De Guillaume de Thieulloy dans Les 4 Vérités :
"La traduction, voici quelques mois, du livre de l’économiste français Thomas Piketty « Le capital au XXIe siècle » a été un énorme succès de librairie outre-Atlantique. Mais on sait moins que ce livre, encensé par la presse « bien-pensante », a été aussi sévèrement critiqué par d’excellents économistes – et pas seulement aux États-Unis. […]
La grande thèse de Piketty est que nous assistons à une hausse des inégalités. […] Le problème, c’est que la réalité est fort éloignée de ce modèle. Tout d’abord, il est manifeste qu’un smicard peut, aujourd’hui, s’offrir un confort qui était naguère réservé aux rois et aux princes. Dans le même temps, le train de vie des « super-riches » a augmenté beaucoup moins rapidement. En d’autres termes, nous assistons plutôt à une égalisation des conditions. Mais, surtout, tout se passe comme si, pour Piketty, l’économie était statique. Or, il est faux que les « super-riches » s’enrichissent mécaniquement. Parmi les 10 personnes les plus riches du classement « Forbes » de 1987, aucune ne figurait en tête du classement 30 ans plus tard. Seuls 3 ont réussi à augmenter leur fortune (et à un rythme nettement inférieur à la croissance mondiale). Quant au n° 1 du classement de 1987, il avait perdu, 30 ans plus tard, 96 % de son patrimoine ! Nous sommes bien loin d’une économie de rentiers. D’ailleurs, les personnes les plus riches sont pratiquement toutes des entrepreneurs qui, non seulement ne volent pas leur patrimoine, mais créent de la richesse pour tout le monde. Ils prennent des risques pour s’enrichir… et nous enrichir dans le même temps.
Notre ami Bernard Zimmern développe ici son « modèle de la toile cirée », que certains lecteurs connaissent bien : la répartition des revenus peut se modéliser comme une toile cirée soulevée par un doigt. Autour du doigt, la pente est très raide et s’adoucit à mesure que l’on s’éloigne (ce qui signifie que les revenus sont effectivement très inégalitaires au – tour du plus élevé). Mais, plus le doigt soulève haut la toile, plus tous les revenus montent.
Il faut mentionner aussi une critique sévère sur les chiffres de Thomas Piketty. Plusieurs économistes, notamment américains, montrent que ses chiffres sont biaisés et même parfois inventés (là où les chiffres ne prouvent pas assez bien sa thèse, Piketty n’hésite pas à remplacer plusieurs années par une simple moyenne). Mais, même en admettant que les chiffres soient justes, il reste que, contrairement à la thèse de Piketty, il est faux que les plus riches s’enrichissent mécaniquement sans effort. Et il est surtout faux que l’accroissement de la richesse soit un danger. La réalité, c’est que nous avons besoin des riches pour investir et pour enrichir la société tout entière. La taxation mondiale que propose Piketty, aux applaudissements de l’extrême gauche mondiale, sur le revenu et sur le patrimoine des plus riches, est, en réalité, exclusivement punitive (un taux marginal de 80 % pour les revenus supérieurs à 500 000 dollars et un impôt de 5 à 10 % sur les patrimoines supérieurs à un milliard de dollars). Elle serait économiquement désastreuse (si tant est qu’il soit possible de la mettre en oeuvre, ce dont l’auteur lui-même doute). Il est bien plus efficace économiquement et plus sage politiquement d’encourager les plus modestes à devenir eux-mêmes capitalistes. Et les faire ainsi participer à la richesse globale, tout en leur donnant les moyens de leur indépendance. Il est vrai que les communisants du genre Piketty, qui veulent réaliser le « grand soir » par le matraquage fiscal, ne sont pas des grands défenseurs des libertés et de l’indépendance des plus modestes qu’ils préfèrent tranquillement asservis à l’État-providence !"