Nécrose : Transformation d’ordre physico-chimique et chimique que subit la matière vivante et qui aboutit à sa mort. Caractérisée en particulier par un noircissement…
Le 11 octobre 2019, une intervention du responsable du groupe RN au Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté (BFC), Julien Odoul, a propagé une onde de réactions (en particulier à son étage médiatico-politique) dont l’ampleur a été assez symptomatique d’un état de nécrose déjà un peu avancé d’une partie de la société française. Essayons d’en débusquer quelques aspects.
Il faut en premier lieu décrire la réalité. Ce qui a été dit et comment cela a été dit.
Ce qui a été dit : une adresse à la Présidente de région lors d’une séance du Conseil :
« Je vais vous demander s’il vous plait au nom de nos principes laïques de bien vouloir demander à l’accompagnatrice de bien vouloir retirer son voile islamique s’il vous plaît. Nous sommes dans un bâtiment public, nous sommes dans une enceinte démocratique. Madame a tout le loisir de garder son voile chez elle et dans la rue, mais pas ici. Au nom de nos principes républicains, Au nom aussi de toutes les femmes qui luttent dans le monde pour s’extirper de la dictature islamique, je vous demande de bien vouloir demander à cette personne de retirer son voile, c’est la république et la laïcité. ».
Comment cela a été dit ? Tout jugement personnel devrait s’appuyer sur l’audition de l’interpellation, pour être en mesure de juger du ton. A écouter l’enregistrement, il semble bien que le ton ait été purement factuel, déclaratif, contrôlé, sans aucune agressivité.
Voilà donc une demande formelle, polie, exprimée à l’adresse de la Présidente de région. Quelles sont les réactions ?
Premier symptôme de nécrose : le travestissement des faits. Quelques échantillons.
Pour la presse : « Julien Odoul ordonne à une femme d’ôter son voile » (Huffington Post)
Pour le monde politique :
- Jérôme Durain, sénateur PS de Saône-et-Loire dans un tweet : « Jamais vécu un tel déferlement de haine raciste dans une enceinte républicaine».
- Dans le communiqué de presse du Conseil régional du 13 octobre, signé par sa Présidente : « Contrairement à ce qui se dit et s’écrit, cette femme n’était pas voilée, son visage est visible, elle portait simplement un foulard» (NDLR : un hijab bien noir, couleur nécrose).
- Ladite Présidente Marie-Guite Dufay écrivant par ailleurs dès le 11 octobre : « Halte au déferlement de haine ! L’attitude du RN est une insulte à notre institution et aux valeurs les plus élémentaires de la France. La République des lumières l’emportera».
- Laetitia Avia (l’auteur de la proposition de loi de lutte contre la haine) a twitté : « Quand je pense à cette femme humiliée en raison de sa foi et à ce petit garçon qui a entendu un élu dire que sa mère n’avait pas sa place dans notre République».
- Une solide synthèse par Sylvain Mathieu, vice-président PS du Conseil régional également dans un tweet: « Cet après-midi dans l’hémicycle régional, nous avons vu le véritable visage de l’extrême-droite : bêtise, méchanceté, désinformation, amalgame, mensonge, paranoïa, démagogie, racisme, intolérance, agressivité, haine, etc, etc… ».
Pour les adeptes du délit de blasphème, le CCIF (Comité contre l’islamophobie en France) :
« Le vendredi 11 octobre 2019 une femme et son enfant ont été violemment pris à partie par le groupe Rassemblement National de la région BOURGOGNE FRANCHE COMTÉ en séance plénière ».
Deuxième symptôme de nécrose : un désagrément équivaut immédiatement à une blessure inguérissable.
Pensez-donc, il y a eu terrible humiliation : « sincèrement, ils ont détruit ma vie » confirme Fatima E. dans un entretien au CCIF. Rien que ça.
