un arbre mécanique, sans aucun appel d’offres et dont la seule fonction, pour l’heure, est d’avoir fait monter la valeur des appartements à Chantenay… où habite justement Mme le maire. Il y a aussi de l’argent pour installer une vulve qui pisse place Royale cet été, sur une fontaine magnifique rescapée des bombardements, donc haïe par la gauche qui passe son temps à l’habiller de banderoles hideuses.
Et il y a aussi de l’argent et de la volonté politique pour faire installer des centaines de statues d’un goût artistique douteux sur cette même place et les faire surveiller par des vigiles car il y a eu du vandalisme… là, la mairie de Nantes a la volonté de sécuriser le patrimoine. Dommage que ça ne concerne pas le patrimoine bâti historique – il attire pourtant des milliers de touristes chaque année, en étant très peu mis en avant par la mairie de Nantes qui n’en a que pour l’art contemporain, le Voyage à Nantes, Estuaire (une biennale de Nantes à Saint-Nazaire), les machines de l’Ile (des automates géants qui ont coûté des millions au contribuable), alors que le château des Ducs de Bretagne, la Cathédrale qui a été construite comme l’expression de l’indépendance de la Bretagne, le tombeau des ducs de Bretagne à la Cathédrale et de manière générale, tout ce qui relève du patrimoine breton et ne coûte presque rien, ou qui ne permet pas de mettre des millions publics dans les poches de privés, est très peu mis en avant dans la communication de la ville, et plutôt peu voire mal sécurisé. La preuve…
Nombreux étaient les nantais qui le remarquaient hier matin devant notre cathédrale fumante… Johanna Rolland a été réélue maire par à peine un nantais sur cinq, mais les quatre autres ne sont pas dupes. La responsabilité de la municipalité socialiste devant la dégradation de notre patrimoine est écrasante.
Un bénévole de la cathédrale, d’origine rwandaise, a été placé en garde à vue ce samedi soir dans le cadre de l’enquête sur l’incendie. Avez vous des précisions sur cet aspect du dossier ?
Il s’agit en effet d’un bénévole rwandais catholique de 39 ans, en situation irrégulière – il faisait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français – , inconnu des services de police ; il était logé, nourri et suivi par le diocèse. SA GARDE À VUE A ÉTÉ LEVÉE CE 19 JUILLET À 21H.
Décrit comme “serviable” mais “taiseux” par des cadres de la paroisse, il servait la messe, mais aussi été chargé depuis plusieurs années de fermer la cathédrale et l’avait d’ailleurs fait ce vendredi soir – on notera d’ailleurs une contradiction entre le curé qui a admis dans les médias qu’il avait les clés et l’administrateur du diocèse qui dit le contraire ce dimanche matin. Il tarde que le diocèse de Nantes ait enfin un évêque à sa tête pour qu’on sache qui est responsable de quoi et qui a les clés de quoi.
A ce jour, même si sa garde à vue a été prolongée ce dimanche, il n’est inculpé de rien et demeure présumé innocent. Cependant il s’avère que son titre de séjour n’a pas été renouvelé, qu’il devait quitter le territoire français et la préfecture aurait refusé plusieurs de ses demandes de régularisation. Il s’en serait plaint avec véhémence et aurait écrit à plusieurs responsables du diocèse pour attirer leur attention sur sa situation, sans recevoir de réponse.
Le diocèse de Nantes a déjà montré à plusieurs reprises qu’il préférait aider les pauvres venus de loin plutôt que ceux d’ici, notamment en utilisant le denier du culte pour payer l’électricité aux squatteurs clandestins ; cependant il y avait dans sa solidarité affichée une certaine hypocrisie puisque lorsque des migrants ont squatté des mois durant un gymnase insalubre qui appartenait au diocèse, rien, absolument rien n’a été entrepris par le diocèse qui dispose pourtant de locaux vides pour améliorer leurs conditions de vie – ce sont des collectifs d’extrême gauche qui ont exercé la solidarité et l’accueil dont parlait Mgr James sans jamais passer à l’acte. Même s’il s’agit de concurrents historiques, j’ai une pensée émue pour les bordelais qui ont récupéré notre Archevêque de Dechristianisation Massive…
On peut cependant se demander comment se fait il qu’on donne les clés de la cathédrale – monument stratégique s’il en est à une personne dont les demandes de régularisation ont été refusées à plusieurs reprises par la préfecture, est ce que les monuments historiques qui gèrent la cathédrale étaient au courant, pourquoi la préfecture avait refusé mordicus de le régulariser et combien de clés d’églises nantaises ont encore été confiées ainsi à des clandestins plutôt qu’à des riverains ou des membres d’associations de protection du patrimoine local ?
On peut aussi se demander pourquoi l’un des diocèses qui compte encore parmi les plus riches de France se voit obligé de recourir au travail dissimulé en exploitant le travail bénévole d’un migrant catholique africain, à rebours du discours anti-colonial régulièrement seriné aux fidèles. Un restaurateur ou un paysan qui ferait travailler gratuitement quelqu’un qu’il logeait et nourrirait se ferait redresser par l’URSSAF, mais le diocèse bénéficie d’une curieuse mansuétude… Ou pourquoi les responsables d’un diocèse qui prêchent charité et ouverture à l’Autre sont incapables de prêter main forte à un de leur bénévoles pour l’aider dans ses démarches ou tout au moins lui répondre pour parer à son angoisse et ses inquiétudes qui sont compréhensibles et qui n’ont pas trouvé de réponse…