Le Figaro publie un article intéressant pour rétablir quelques réalités sur l'Inquisition, créée le 20 avril 1233 par le pape Grégoire IX.
Idée reçue n°1: l'Inquisition médiévale est le signe d'un temps d'intolérance et de fanatisme
Ce tribunal pontifical médiéval est institué par la papauté pour protéger l'orthodoxie catholique: il est créé pour lutter contre les dissidences religieuses. En contestant l'organisation de l'Église romaine et certains de ses dogmes elles menacent son unité. Ces membres sont considérés comme des hérétiques. Aussi l'objectif du tribunal est avant tout de sauver les âmes égarées, de les ramener dans le giron de l'Église romaine.
Il s'agit davantage d'un outil de persuasion que de répression. L'Inquisition est créée pour préserver la chrétienté et ne juge que les chrétiens. Les tribunaux inquisitoriaux sont introduits en 1233 dans le royaume de France pour lutter contre les Cathares, installés dans le Midi de la France. Les inquisiteurs, nommés par le pape, s'appuient dans leur mission sur les pouvoirs laïcs. En replaçant cette organisation ecclésiastique, dans le contexte culturel et historique du Moyen Âge, on ne peut parler de fanatisme ou d'intolérance.
Idée reçue n°2: Les juges inquisitoriaux rendent une justice arbitraire
L'Inquisition est souvent présentée comme une justice arbitraire et archaïque, alors qu'elle apparaît plutôt moderne: elle met en place une procédure d'enquête. Le but est de ramener la personne suspectée d'hérésie dans le droit chemin, de permettre la conversion. Ainsi l'instruction est méthodique, elle ne peut débuter que sur la base de témoignages vérifiés. Il faut des preuves concrètes et des témoignages probants avant de pouvoir faire procéder à l'arrestation d'une personne par les pouvoirs civils. La justice s'appuie sur l'aveu -s'il est obtenu par la torture, il doit être réitéré «sans aucune pression de force ou de contrainte», hors de la chambre de torture pour être recevable. Le faux témoignage est par ailleurs poursuivi et condamné.
L'historien Didier Le Fur précise dans son livre sur l'Inquisition que la sentence du tribunal est prise sur l'avis du conseil -qui comprend des membres du clergé régulier ou séculier et des laïcs désignés expressément et chacun fait serment de donner les bons conseils. On ne communique pas forcément le nom du prévenu. Enfin Il faut soulever que l'Inquisition ne condamne pas systématiquement les personnes suspectées. Il ne s'agit pas d'une justice aveugle, comme peut l'être la justice seigneuriale, souvent arbitraire et expéditive.
Idée reçue n°3: l'Inquisition est un tribunal qui envoie des milliers de personnes au bûcher
La légende noire de l'Inquisition, présentant les inquisiteurs comme des juges cruels, responsables d'immenses bûchers est un héritage de la littérature et de l'iconographie du XIXe siècle. Or les recherches récentes ont permis de réévaluer largement à la baisse le nombre d'occis. Ainsi selon les chiffres des sentences de Bernard Gui, inquisiteur à Toulouse pendant 15 ans, de 1308 à 1323, sur 633 sentences, seules 40 personnes sont remises au bras séculier, donc au bûcher (l'Inquisition qui ne peut en théorie pratiquer la peine de mort envoie le condamné à la justice laïque). Dès la fin du XIIIe siècle le bûcher est de plus en plus exceptionnel; il est aussi le signe de l'échec de l'Église, incapable de ramener les âmes perdues.
Il est certain qu'au cours de son histoire l'Inquisition a pu se montrer féroce, mais il faut aussi mentionner que les abus de certains juges sont aussi punis. Ainsi Robert le Bourge -ancien hérétique converti- inquisiteur en Champagne qui envoie des dizaines de condamnés au bûcher (bûcher du Mont-Aimé) est suspendu temporairement en 1233. Lorsqu'il reprend sa mission, ses excès sont tels qu'il est révoqué et condamné à la prison à perpétuité en 1247. Mais ces dérives ne sont pas une généralité: les tribunaux inquisitoriaux sont davantage modérés dans leurs sentences que les tribunaux laïcs. Et la grande majorité des peines consiste en un temps d'emprisonnement.