Heureusement, il y a la CSP. Mais si, vous savez, la cellule de soutien psychologique. Cette structure dont le déploiement hâtif et généralisé concrétise si bien l’incapacité individuelle à supporter l’épreuve, quelle qu’en soit son degré. Pour l’occasion, elle se met en place immédiatement grâce à la Présidente de région (« J’ai pu m’entretenir longuement avec cette maman afin de lui apporter tout mon soutien ») qui, au surplus, annonce pour le mardi suivant une visite auprès des enfants, de leur enseignante et des accompagnatrices.
Et un autre soutien psychologique est fourni par Raphaël Glucksmann : « puisque manifestement l’extrême-droite a un problème avec cette classe, j’invite ces élèves et leurs accompagnateurs à venir découvrir le Parlement européen et les principes universalistes qu’on y défend ». Bon, allez, on va peut-être arriver à se reconstruire…
Peut-on rappeler qu’en 2000, le Président de l’Assemblée nationale, autre enceinte républicaine, avait demandé à un prêtre d’enlever sa croix et à une religieuse d’enlever son voile, pour pouvoir assister aux débats depuis la tribune des spectateurs. Or, en 2000, la loi sur le port de signes religieux ostensibles n’existait même pas puisqu’elle a été votée en 2004.
Peut-on rappeler qu’aux temps où les hommes portaient couvre-chef, il n’était pas rare que certains se voient être appelés à le quitter ? Y compris encore actuellement dans certains lieux de culte. Peut-on faire observer que, pour rentrer dans une mosquée, on est tenu de quitter ses… chaussures ?
Peut-on rappeler aux progressistes qui, c’est vrai, considèrent l’histoire comme matière négligeable, que la loi de 1905, à laquelle ils font souvent référence, a été votée dans un contexte d’affrontements civils violents fréquents ?
Un utilisateur des réseaux sociaux légèrement facétieux faisait remarquer :
« chez eux, ils lapident, torturent à coups de fouet, coupent des mains, ferment les églises ou pendent les homosexuels. Chez nous, attention, ils sont hyper-fragiles, une simple remarque verbale et c’est le scandale de l’année ».
Zineb El Rhazoui, journaliste à Charlie Hebdo au moment de l’assassinat de la rédaction, et depuis sous surveillance policière, écrit quant à elle :
« A l’heure où les islamiste et leurs complices communautaristes s’émeuvent de cette « maman voilée humiliée devant son enfant », les pires sévices, mortels, me sont promis publiquement sur les réseaux sociaux et personne ne s’en émeut… Comme si je n’étais pas moi aussi une maman, comme si mon enfant qui lirait un jour les menaces des défenseurs de l’islam « Nik Ta mer la gross putte », « On te retrouvera égorgée dans ta baignoire », « Tu sera violée par tous les trous », n’en éprouverait aucun traumatisme, ceux qui volent au secours de la hijabiste du Conseil régional se taisent sur ce que je vis au quotidien. Un silence qui en dit long sur les dégâts de la terreur islamique sur l’inconscient collectif français ».
Cela remet quelque peu le désagrément à sa juste place.
Troisième symptôme : la perte du discernement. C’est la perte de la hiérarchie des faits. Déjà remarquable dans l’assimilation de ce désagrément à une humiliation au dernier degré. Et particulièrement mis en exergue de façon emblématique par la deuxième partie du tweet de Sylvain Mathieu : « En dignes héritiers du régime fasciste et collaborationniste de Vichy, ils n’ont eu aucune pitié pour les enfants (NDLR : il fait sans doute référence au sort des enfants dans les camps d’extermination). Ils sont une honte pour notre république, une honte pour la France, comme l’ont été les collabos dans les années 40 ». Ceci étant, faut-il rappeler que le synonyme de discernement est le mot discrimination. Comment attendre une capacité de discernement d’un peuple auquel on interdit l’exercice de discrimination depuis bientôt 50 ans ?
