Laurence Trochu, présidente du Mouvement conservateur, Sébastien Meurant, sénateur du Val d’Oise, Jacques Myard, maire, membre honoraire du Parlement, président du Cercle Nation et République et Thibault Perrin, haut fonctionnaire, déplorent, dans une tribune publiée par Valeurs Actuelles, le manque de vision de la réforme des retraites :
La conférence de presse du gouvernement s’est ouverte sur un constat implacable : il n’y a plus qu’1,7 actif par retraité. Ce ratio démographique est bien faible pour financer les quelques 350 milliards d’euros par an dont l’économie française a besoin pour payer les pensions. Voilà donc ce qui rend la réforme inéluctable.
Le besoin de réformer revient dans le débat français comme un abcès souvent calmé, jamais éradiqué. Il est le fruit d’une longue histoire sans cesse recommencée. Pour en faire la généalogie, qu’il nous soit permis de remercier l’espèce apparue sur terre un matin agité du printemps 1968 : le rêveur-jouisseur-sans-entrave. Parti à la retraite à 60 ans, notre lanceur de pavés balnéaires est désormais bien heureux que les actifs bûchent plus longtemps pour payer sa pension… bien souvent, à la place des enfants dont il n’a pas voulu.
Sans généraliser une tendance à tous les représentants d’une génération, retraçons les faits saillants de cette époque bénie. Voilà une cohorte, née après guerre, qui a élevé moins d’enfants que la précédente. Alors que, de 1946 à 1973, 850.000 berceaux venaient chaque année attendrir les chaumières, dans les deux années suivantes, les naissances ont brutalement plongé de plus de 100.000, et n’ont jamais retrouvé depuis lors leur niveau antérieur. Au cours de sa vie active, cette génération libérée cotisait pour des parents retraités en bien moins grand nombre qu’ils ne sont désormais. Les parents d’alors avaient travaillé jusqu’à 65 ans (c’était l’âge de la retraite depuis 1910) et leur espérance de vie s’élevait en moyenne sur la période à 75 ans. En 1981, ladite génération glissait majoritairement dans l’urne le bulletin de la « force tranquille », obtenant ainsi l’année suivante la retraite à 60 ans et les 39 heures de travail hebdomadaires. La retraite par répartition ayant été instaurée pendant la guerre par l’Etat français, sans que la génération des Trente glorieuses ne pense à la réformer, celle de mai 68 n’a pas jugé utile de se constituer des placements de prévoyance. Préférons le présent, puisque le système renvoie toujours à la génération suivante le pavé des pensions ! Quand, en 1999, profitant d’une embellie économique, le gouvernement Jospin lance le fonds de réserve pour les retraites, il est bien tard pour écoper. De fait, loin des 150 milliards prévus, le fonds maintient bon an mal an une vingtaine de milliards d’euros, soit 8% du besoin annuel… et 12% de la dette de la sécurité sociale.
Aujourd’hui, la génération d’après-guerre est à la retraite et son espérance de vie à 60 ans atteint 85 ans. Il est bien juste qu’à son tour, elle perçoive la retraite qu’elle a versée à ses parents. Mais elle la perçoit 25 ans au lieu de 10 : les proportions ne sont plus comparables. Ne nous y trompons pas : la réforme Borne n’est rien de plus qu’une 5ème rustine de l’après-désillusion mitterrandienne. Nous n’avons pas encore vu la fin de l’histoire. Car devant nous, la facture du vieillissement (dépendance et santé) se précise à mesure que la génération 1945 approche des 80 ans, et vient considérablement alourdir celle des retraites.
Qui donc paiera notre propre retraite ? Nos enfants ! Comme disait le fondateur de l’INED, le démographe regretté Alfred Sauvy, « nous ne préparons pas notre retraite par nos cotisations, mais par nos enfants ». A la vérité, la génération montante n’est guère plus féconde que ses prédécesseurs. Depuis 2010, la natalité est en baisse continue. La France a à nouveau perdu plus de 60.000 naissances annuelles sur la dernière décennie. Les carnets roses de l’année 2022 semblent guère encourageants. Or, quand les trentenaires de 2023 prendront leur retraite dans les années 2050, ce sont les enfants qu’ils auront eus – ou qu’ils n’auront pas eus – qui cotiseront.
Au Mouvement conservateur, nous portons une conviction : le rôle de la Politique n’est pas seulement de négocier des rustines pour le présent, mais de penser l’avenir. Grevée par ses engagements financiers et sa démographie déclinante, la France se prépare à affronter des crises sociales redoutables. Inconscient des drames qu’ils préparent, des idéologues enseignent à notre jeunesse que la dénatalité sauverait l’environnement. Cette thèse, bien des scientifiques la réfutent, à l’exemple d’Emmanuel Pont, auteur de « Faut-il arrêter de faire des enfants pour sauver la planète ? » (Payot, 2022).
Dans cette perspective, pour garantir nos retraites, respecter nos anciens et restaurer la confiance entre les générations, il semble que nous n’ayons que deux alternatives : recourir plus fortement à la prévoyance par la capitalisation – avec des ressources limitées et des aléas certains, – et, plus que jamais, relancer la natalité. Et si nous faisions les deux ?
Meltoisan
Citation : “il semble que nous n’ayons que deux alternatives : recourir plus fortement à la prévoyance par la capitalisation – avec des ressources limitées et des aléas certains, – et, plus que jamais, relancer la natalité. Et si nous faisions les deux ?”
Alternative : “Énoncé de deux propositions telles que si l’une est vraie l’autre est nécessairement fausse, et inversement.”
Des alternatives, il n’y en a que deux par définition. D’autre part, si l’une est vraie, l’autre est fausse sinon ce ne sont plus des alternatives mais des possibilités.
Francis
Merci pour cet article !
Alors que “certaines personnes” font encore la promotion de méthodes d’évitement de naissances dites naturelles !
Même les catholiques devraient se limiter !
Voyez l’article précedent !
Un peu de cohérence !
zongadar
Troisième ‘possibilité’ déjà testée : le Rivotril….qui répond à la question lancinante de Y.Harari : “Que fait-on des inutiles ?”…
cadoudal
après la réforme des retraites, la loi pour l’ euthanasie et le suicide assisté , pour soulager les finances publiques “dans la dignité”.
Reine Tak
Il est évident que la réforme des retraites que le gouvernement veut faire adopter n’est qu’une rustine qui ne durera que quelques années. Et l’une des solutions serait une vraie politique de la famille avec un taux de natalité en hausse.Mais cela n’intéresse pas nos dirigeants et le pangolin de l’Elysée donne le mauvais exemple : il n’a pas d’enfants.
Cependant cette réforme arrive à un moment où la vie est déjà parasitée par la guerre en Ukraine et les millions qu’elle coûte au contribuable, l’inflation qui ne va pas s’arrêter de sitôt, les problèmes de coupures de courant et la hausse faramineuse du coût de l’électricité, les fermetures de commerces et le chômage qui en découle…
Il y aurait peut-être quelques autres moyens de trouver de l’argent, en attendant une natalité en perte de vitesse : la lutte contre les fraudes dénoncées par le magistrat Charles Prats rapporterait des milliards. Pensions de retraite bien souvent versées à des gens qui sont morts, cartes vitales en circulation bien plus nombreuses que le nombre d’habitants de la France, allocations versées indûment…
Peut-être serait-ce une piste à considérer avant de mettre le pays à feu et à sang ?
hugues
Je viens de voir le nombre de naissances en 2022 sur ma tv : 723 000 ! On est loin des 850 000.
Une retraite supplémentaire par capitalisation et une politique familiale sont des évidences.