D’Aurelio Porfiri, éditeur et écrivain catholique italien, pour le Salon beige:
Je crois qu’un nœud crucial pour comprendre ces élections américaines est celui de la politique étrangère. Les États-Unis ont exercé un leadership mondial, surtout depuis la Seconde Guerre mondiale. Cela peut plaire ou non, mais c’est une réalité. Seul celui qui ne veut pas faire preuve de bon sens peut nier qu’il y a toujours eu des pays, des nations et des empires qui ont exercé une prédominance sur d’autres.
Si nous écoutons ce que disent de nombreux observateurs, ce leadership des États-Unis est maintenant en profonde crise, et les dernières années nous ont bien dépeint ce nouveau scénario. Nous avons deux guerres importantes que les États-Unis peinent à contrôler. Nous avons des pays comme la Russie et la Chine qui avancent des prétentions qui, de leur point de vue, ne sont pas entièrement tirées par les cheveux, et nous avons des pays qui montrent un visage menaçant, comme l’Iran et la Corée du Nord. Face à ce scénario, quel est le président préférable ?
Car nous ne pouvons pas oublier que la crise des États-Unis n’est pas seulement externe, mais surtout interne, un pays frappé par des idéologies comme le wokisme, le politiquement correct, la cancel culture, la dictature des minorités, qui le maintiennent psychologiquement occupé à lutter contre ses propres culpabilités. En somme, il semble que nous soyons en présence d’un pays qui s’est enlisé en lui-même.
Kamala Harris est en quelque sorte la représentante de ces idées progressistes, et beaucoup doutent qu’elle ait l’expérience et la capacité de faire face à des temps si difficiles et dangereux. D’un autre côté, Donald Trump est Donald Trump, une écharde folle. Cependant, certains croient que, finalement, cette “folie” pourrait être utile lorsqu’il s’agit de négocier avec des pays comme la Chine et la Russie, qui se passent volontiers de toutes les idéologies progressistes mentionnées ci-dessus (pour leur bonheur). Malheureusement, le concept exprimé dans l’Antiquité semble exact : si vis pacem, para bellum. Otto von Bismarck aurait dit : “Dans les conflits européens, pour lesquels il n’y a pas de tribunal compétent, le droit ne s’impose qu’avec des baïonnettes.“
L’ascension de la Chine et une invasion imminente de Taïwan nécessitent un leadership fort de la part des États-Unis. Avec la Chine, il faut négocier en montrant sa force; là-bas, ils n’apprécient pas les signes de faiblesse. Kevin Rudd, ancien Premier ministre de l’Australie, dans un texte publié dans le magazine Aspenia, déclarait :
“Projetant son profond réalisme stratégique sur les États-Unis, Pékin a conclu que les Américains se tiendraient à l’écart d’une guerre dont ils ne seraient pas sûrs de sortir vainqueurs, afin de ne pas compromettre irrémédiablement la puissance, le prestige et la stature mondiale de leur pays. Mais la Chine n’inclut pas dans son calcul l’éventualité opposée : que renoncer à se battre pour une démocratie qu’elle a soutenue depuis la Seconde Guerre mondiale pourrait s’avérer catastrophique pour Washington. Surtout en termes de crédibilité aux yeux des alliés asiatiques, qui pourraient conclure que la garantie de sécurité américaine sur laquelle ils comptent pleinement est écrite dans l’eau et qu’il convient donc de négocier avec Pékin.”
Il convient également de dire que Kevin Rudd est un profond connaisseur de la culture chinoise et qu’il maîtrise très bien le mandarin. En somme, afficher de la force est malheureusement la voie à suivre.
Nous pourrions tenir le même discours à propos de la Russie qui, avec la guerre en Ukraine, montre ses muscles et qui, sans un containment stratégique, pourrait décider de ne pas s’arrêter à cette “opération spéciale” et en vouloir d’autres.
Il faut dire ensuite qu’en réalité, l’idée de tout voir en noir et blanc, très américaine, ne s’applique pas ici, et en fait, il y a beaucoup de choses à apprendre tant en Chine qu’en Russie que l’Amérique, affaiblie par ses obsessions idéologiques, devrait comprendre. Malheureusement, ces éléments qui retiennent les États-Unis dans leurs préoccupations sont trop forts.
Sur un plan différent, deux États comme l’Iran et la Corée du Nord représentent une menace, qu’il convient de prendre pour ce qu’elle est et d’affronter de front. Il est inutile de penser qu’il faut démocratiser le monde entier, ce n’est pas praticable et ce n’est même pas juste. Cette obsession américaine de conformer tous les autres à sa propre image et ressemblance est l’un des péchés originels de la nation et, au final, son fardeau.
Face à tout cela, quel président sera le plus apte à relever ce défi ? Je ne sais pas si ce sera Trump, mais je suis assez sûr que ce ne sera pas Harris. Et j’espère que les électeurs américains sauront faire sens d’une décision qui, plus que jamais en ce moment, est décisive.