Quatrième symptôme : la convocation de la haine comme qualificatif minimal d’un désaccord. Dans cette société dite du vivre-ensemble, en réalité on ne se sent plus chez soi comme cela a d’ailleurs été bien exprimé par une pancarte brandie par une femme avec un foulard islamique, Place de la République à Paris, le 19 octobre 2019 dans le cadre d’une manifestation contre l’islamophobie, et sur laquelle était écrit :
« Française, Musulmane, voilée. Si je vous dérange, je vous invite à quitté (sic) MON PAYS ».
Dans ce contexte, dans cette société devenue en réalité une société de la vigilance, comme c’est indiqué à l’entrée de tous nos bourgs (les voisins vigilants) et comme c’est entériné par M.Macron, tout est immédiatement haine, tout est haineux. Et cela accompagne la perte du discernement.
Cinquième symptôme : l’apartheid politique à l’égard du RN.
Ce mouvement politique, qui représente environ 20% du corps électoral français qui vote, encore arrivé premier aux élections européennes à la proportionnelle intégrale à un tour, qui compte des élus dans toutes les institutions de la République française, est en réalité l’objet d’un ostracisme violent comme le montrent à l’unisson toutes les condamnations ayant plu sur M.Odoul.
Prenons par exemple, M.Mohamed Sifaoui, le 14/10 sur CNews, islamologue qui lui-même se présente comme hostile au port du voile. Quelle est sa lecture de l’événement ? Réponse à la question de l’animatrice qui introduit le sujet :
« J’aimerais qu’on puisse parler d’un cas concret. Vendredi, conseil régional de Bourgogne. On voit Julien Odoul qui invective (NDLR : encore un bel exemple de travestissement de la réalité !) une femme qui entre avec le voile ».
M.Sifaoui :
« Quand on est Français, quand on est républicain, on a une foi dans l’Etat de droit et en l’espèce, le droit ne lui interdisait pas d’être là. Le comportement de cet élu de l’extrême-droite est un comportement inique. Car la République n’humilie pas, n’agresse pas. Quand la république est digne, elle ne moleste pas une personne devant son enfant…. Que cette femme soit islamiste, ça ne fait aucun doute. Le problème n’est pas là. Je vous parle de la méthode. Vous avez quelqu’un qui est contrevenant, vous le remettez en place avec une méthode républicaine. Là, c’est une méthode de voyou, une méthode de racaille ».
Plus violente encore, Laurence Ferrari, toujours sur CNews ce le 14/10. Elle s’adresse à Julien Odoul en rappelant qu’il interpelle une maman voilée, ce qui est donc factuellement faux :
« On voit cette maman, ce petit garçon de 8 ans qui pleure dans les bras de sa maman. Monsieur Odoul, regardez cette photo. Est-ce que vous êtes fier de vous ? ».
Et répète cette question Est-ce que vous êtes fier de vous ? au moins à 6 reprises, façon Grand Inquisiteur.
C’est donc haro sur le baudet, juste parce que le baudet est RN. Cette relégation préalable à toute réflexion, cet, apartheid politique, qui concerne les représentants régulièrement élus par un cinquième des Français et qui s’expriment de façon sensée et polie, ne peuvent pas être un signe de bonne santé. Nécrose, nécrose.
D’autant plus que ces personnes qui pratiquent l’apartheid politique et refusent ab initio la conversation sont celles qui se présentent comme des bienveillants, des tolérants. Que serait-ce s’ils étaient sectaires !
Conséquence : l’éruption polémique. Finalement, voici une sorte de fait divers d’intensité 0,5 sur l’échelle de Richter politico-humaine, et qui amène à des considérations furieuses d’intensité 7 à 8 sur la même échelle. A preuve : le Président de la République en a parlé, le Premier ministre en a parlé, le ministre de l’Education nationale en a parlé, Mme Schiappa en a tweeté (non, ça, ce n’est pas un critère…) etc, etc….. S’il n’y a pas eu de signalement au CSA (quoique….), c’est bien parce que, même avec bonne volonté, on avait du mal à le replacer dans son périmètre de juridiction. Par contre, bien sûr, des plaintes sont déposées contre M.Odoul via le CCIF :
« les victimes sont assistées par le CCIF et ont mandaté leurs avocats dont Maitre Sana BEN HADJ YOUNES aux fins de déposer une plainte auprès du parquet de DIJON pour des violences commises en réunion par personnes dépositaires de l’autorité publique sur mineur et majeur à caractère racial, ce jeudi 17 octobre 2019 à 14h00 et une plainte avec constitution de partie civile devant le Doyen des juges d’instruction de Paris pour la provocation publique à la haine raciale par des élus, à une date future ».
