De Bernard Antony dans Les 4 Vérités :
"Ceux qui osent proférer que l’islamisme et « l’État islamique au Levant », en particulier, « ce n’est pas l’islam » sont dignes de ceux qui, au long d’un siècle, n’ont cessé d’affirmer de tous les régimes communistes qu’ils n’étaient pas le vrai communisme, mais de regrettables avatars. Quelques uns, certes, ne sont que des ignorants, mais la plupart commettent ce déni de réalité en raison des nécessités de diplomatie politique ou religieuse. La plupart l’avouent en privé. Or, cela ne sert à rien : ni religieusement, ni politiquement, ni pour la survie des derniers chrétiens des pays islamisés, ni même pour notre sécurité intérieure.
L’islamisme actuel est la continuation moderne des multiples déferlements fanatiques, conquérants et massacreurs qui ont ponctué l’histoire de l’islam. Le tout avec la claire conscience d’être dans l’imitation du prophète Mahomet et de son modèle théocratique systématisé avec la charia, que les djihads doivent préserver ou étendre. Affirmer que l’islamisme, dont toutes les ramifications et organisations sunnites ont été développées et financées principalement depuis l’Arabie saoudite et le Qatar, ce n’est pas l’islam, cela revient à affirmer que les régimes de ces pays ne seraient pas l’islam ! Affirmer que l’État islamique, qui a bénéficié d’une indéniable complicité de la Turquie (que certains veulent faire entrer dans l’UE), ne serait pas l’islam, cela revient à affirmer que la Turquie ne serait pas musulmane ! Et, sur le plan français, que dire des politiciens, de l’extrême gauche à l’extrême droite et des religieux catholiques (y compris traditionalistes) et, bien sûr, des imams professant doctement que l’islamisme n’a rien à voir avec l’islam? Et des policiers et des gouvernants qui, sans vergogne, n’ont cessé, à propos des terroristes comme Merah, de nous conter la fable des « loups solitaires »?
Alors que la vérité, c’est que « l’État islamique », comme Boko Haram, comme al-Qaïda, comme les talibans, comme les régimes chiites ou sunnites, de stricte application fondamentaliste de la charia et de la dhimmitude, tout cela, c’est la diversité de l’islam dans ses formes les plus sectaires et les plus violentes. Cette triste diversité, c’est certes celle des horreurs monstrueuses des organisations terroristes, mais c’est aussi celle des châtiments barbares appliqués selon la charia dans les pays musulmans les plus fondamentalistes (lapidations, amputations, décapitations…) et les discriminations cruelles de la dhimmitude et des entraves à la liberté religieuse (notamment la liberté de conversion), voire son interdiction totale.
Face à cette situation d’importance planétaire, que faut-il faire ? Il faut certes que les États ripostent militairement, et durement, à la barbarie. Mais c’est aussi toute une stratégie, politique et religieuse, qu’il faudrait mettre en place vis-à-vis de l’islam. Il faut profiter du fait que même certains États musulmans qui l’ont encouragé, suscité, financé, s’inquiètent désormais d’un extrémisme djihadiste qui pourrait les balayer selon le mouvement continuel de l’islam, dans lequel, depuis quatorze siècles, il s’est toujours formé de nouveaux tsunamis salafistes dévastateurs des régimes attiédis. L’action militaire peut et doit être assortie d’une exigence de liberté, nullement provocatrice, respectueuse certes des musulmans pacifiques, qu’il ne faut pas offenser dans leur foi religieuse. Mais c’est l’acceptation de la liberté et de l’égalité religieuse qui, en islam, conditionnera l’éclosion des autres libertés. L’abandon de la dhimmitude, la possibilité de conversion à d’autres religions que l’islam, la liberté de culte, c’est ce qui fera surgir inéluctablement la liberté politique, sociale, civile, citoyenne. Cela, il faut le réclamer d’abord, avec patience mais fermeté, des pays « phares », l’Arabie Saoudite et le Qatar, et aussi la Turquie et l’Iran. Il faut chez nous, partout en Occident mais aussi en Russie, exiger clairement de tous les imams qu’ils se prononcent pour un islam moderne libéré de l’archaïsme totalitaire de la charia et qu’ils se prononcent pour la liberté religieuse dans tous les pays de l’oumma. C’est cette exigence de réciprocité dans la liberté religieuse et civile que devraient sans cesse réclamer les hiérarchies chrétiennes, plutôt que de tenir de tièdes propos de complaisance qui ne rencontrent d’ailleurs qu’une courtoisie formelle recouvrant le mépris."