Les images de violences proviennent surtout de l'amalgame qui est fait avec l'Inquisition espagnole -fondée en Espagne, en 1479, par les rois catholiques Isabelle de Castille et Ferdinand d'Aragon. Indépendante de Rome, elle est un temps sous l'autorité du tristement célèbre grand inquisiteur Thomas de Torquemada. Elle est instaurée pour sévir contre toutes les déviances, c'est-à-dire contre tous ceux qui ne sont pas catholiques. Il s'agit d'un phénomène politico-religieux. Abolie une première fois en 1808, elle l'est définitivement en 1834.
Idée reçue n°4: l'Inquisition en France est une organisation pontificale puissante pendant des siècles
L'Inquisition médiévale dans le royaume de France perd de son importance avec le déclin des hérésies cathare et vaudoise à la fin du XIVe siècle. Ainsi un siècle après sa création elle est affaiblie notamment par la royauté qui souhaite affermir son autorité et conteste celle de l'Église. Aussi dans certaines affaires -comme celle des Templiers avec Philippe le Bel- il est difficile de définir la frontière entre le domaine politique et religieux.
La perte de l'influence du tribunal pontifical est flagrante au moment de la réforme protestante puisque ce n'est pas lui qui est au premier plan dans la lutte. En effet, les protestants sont considérés comme une menace pour la paix dans le royaume, par leur rébellion. Ce sont des criminels qui désobéissent au roi et dépendent donc de la justice laïque. Alors qu'en tant qu'hérétiques ils devraient relever du tribunal ecclésiastique, mais seuls les cas d'hérésie simple sont jugés par lui. L'inquisition reprend une certaine importance à la fin du XVIe siècle lorsqu'elle s'engage dans la chasse aux sorcières (magiciens, devins, sorciers). Les tribunaux inquisitoriaux disparaissent du royaume de France à la fin du XVIIe siècle."
Isabelle
L’Inquisition a inventé : l’avocat de la défense, jusque-là inconnu dans les procédures judiciaires civiles, le recours aux témoignages alors qu’on se contentait jusque-là des aveux (spontanés ou forcés) ou des dénonciations, la présence obligatoire du médecin lors des tortures, le recours exceptionnel et modéré à la torture qui ne devait pas excéder la durée d’un quart d’heure, la vérification scrupuleuse des dénonciations et les confrontations du prévenu et du dénonciateur, la récusation des témoins par les accusés. Enfin, l’abjuration du prévenu suffisait à une condamnation très allégée.
Par une bulle du 5 décembre 1484, le pape Innocent VIII fait enquêter sur les sorciers, les sorcières et la sorcellerie, en vue de définir les signes auxquels on peut reconnaître le pacte d’un individu avec le démon !
Comme l’atteste cet acte, c’est bien à la fin du Moyen Âge, tandis que la foi médiévale recule au profit de la philosophie gréco-romaine, que les prétendues sorcières sont désignées à la vindicte publique ! Quand la foi recule se développent les superstitions.
Au Moyen Âge, on ne brûle pas les sorcières, mais on les expose et on les traite en pauvres folles. Tout change à partir du moment où disparaît l’Inquisition, en France et dans les pays germaniques : les tribunaux civils héritent des procès en sorcellerie et les juges, à la différence des inquisiteurs, croient volontiers au pouvoir maléfique des sorcières. Ils les font en conséquence brûler à l’égal des hérétiques.
C’est un bon exemple de la désinformation actuelle qui fait passer l’Inquisition pour un pouvoir judiciaire injuste. La plupart des criminels de l’époque préféraient être jugés par l’Inquisition que par un tribunal civil. Cette dernière était bien plus clémente que des tribunaux expéditifs.
Localiste
Il est fait mention d’une finalité de conversion de l’inquisition.
Certes mais c’est insuffisant.
À une époque où les personnes avaient une conscience plus fine du Bien commun, la société civile et l’Église poursuivaient ce même Bien.
En conséquence, les poursuites faisant l’objet d’enquête étaient motivées par un souci du Bien commun et non uniquement théologique.
C’est notamment le cas lors de l’inquisition Cathare où les dérives théologiques de la noblesse risquaient de précipiter la société locale dans le chao. Derrière la dérive théologique, il y a toujours la condamnation d’une infraction purement profane qui porte atteinte à la société.