Et ce dépôt de plainte est en réalité une très bonne nouvelle. Car on va pouvoir juger sur pièces de l’état de la justice française, en espérant qu’elle ne soit pas elle aussi frappée de nécrose.
D’un point de vue légal, effectivement et ça a été souligné, rien n’interdisait à cette femme d’être en hijab à l’intérieur du Conseil régional, en tant qu’accompagnatrice scolaire.
Ceci étant, poser la question, était-ce si ignominieux et si inconséquent ? Après tout, pour se référer aux Lumières chères à la Présidente du conseil de BFC, Montesquieu écrivait : « les mœurs sont plus importants que les lois ». Examinons alors trois aspects : le contexte, le fond du sujet (la nature du hijab), et quelques réactions politiques plus réfléchies.
- Sur le contexte : l’incident se situe juste après une controverse sur la présence d’une femme voilée sur une affiche électorale de la FCPE, qui avait été condamnée par M.Blanquer (« je pense que c’est une erreur ; c’est regrettable»). C’est peu après Harpon et ses assassinats à la Préfecture de police. Et peu après le discours de M.Macron dans lequel on relevait : « L’administration seule et tous les services de l’Etat ne sauraient venir à bout de l’hydre islamiste. Non Non c’est la Nation toute entière qui doit s’unir, se mobiliser, agir. Nous ne l’emporterons que si notre pays qui est venu à bout de tant et tant d’épreuves dans l’histoire se lève pour lutter contre cet islamisme souterrain qui corrompt les enfants de France. Une société de vigilance voilà ce qu’il nous revient de bâtir ».
Un peu plus tôt dans l’année, lors de l’examen du projet de loi “pour une école de la confiance“, le Sénat à majorité de droite avait adopté un amendement LR visant à interdire les signes religieux ostentatoires lors des sorties scolaires. La disposition n’avait pas été retenue dans le texte finalement adopté par le Parlement en juillet 2019.
Autrement dit, l’interpellation de M.Odoul n’était pas incongrue.
- Sur la nature du voile et le fond de la question: le hijab est un foulard islamique (c’est-à-dire musulman puisqu’il n’y a qu’un seul islam). Et la France est devenue terre d’islam comme le démontre Gilles Kepel, dans son livre Jihad (2003).
Gilles Kepel, reconnu comme un fin connaisseur du monde musulman, insère dans ce livre un chapitre 8 intitulé “Europe, Terre d’islam : le voile et la fatwa ». Ce titre met en lumière un double fait concernant la France en 1988 et 1989. En 1989, l’ayatollah Khomeini avait lancé sa fatwa homicide contre Salman Rushdie. Or, dans la doctrine juridique musulmane, une fatwa ne pouvait avoir de validité en dehors du dar el islam, c’est-à-dire de cette partie de l’univers gouvernée par un prince musulman et où, en principe, était appliquée la chari’a. Par cette action, Khomeini faisait de la terre entière (et donc de la France) sa juridiction. Il jugeait de son ressort les populations émigrées en Europe, en les intégrant du même coup dans le domaine de l’islam. Ceci ne faisait que confirmer (plus officiellement) ce qui s’était passé en 1988 : G.Kepel indique (p.309) que
« les organisations islamistes qualifièrent l’Europe, à partir de 1988, de « dar el islam », puisque des musulmans en grand nombre en étaient devenus citoyens. Ils devaient donc pouvoir s’y organiser en communauté islamique appliquant les règles de la chari’a et intervenir comme tels dans l’ordre politique ».
