«Il s'agit pour moi d'une guerre de civilisation, au singulier, contre la barbarie, et non pas d'une guerre entre les civilisations, au pluriel»
Dans l'éditorial du Figaro Histoire qui paraîtra demain, Michel de Jaeghere revient sur cette phrase, prononcée par Manuel Valls après la décapitation d'Hervé Cornara :
"[…]Qu'est-ce que le chef du gouvernement entend au juste par barbarie ? Et que recouvre, au singulier, le mot civilisation?
Le terme de barbare remonte à la Grèce antique. Il désigne celui qui ne parle pas le grec. Qui, par là, baragouine. C'est l'étranger, c'est l'Autre, par opposition auquel se définit «une communauté de race, de langue, de religion, de droit et de culture» qui se juge supérieure. Pour le Romain, plus assimilateur par vocation, c'est le nomade adonné au tribalisme et ne connaissant d'autre loi que celle de ses passions, mais qu'il reste possible de faire accéder à une plus haute vie morale en lui faisant adopter une vie sédentaire et en le «romanisant». Parce que, selon la belle expression d'Yves Albert Dauge, la barbarie est avant tout le théâtre d'un «drame intérieur». Un état passager dont il est possible de sortir, pour peu qu'on s'y astreigne. «Être romain, résume Rémi Brague, c'est avoir en amont de soi un classicisme à imiter, et en aval de soi, une barbarie à soumettre.»
Le mot civilisation est d'emploi plus récent. Il ne remonte qu'au XVIIIe siècle. Il définit le processus qui permet de parvenir à un certain degré de politesse, de justice et de raffinement. Qui se traduit par la production d'œuvres d'art, la construction de bâtiments, la création d'œuvres philosophiques ou littéraires, la découverte de lois scientifiques, le progrès des techniques permettant de maîtriser la nature pour la mettre au service de l'homme.
On comprend bien que Manuel Valls n'entendait de son côté que porter un jugement moral en désignant comme «barbare» la violence des procédés dont usent les terroristes qui se revendiquent de Daech: attentats, égorgements, décapitations. Leur opposer les «valeurs» de la raison, de la paix et de la tolérance, considérées comme l'assise d'une civilisation à vocation universelle.
[…] En revenant au nom des «valeurs de la République» à une conception «romaine» d'une civilisation considérée comme un idéal universel, Manuel Valls tourne spectaculairement le dos au différentialisme qui règne depuis soixante ans en maître sur les intelligences, et qui a assuré le triomphe du relativisme contemporain. Mais il serait dommage qu'il s'arrête en chemin. Car si les Romains considéraient, de fait, l'accès à la vie civique, la substitution de la délibération rationnelle à la loi du plus fort dans la définition du bien commun comme la voie royale qui permettrait à leurs sujets de sortir de leur barbarie native pour accéder à la civilisation, ils n'avaient eu garde de limiter celle-ci à l'adoption du principe électoral dans la désignation des dirigeants, non plus que de s'en remettre à l'infaillibilité d'une Raison livrée à elle-même. Ils l'identifiaient bien plutôt à un processus d'acculturation fondé sur la diffusion de la langue latine, la construction de monuments publics (temples, amphithéâtres, portiques) qui, faisant des cités des peuples conquis des répliques de Rome, habituaient leurs élites à une vie de loisirs propice à l'assimilation et la méditation des chefs-d'œuvre de la littérature, de la poésie, de l'histoire ou de la philosophie. Parce qu'ils estimaient qu'une telle formation était seule susceptible de nourrir leurs âmes par l'exemple magnifié des héros fondateurs comme par le spectacle des défaillances et des trahisons qui leur avaient fait cortège ; d'aiguiser leur discernement par l'initiation aux conflits de devoirs et aux cas de conscience qui forment la trame de l'existence ; de les habituer à reconnaître l'ordre naturel du monde derrière le désordre des apparences, et à orienter leur vie vers la recherche du Vrai, du Beau et du Bien.
Ces disciplines ont un beau nom: celui d'Humanités. Elles sont, depuis cinquante ans, considérées chez nous comme inutiles, et vouées à devenir, peu ou prou, matières à option dans un système éducatif orienté par la volonté de répondre chaque jour un peu plus aux nécessités d'une professionnalisation technicienne, aux présupposés d'un individualisme peu soucieux d'imposer des limites à la tyrannie des désirs instables, non plus que de proposer à la liberté souveraine des exemples de comportement. Elles ne visent, de fait, qu'à former des hommes dignes de ce nom. On peut, sans elles, gagner des guerres contre toutes sortes d'adversaires. On ne peut faire triompher la civilisation dont elles sont constitutives, puisque leur propos même est de dominer le fond de barbarie qui demeure tapi en chacun d'entre nous."
lapaladine
Je ne supporte plus les discours des gens de gauche et plus particulièrement de Valls. Ce sont toujours les mêmes phrases types, “les valeurs de la république”, des mots vides de sens et asséner en insistant sur certains mots et en mettant des silences entre chaque mot. Ces gens de gauche sont en permanence en train de nous faire des leçons de morale, ils feraient bien “de balayer devant leur porte” avant de le faire.
Pas un n’a fait ses humanités. Quand vous pensez que Fleur Pélerin, ministre de la culture n’a pas le temps de lire sauf les notes de son cabinet, n’a lu aucun livre de Modiano prix Nobel de littérature et sortant d’un déjeuner avec lui a eu pour toute déclaration “on a bien rigolé”, on est affligé d’autant d’ignorance et d’arrogance.
Bref Hollande, Valls et son gouvernement sont habités par leur dogmatisme qui leur sert de maître à pensée, bien au chaud au fond de leurs hôtels particuliers, loin des réalité. Ils sont définitivement médiocres, ils me font honte.
Jeep
Les valeurs de la république?…Les djihadistes les pratiquent.Il ne leur manque que quelques guillotines pour améliorer la tâche.
creoff
Quand les “humanités” disparaissent, c’est l’humanité qui est menacée…