Aujourd’hui, les crasseux de NDDL sont semblables aux Cathares qui faisaient une société contraire à la Justice.
Bernard Mitjavile
Au procès de Jeanne d’Arc qui fut avant tout un procès d’inquisition selon ses règles, il y avait parmi les principaux juges le représentant de l’Inquisition en France qui n’a rien trouvé à redire sur la procédure, pas plus que l’évêque et divers théologiens y participant. Cela suffit pour décrédibiliser complètement cette institution heureusement supprimée mais qui a l’air d’être regrettée par certains lecteurs du SB.
[Non, le procès de Jeanne d’Arc ne fut certainement pas un procès dans les règles et encore moins d’Inquisition. Ce que le procès de réhabilitation a largement montré.
MJ]
Tite
Le 18 juillet 1573, le tribunal du Saint-Office à Venise, convoque le peintre Véronèse sur plainte des dominicains de l’église Santi Giovanni e Paolo qui lui avaient commandé une grande fresque pour leur réfectoire.
Jugeant que le sujet (la Cène) avait été traité de manière trop profane, ils exigèrent certaines corrections et la disparition de quelques personnages. Véronèse ne céda sur rien. Il fit semblant de ne pas comprendre ce qu’on lui reprochait et changea seulement le nom du tableau :
Le repas chez Levi… la sanguinaire, barbare et odieuse “Sainte” Inquisition, ne l’a pas écharpé pour autant…
Certaines vérités historiques sont opportunément “oubliées” pour salir les catholiques. Notamment celle-ci :
Les pauvres femmes brûlées (en quantité) sous prétexte de sorcellerie, c’étaient dans les pays de culte protestant.
Siderúrgico
Dommage que pour défendre l’inquisition médievale on salit l’inquisition espagnole:
” Elle est instaurée pour sévir contre toutes les déviances, c’est-à-dire contre tous ceux qui ne sont pas catholiques.” Faux, ses buts étaient les mêmes que ceux de l’inquisition médievale et pontificale. Les judaïsant (marranos relapses) étaient baptisés, donc aussi catholiques que les cathares.
Pour dénoncer les calomnies des “lumières” sur le moyen âge on n’est pas obligé d’assumer les calomnies sur l’Espagne catholique.
vendome
quand il n’y a pas réaction suffisante, cela donne:
– les guerres de religion où 2 millions de huguenots emmerdèrent 18 millions de catholiques pendant plus d’un siècle
-les guerres à venir sur notre sol où 6 millions de mahométans auront sans doute raison de 60 millions d’ex-chrétiens vieillis.
Bernard Mitjavile
Ah bon, le représentant de l’inquisition était là pour faire de la figuration (voir Régine Pernoud sur Jeanne d’Arc).
Rappel de l’encyclopédie universalis : “Dès le 26 mai, l’Université de Paris avait réclamé qu’elle fût jugée comme hérétique par le tribunal de l’Inquisition. Ce corps, représentant suprême en France de la culture et des préjugés savants et de la collaboration avec les Bourguignons et les Anglais, s’avérait être le principal ennemi de Jeanne. Les Anglais, qui voulaient la condamnation de Jeanne, l’achetèrent à Jean de Luxembourg, mais la remirent à la justice d’Église, tout en déclarant qu’ils la reprendraient si elle n’était pas déclarée hérétique. Un tribunal ecclésiastique fut constitué, par Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, diocèse sur le territoire duquel Jeanne avait été prise ; son diocèse étant aux mains des Français, cet universitaire parisien, devenu une créature des Anglais, était replié à Rouen. Depuis longtemps gagné aux Bourguignons, il était l’un des rédacteurs de l’ordonnance « progressiste » de 1413, dite ordonnance « cabochienne ». Il s’adjoignit, malgré les réticences de celui-ci, un dominicain, frère Jean le Maître, vicaire de l’inquisiteur de France à Rouen. Ce furent les deux seuls juges de Jeanne, entourés d’un certain nombre de conseillers et d’assesseurs à titre consultatif.”