Et un peu plus loin :
« pour les militants, dès lors que la France comptait comme dar el islam, les élèves musulmanes devaient être autorisées à respecter les prescriptions de la chari’a et porter le hijab ».
Et 1989, cela vous rappelle-t-il quelque chose ? Voilà comment commencèrent les affaires du voile à l’école à partir de l’automne 1989 (début de l’article sur Wikipedia concernant l’Affaire de Creil) :
Le 18 septembre 1989, Fatima (13 ans) et Leïla (14 ans) Achahboun, ainsi que Samira Saïdani, cessent de fréquenter le collège Gabriel-Havez de Creil dans l’Oise (500 élèves musulmans sur 876 et 25 nationalités ), sur la demande du principal du collège, Ernest Chénière, qui estime dans une lettre aux parents que le voile est une marque religieuse incompatible avec le bon fonctionnement d’un établissement scolaire. Il écrit : « Notre objectif est de limiter l’extériorisation excessive de toute appartenance religieuse ou culturelle. Je vous prie de leur donner la consigne de respecter le caractère laïc de notre établissement. » Selon le Principal, dans ce même établissement, « une vingtaine de jeunes israélites ne viennent pas le samedi matin, ni le vendredi soir pendant l’hiver. Les professeurs ne peuvent plus l’accepter. Nous ferons respecter la laïcité. » Les parents des filles portant le foulard ne veulent pas désarmer. Les filles seront exclues de l’établissement ».
La France est donc considérée, depuis maintenant 30 ans, par les musulmans organisés comme une terre d’islam d’un point de vue politique. Et donc comme un espace dans lequel la charia doit pouvoir être appliquée (on ne rappellera pas le hallal et toutes les autres manifestations d’une civilité musulmane). Et le hijab est un des symboles les plus immédiats de cette emprise politique de l’islam sur la terre française : le 15/10, Zohra Bitan, porte-parole de M.Valls pendant la primaire socialiste de 2011 et concernée par l’intégration sociale et la laïcité, déclarait aux « Grandes gueules » que le hijab est le voile noir du salafisme : “La femme ne porte pas n’importe quel voile ! Le voile noir, c’est synonyme de salafisme ou de wahhabisme ! Par son habit, elle incarne une idéologie que nous ne pouvons que combattre !” Combattre le port du hijab, c’est donc participer à cette société de vigilance, contre l’hydre islamiste, que préconise M.Macron. Avec une certaine ingénuité (attention au CSA !), sur LCI le 16/10, l’animateur Olivier Galzi suggérait :
« Est-ce qu’il ne faudrait pas dire : ce n’est pas un signe religieux ; c’est un signal politique ? Comme on interdit un uniforme SS tout simplement ».
La qualification de voile islamique par J.Odoul et la description de ce qu’il représente étaient donc adéquates.
- Des interventions politiques apportent en réalité un soutien de fond à la demande exprimée par M.Odoul.
Le ministre de l’Education nationale :
« La loi n’interdit pas aux femmes voilées d’accompagner les enfants mais nous ne souhaitons pas encourager le phénomène ».
Une position soutenue par l’ex-LR et ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, qui a estimé sur France Info que le voile
«est légal, mais pas pour autant souhaitable… Il faut savoir quelle culture nous voulons défendre. Moi, je porte une culture de l’égalité entre les femmes et les hommes […] dans laquelle la religion reste dans la sphère intime, privée, et n’a pas sa place dans l’espace public.»
Christian Jacob, président fraîchement élu de LR, s’est déclaré choqué par le port de ce hijab et demandait :
« Comment expliquer que c’est interdit dans l’enceinte de l’établissement, mais que si on est au contact des enfants en dehors, et toujours dans le cadre scolaire, on l’autorise ? ».
