Lu sur le blog de Jeanne Smits :
"On le sait : la plupart des gouvernements de « droite » succédant à des gouvernements de gauche s'accommodent du statu quo et laissent en place les mauvaises lois votées en leur absence. Mais l'une des claires raisons de l'élection de Rajoy, du Partido Popular, aura été le refus de cette décadence. Mariano Rajoy aura-t-il le cran de faire ce pour quoi on l'a choisi ? Dès dimanche soir, rue Génova à Madrid, où Rajoy tenait son discours « historique » de victoire au balcon du PP devant une foule brandissant des drapeaux et chantant l'unité espagnole, on a pu entendre (mais la grosse presse espagnole en a peu parlé) un groupe de jeunes criant haut et fort : « ¡ Quita el aborto ! » « Arrête l'avortement ». D'un air un peu ennuyé, Mariano Rajoy s'est interrompu, avant de dire, lapidaire, « Bueno ». Et de reparler de la crise. Mais enfin voilà, les Espagnols n'auront pas tardé à lui rappeler pourquoi il était là."
Xavier Mirabel écrit, de son côté :
"La plupart des analystes verront donc dans le résultat du scrutin espagnol une conséquence de la situation économique préoccupante du pays. Mais, à y regarder de plus près, il y a probablement d’autres enjeux qui ont motivé les électeurs. Car le gouvernement socialiste de José-Luis Zapatero a fait preuve, pendant ces années de pouvoir, d’une incroyable détermination à mettre en œuvre des bouleversements de société, ébranlant profondément les repères les plus structurants. […]
A l’heure où, en France, on parle beaucoup de christianophobie, il apparaît que le gouvernement de José-Luis Zapatero a témoigné d’une forte hostilité envers les chrétiens, remettant en cause la liberté scolaire, proposant des lois visant à interdire des crucifix, accueillant de fort mauvaise grâce le Pape Benoît XVI, etc … Si le contexte économique a pesé lourd, à l’évidence, il n’en reste pas moins que le gouvernement socialiste espagnol s’est aliéné une partie de ses soutiens en raison de sa politique agressive sur des questions de société sensibles.
Dès lors, la droite avait beau jeu, en annonçant – entre autres – une loi visant à protéger la maternité et à soutenir les femmes enceintes, particulièrement celles qui sont en situation difficile. En Espagne, comme aux Etats-Unis, comme dans de nombreux pays, les libertés fondamentales et la protection des plus fragiles font partie des critères qui pèsent lorsqu’il faut se déterminer pour un vote. Ces questions sont transversales, elles dépassent les clivages politiques traditionnels. Ils sont nombreux, à droite comme à gauche à récuser les projets de société bâtis sur le libéralisme économique à tout crin et sur l’hyper-libéralisme des mœurs. Autrement dit, à récuser la loi du plus fort.
La droite espagnole saura-t-elle être à la hauteur des aspirations des électeurs ? Elle devra le prouver dans les mois qui viennent. En France, le débat politique gagnerait en qualité s’il s’appliquait à construire un projet de société qui viserait à protéger les plus fragiles."