Ils sont cinglés en Norvège. Mais avec les programmes que nous avons, nous y venons…
[…] – “Alors, vous avez fait quoi aujourd’hui?”
– “Ce matin on a peint des drapeaux avec beaucoup de couleurs et fait des coloriages sur nos bras. Et cet après-midi, on est sorti avec! Tu savais que jaune en Norvégien se dit gul et en anglais yellow. Yellow, ça rime avec rigolo. Ça c’est drôle!”
– “Ah ouais, quand même, t’en as appris des choses pour ton âge!”
Arrivé à notre appartement, il sortit fièrement son drapeau multicolore qu’il agita tel un supporter de football. Je découvris alors qu’il s’agissait bien du drapeau arc-en-ciel, pour moi c’était le drapeau de la gay pride. “Regarde papa, c’est ça qu’on a fait”, dit-il d’un sourire contagieux.
Ah ouais, quand même?
Je fus spontanément surpris. Pas négatif, mais tout de même, mon fils n’a que quatre ans non? Quelle idée de lui mettre entre les mains un drapeau dont il ne peut pas comprendre le sens? La Norvège va-t-elle trop loin?
Mon premier réflexe fut alors d’ouvrir ma boîte email pour regarder le programme pédagogique hebdomadaire envoyé par le personnel du jardin d’enfant. Je lis alors: “Semaine de la Pride, nous célébrons la diversité. Nous organisons un défilé avec les enfants. Nous marchons dans le quartier de Grünerløkka avec les drapeaux arc-en-ciel”.
Sur sa page Facebook, la mairie du quartier relayait l’information. “C’est l’Oslo pride, les jardins d’enfants de Grünerløkka et Kårkeslottet ont organisé une parade. Vive la tolérance, la diversité, l’égalité”. Je lis les commentaires de ce poste: Super, bravo, hourra… La plupart des habitants du quartier adhéraient au message. Quelques commentaires négatifs: “laissez les enfants en dehors de ça!”. […]
Décidément, je ne parvenais pas à saisir ce qu’il avait retenu de cette activité, ou même s’il pouvait l’exprimer. J’avais besoin d’écouter l’opinion de ma femme norvégienne et je me décidais à l’appeler.
– “Tu savais qu’ils faisaient une parade aujourd’hui?”
– “Oui je trouve ça super bien. Peut-être que notre fils ne va pas comprendre grand-chose, peut-être qu’il va comprendre quelques notions. Chaque enfant avance à son rythme. Il a dans sa classe des camarades qui ont deux mamans, autour de lui des familles avec deux papas. Le plus tôt on ouvre aux différences, le mieux on inclut. En Norvège la Pride est très culturelle. C’est une fête des libertés placée sous le signe de la joie, la tolérance et de l’acceptation de l’autre. On a le droit d’aimer qui on veut. C’est un message très important. T’as peur de quoi?”
C’était aussi une bonne question ça: j’avais peur de quoi au fond? Qu’on perturbe son enfance innocente? Qu’on lui parle déjà de sexualité? […]