Même le prudent Gérard Larcher estimait le 16 octobre qu’il considère que les sorties scolaires font partie du temps éducatif. Donc une mère qui accompagne les enfants en sortie ne peut être voilée.
Et d’ailleurs, les sénateurs ont adopté ce mercredi 23 octobre en commission la proposition de loi LR visant à interdire les signes religieux ostentatoires chez les parents accompagnant des sorties scolaires. La proposition de loi est examinée ce mardi 29 octobre.
On peut aussi rappeler que, le 15 avril 2018, dans un entretien avec M.Plenel et M.Bourdin, M.Macron avait affirmé que le
voile n’était pas conforme à la laïcité, pas conforme à la civilité qu’il y a dans notre pays, c’est-à-dire au rapport qu’il y a entre les hommes et les femmes ».
On ne trouve pas là matière aux invectives exagérées subies par M.Odoul. Il y a en réalité un sujet pouvant porter à discussion commune de beaucoup de parties prenantes. Et, d’une certaine façon, il y aurait là plutôt un sujet de réconfort : nous serions au Royaume-Uni, en Belgique, aux Pays-Bas, le sujet ne pourrait sans doute même pas être évoqué.
Mais, n’oublions pas, nous sommes en Macronie. Le Premier ministre a indiqué à l’Assemblée nationale :
« le droit – c’est-à-dire la loi qui s’applique – est très clair. S’agissant des agents du service public, ils sont astreints à un strict devoir de neutralité, qui leur interdit de manifester leurs croyances religieuses, comme leurs convictions politiques, par des signes extérieurs, notamment vestimentaires. Quant aux usagers, ils ne sont pas soumis à l’exigence de neutralité, sauf exception prévue par la loi. Il en existe une, très importante, résultant de la loi du 15 mars 2004, qui a posé un principe très clair : « dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit ». Cette interdiction, vous le savez parfaitement, ne s’applique pas aux parents d’élèves, non plus qu’aux étudiants. C’est la loi. On peut porter un voile quand on accompagne une sortie scolaire… Je ne pense pas, pour ma part – mais nous serons peut-être en désaccord, monsieur le député –, que l’enjeu aujourd’hui soit de voter une loi sur les accompagnants scolaires ».
Philippe Bilger dans le billet déposé sur son blog le 6 octobre 2019 remarquait :
« Il est clair pourtant qu’on ne peut plus se contenter de cette posture mi-chèvre mi-chou, d’attentisme lâche et mou et de cette fuite face à ce qui affecte de manière lancinante l’espace et l’esprit publics. Peut-être serait-il nécessaire pour le pouvoir de ne pas adopter, à l’égard de l’urgence, un processus de plus en plus lent ? Il n’apaise pas, il laisse pourrir… On ne peut pas vivre, cohabiter, comme si on ne savait pas que la deuxième religion de France, dans son expression furieuse, est mortifère et l’a tragiquement prouvé. Va-t-il être possible, face aux avancées insidieuses et/ostensibles de l’islam politique en France, de toujours pouvoir faire le départ entre les musulmans de paix et les autres, même pour l’instant inactifs, qui ne rêvent que d’en découdre avec notre société, nos valeurs et notre mode de vie ?
Ma certitude fondamentale est en tout cas que notre faiblesse à faire respecter nos lois et tout ce qui fonde notre démocratie aggrave les dangers que nous prétendons combattre. Nous luttons mal contre un ennemi plus fort que nous ».
Répondant par là même à ceux qui accusent les lanceurs d’alerte de contribuer à propager l’islam dans sa forme radicale.
Et justifiant à la fois le néologisme dénislamisme forgé par Le Figaro du 6 octobre, et le titre de l’hebdomadaire Le Point, paru juste AVANT l’épisode du Conseil régional de BFC : Face à l’islamisme, sommes-nous des lâches ?
Il y a malheureusement des questions auxquelles il est plus facile de répondre qu’à d’autres. C’est pour partie un des stigmates de la nécrose de la société française.