En 1897, à Paris. Le jeune Edmond Rostand n’a rien écrit depuis deux ans lorsqu’il propose un rôle au célèbre Constant Coquelin. Le seul problème : la pièce n’est pas écrite, il n’a que le titre : Cyrano de Bergerac. Entre les histoires d’amour de son meilleur ami comédien, les caprices des actrices, la jalousie de sa femme, le manque d’enthousiasme de son entourage, Edmond se met à écrire cette pièce à laquelle personne ne croit…
Avec : Thomas Solivérès (Edmond Rostand), Alexis Michalik (Georges Feydeau), Clémentine Célarié (Sarah Bernhardt), Olivier Gourmet (Constant Coquelin), Mathilde Seigner (Maria Legault), Benjamin Bellecour (Georges Courteline), Nicolas Briançon (Jules Claretie), Lucie Boujenah (Jeanne d’Alcie), Igor Gotesman (Jean Coquelin), Tom Leeb (Leo Volny), Simon Abkarian (Ange Fleury), Marc Andréoni (Marcel Fleury), Jeanne Arènes (Jacqueline), Alice de Lencquesaing (Rosemonde Gérard), Jean-Michel Martial (Monsieur Honoré), Dominique Pinon (Lucien), Blandine Bellavoir (Suzon), Guillaume Bouchède (Le Bret), Hélène Babu (Mère Rose), Antoine Duléry (l’arrogant), Olivier Lejeune (le vieux cabot), Lionel Abelanski (l’huissier), Bernard Blancan (le client raciste dans le café Honoré), Sophie de Furst (la collègue de Jeanne), Marc Citti (le réceptionniste de l’hôtel), Dominique Besnehard (le Directeur du théâtre de la Renaissance). Scénario adapté de la pièce de théâtre « Edmond » d’Alexis Michalik. Directeur de la photographie : Giovanni Fiore Coltellacci. Musique : Romain Trouillet.
Récompenses : Salamandre d’or, prix du public, prix des lycéens, prix du Jury des jeunes au Festival du film de Sarlat (2018).
Un fol hommage au théâtre… Le 28 décembre 1897, lorsque Cyrano de Bergerac, 7èmepièce de théâtre d’Edmond Rostand est créé au théâtre de la Porte Saint-Martin, le jeune dramaturge n’a que 29 ans. Après 5 actes, une cinquantaine de personnages passés sur scène, 1 600 alexandrins, sa pièce est ovationnée par pas moins de 40 rappels, 20 minutes d’applaudissements ininterrompus. On peut comprendre alors qu’Alexis Michalik, auteur, metteur en scène et comédien de théâtre, ait choisi cette pièce et cet auteur pour d’abord créer une pièce en hommage au théâtre, « Edmond », couronnée par cinq Molières, puis réaliser son premier long métrage en adaptant sa propre pièce de théâtre.
Très adroitement, après une mise en situation rapide (le temps du générique) et humoristique sur les circonstances et le climat de l’époque, le cinéaste entraine sans tarder le spectateur dans une aventure virevoltante qui décrit les nombreuses péripéties totalement romancées qui émaillent l’écriture et la création de la pièce Cyrano de Bergerac. Le résultat est une déclaration d’amour au théâtre et plus spécialement au théâtre français, plus largement aussi au monde du spectacle et à tout ce qui se passe derrière le rideau et en ville… Cette déclaration endosse tout l’esprit épique, romantique et humoristique d’Edmond Rostand en faisant vivre par les personnages les mêmes situations, les mêmes sentiments (ou très approchants) que ceux attribués aux personnages de la pièce en création dans un aller et retour permanent entre la création théâtrale et la vie réelle. Mais une vie réelle bien arrangée par rapport aux conditions dans lesquels Edmond Rostand a réellement écrit sa pièces même si celle-ci ont sans doute été un peu angoissantes.
Ce jeu qui consiste à imaginer ces péripéties qui ont émaillés l’écriture et le montage de Cyrano de Bergerac et qui ont permis à l’auteur de trouver l’inspiration, ses personnages et l’intrigue de sa pièce, fait vite penser au Molière(2007) de Laurent Tirard dans lequel le cinéaste inventait déjà des aventures à l’homme de théâtre disparu de la circulation pendant plusieurs années durant lesquelles il rencontrera tous les personnages de ses futures pièces. On retrouve ici ce même jeu et plaisir culturels. La mise en scène est peut-être un peu moins aboutie que celle de Laurent Tirard mais ce dernier, lorsqu’il réalise son Molièren’en est pas à son premier essai comme Alexis Michalik.
Pour autant, la maitrise d’Alexis Michalik est réelle même si le style est parfois convenu. Il ne manque pas non plus de quelques belles fulgurances comme celle d’un travelling montant lors de la répétition sur le plateau de la scène du balcon qui provoque un aller et retour instantané entre la fiction théâtrale et la réalité. Mieux encore, et pour le coup assez audacieuse, sans doute conçue comme un hommage au Cyrano de Bergerac (1990), un des chefs d’œuvre de Jean-Paul Rappeneau, la séquence finale du couvent qui débute dans un décor réel de cloître en extérieur pour basculer adroitement dans le décor de la scène du théâtre. En sus des alexandrins d’Edmond Rostand, tout ceci est émaillé de bons mots et de répliques élégantes et romantiques (il y en a trop pour en citer un seul) ou humoristiques (la meilleure ne peut être comprise que par les gourmands : « Monsieur Honoré est un saint… »), qui sont déclamées par une troupe de comédiens qui prennent à leur jeu tant de plaisir que celui-ci est vite transmis au spectateur. De surcroît, Il n’y a pas une seule vulgarité alors que les pièges étaient dressés avec les quelques scènes de marivaudages et celles de la maison close « Aux belles poules ». Tout est réussi dans cette comédie romantique à tiroirs. C’est à la fois vivant, drôle, sentimental, romantique, triste, émouvant, écrit, intelligent. Bref, c’est français ! 5/5.
Bruno de Seguins Pazzis
Denys Perrin
“C’est à la fois vivant, drôle, sentimental, romantique, triste, émouvant, écrit, intelligent. Bref, c’est français !”
Lancer de fleurs à soi-même bien franco-français.
Çà me rappelle bizarrement les commentaires d’un journaliste sportif lors des jeux olympiques de Sapporo, où l’équipe française avait fait un flop magistral (alors que les Suisses avaient raflé pas mal de médailles) – je cite de mémoire :” la neige était mauvaise, molle, traitresse. En un mot c’était une neige japonaise, ce n’était pas une neige française”
:o)