Biem
Dans un cas comme dans l’autre, l’ambition militaire est en réalité limitée.
La Chine veut reprendre le contrôle de Taiwan, province sécessionniste, a repris le contrôle du Tibet, traditionnelle zone d’influence, mais n’affiche aucune ambition autre que le contrôle maritime de la mer de Chine. Prétendre que son ambition va la pousser à conquérir le Viet-Nam, la Corée ou le Japon, c’est vouloir faire peur en agitant des chiffons rouge : ces pays ne sont pas de culture chinoise, et le code génétique chinois est de s’étendre par le commerce, pas par les armes.
Pour la Russie, même chose: la Russie a réagit contre l’extension de l’OTAN vers l’Ukraine, susceptible d’un inacceptable transfert de Sébastopol à la domination US, en soutenant l’indépendance puis l’annexion de la Crimée. Puis la Russie a réagit contre le génocide programmé des russophones d’Ukraine, et la violation délibérée par l’Occident des accords de Kiev, en soutenant l’indépendance puis en acceptant le rattachement des provinces martyrisées. Ses ambitions ne sont plus de répandre un modèle communiste, le monde est en retard d’une guerre. La Russie éternelle a achevé sa poussée vers les mers chaudes à Sébastopol, ne cherche plus à pousser “le grand jeu” vers l’Afghanistan pour se prémunir des steppes asiatiques au risque d’incorporer des troubles islamistes – elle a réglé ses comptes avec les terroristes tchétchènes.
Le jour où les USA cesseront une politique violente et hégémonique, on aura peut-être la paix dans un monde multi-polaire (dominé par les BRICS?)
Montalte
Il y a des minorités russes dans les pays baltes qui peuvent justifier le même type d’intervention qu’en Ukraine. Et vous feriez mieux d’employer le terme “génocide” avec prudence, on a suffisamment d’hystériques islamistes pro-Hamas qui en abusent. Un “génocide”, en droit international, cela répond à des critères clairs qui ne sont pas du tout réunis ici.
Biem
L’annihilation voulue d’une population en raison de sa culture et de sa langue, c’est quoi sinon un génocide? La guerre du Dombass (voir Wikipédia) a commencé en 2014, et a perduré malgré les accords de Minsk (pas Kiev, désolé du lapsus calami). Quel pays libre et démocratique bombarde sa propre population? Interdit la pratique de sa langue maternelle sous prétexte qu’elle est russe? Brûle les livres en russe? Interdit leur religion orthodoxe? Sans parler des nombreux crimes de guerre une fois que la Russie s’est mise dans la bataille, sans compter la mise en prison des députés opposants et l’interdiction des partis d’opposition, sans compter la censure des médias, …
On se demande vraiment pourquoi l’OTAN et les états vassaux des USA soutiennent un régime aussi pourri, en prétendant sans vergogne le faire au nom de la liberté et des droits de l’Homme. De qui se moque-t-on?
S’il y a des minorités russes dans les pays Baltes qui peuvent justifier le même type d’intervention qu’en Ukraine, où sont les protestations indignée de l’UE par rapport aux droits des minorités, puisqu’ils en font partie? Ça prouve bien qu’il n’y a rien du genre. Ah, si, pardon, on expulse les russophones et on y interdit la religion orthodoxe sous prétexte qu’elle est sous l’égide de Moscou (?) Je suis sûr que la protestation de l’UE et la remise au pas ne va pas tarder, comme pour la Hongrie. Ou pas?
Montalte
Article plus que confus. Alors, “un nœud crucial pour comprendre ces élections américaines est celui de la politique étrangère” ou “la crise des États-Unis… est… surtout interne, un pays frappé par des idéologies comme le wokisme” ? “Deux États comme l’Iran et la Corée du Nord représentent une menace, qu’il convient de prendre pour ce qu’elle est et d’affronter de front” ou “Il est inutile de penser qu’il faut démocratiser le monde entier, ce n’est pas praticable et ce n’est même pas juste.” ? Ils devraient “affronter de front” l’Iran et la Corée du Nord pour installer une nouvelle dictature, c’est ça l’idée ? Bref, il dit tout et le contraire de tout et n’apporte rien.
Adalbert
C’est peut-être aussi une question de traduction, il faudrait voir le texte italien initial. Pour le reste, plus encore que d'”experts” au temps du COVID, nous sommes envahis de “géopoliticiens” de tout poil qui nous assènent des vérités définitives quand le monde est si complexe et mouvant. Je n’aime pas Zelinski et souhaite une négociation en Ukraine, ce que l’élection de Trump permettrait, mais quand je vois des personnes de la droite, conservatrice ou nationale, soutenir les vieux potentats post-communistes d’Asie, voilà qui est plutôt pathétique.