Et aussi une étude savante : “La procédure d’inquisition et son application au procès de Jeanne d’Arc” de Sophie Poirey à propos du livre de François Neveux “De l’hérétique à la sainte” :
En janvier 1431 s’ouvre le premier procès de Jeanne d’Arc, son procès de condamnation. Le contexte est éminemment politique dans la mesure où Jeanne est jugée à Rouen, alors tenue par les Anglais. Et de fait, les soupçons d’impartialité qui pèsent sur le jugement seront corroborés par la tenue d’un second procès, vingt-cinq ans plus tard, qui désavoue les premiers juges en réhabilitant la Pucelle. Cette contribution entend examiner ce premier procès sous un angle juridique, à l’aune des règles qui prévalent en matière inquisitoriale. En effet, le procès fait à Jeanne fut avant tout un procès d’inquisition obéissant à des règles précises. Il s’agit donc de savoir si ses juges ont offert à Jeanne « un beau procès », comme le souhaitait son principal juge, Pierre Cauchon, ou si, inversement, le caractère politique de l’enjeu les a conduits à prendre certaines libertés par rapport à la procédure d’inquisition.” J’ajoute la conclusion de cet article:
On peut donc conclure – mais est-il vraiment possible de conclure lorsqu’il est question de Jeanne d’Arc ? – que son procès en inquisition fut un assez « beau procès », pour reprendre l’appréciation de son principal accusateur, dans le sens d’un procès formellement orthodoxe.
Je pourrais vous envoyer 36 autres liens, en tout cas les accusations contre Jeanne “hérétique”, “relapse”, “sorcière” correspondaient tout à fait à celle d’un procès d’inquisition.
Mais en fait, pourquoi a-t-on supprimé cette institution si merveilleuse qui respectait si bien l’esprit évangélique, le commandement d’aimer ses ennemis et de prier pour les bénir ? Je sais, certains argumenteront que les autodafés étaient une forme d’amour.
[C’est bien ce que j’écris : ce tribunal qui a jugé Jeanne d’Arc était illégal sur le plan inquisitorial. Et pour cause c’est un procès politique et non religieux.
Le tribunal inquisitorial comprenait normalement deux juges : l’évêque du lieu et l’inquisiteur délégué par le pape. Ils étaient assistés du promoteur, qui faisait fonction de ministère public, ainsi que de greffiers et d’huissiers. Or, le tribunal qui s’apprête à juger Jeanne présente plusieurs particularités. Le juge principal d’abord, Pierre Cauchon, n’est pas l’évêque du lieu du procès, mais celui du lieu de la capture de la prévenue. Sa désignation dans un autre diocèse que le sien a donc nécessité que le chapitre de Rouen lui accordât une concession territoriale. Il l’obtint le 28 décembre 1430, l’archevêché étant alors vacant. Première irrégularité.
Quant à l’inquisiteur nommé par le pape, Jeanne l’attend toujours, alors qu’elle l’avait réclamé…
Le procès de Jeanne d’Arc n’aurait jamais dû commencer sans la présence de son second juge. Cette absence constitue bel et bien un véritable déni de justice, suffisant pour entacher à lui seul toute la procédure d’irrégularité.
Enfin, pour terminer, cette institution n’a pas été supprimée : elle a été transformée. Elle s’appelle aujourd’hui la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Son principe est le même : défendre la vérité de la foi catholique. La CDF dénonce ainsi, encore, les hérésies propagées par certains théologiens.
MJ]
Tite
@ vendome :
On oublie toujours de dire que ce sont les protestants qui ont ouvert les hostilités. En Provence, ils jetaient les catholiques vivants dans les puits, les enfermaient dans les églises et y mettaient le feu…
Protestants = hérétiques. Le bazar dans Vatican II, c’est eux…
vigor
@Tite
Nous sommes du même avis!
AFumey
Sur l’inquisition espagnole, il est peut-être bon de préciser le contexte (cf “Al Andalus, l’invention d’un mythe” de S. Fanjul).
L’expulsion des musulmans après 1592 n’a pas unifié immédiatement le pays. Des mesures de rétorsion (piratage, pillages, rapts) se sont prolongées, facilitées par des musulmans faussement convertis au catholicisme, qui abritaient des espions et bandes armées, en vue d’actions dont souffraient cruellement les populations, et qui entravaient la reconstruction du pays.
Par exemple le montant des rachats pour rançon s’élevait à 100.000 pièces d’or par an.
C’est ce désordre chronique qui a justifié l’expulsion – dédommagée – des Morisques de Grenade.