De Jean-Paul Brighelli dans Le Point :
"Être catholique n'empêche pas d'être crétin : c'est ce que l'on est amené à penser quand on constate le revirement soudain des écoles privées sous contrat, obligées d'accompagner la réforme létale voulue par Najat Vallaud-Belkacem et sa directrice de l'enseignement scolaire, Florence Robine. Non seulement il y a réduction de l'offre, moins d'heures de cours au total (contrairement à ce que serinent ces dames depuis un an qu'elles ont lancé leur machine de guerre contre l'école de la République) ; non seulement les spécificités propres de l'enseignement privé, soutien aux élèves les plus faibles et accompagnement renforcé des meilleurs, seront désormais impossibles, sauf financement autonome – c'est-à-dire payé par les parents, vaches à lait d'un ministère qui préfère payer grassement les fournisseurs d'équipements informatiques inutiles et même contre-productifs ; mais encore l'autonomie qu'on leur a fait miroiter se révèle – comme nous n'avons pas cessé de le dire – une pure illusion.
Malaise
L'Unapel, l'organisation des parents d'élèves de l'enseignement libre, avait massivement soutenu le projet du ministre – ce qui n'a pas été sans remous : les frères maristes de Lyon, par exemple, ont exprimé poliment leurs doutes, ce qui a créé un malaise parmi les parents, convaincus d'avoir été trahis par leur propre association. En octobre dernier, Pascal Balmand, secrétaire général de l'enseignement catholique, interviewé par Clotilde Hamon pour Famille chrétienne, se voulait rassurant : « Je maintiens que cette réforme comporte davantage de points intéressants que d'inconvénients. Je n'y vois pas de nivellement par le bas. Selon moi, elle apporte une approche différente de la transmission des savoirs, intéressante dans notre pays très marqué par le cloisonnement des disciplines. Je considère qu'en sortant un peu de ces grilles disciplinaires on n'altère pas la connaissance, mais on permet aux élèves d'accéder davantage au sens, à la beauté et à l'intérêt des savoirs. »
Le tas d'or de l'Unapel
Je serais parent d'élèves inscrits dans le privé, ou enseignant du privé, ou chef d'établissement privé – eux aussi commencent à mesurer l'horreur de la réforme –, je demanderais immédiatement la démission de ce monsieur, et son pèlerinage, à pied, jusqu'à Saint-Jacques (« les petits gueux vont à Saint-Michel et les grands gueux vont à Saint-Jacques », disait-on au Moyen Âge). À vrai dire, l'Unapel a une structure féodale parfaitement obscure. Les parents qui inscrivent leurs enfants dans le privé versent, souvent sans le savoir, une cotisation qui finance cette organisation, aujourd'hui assise sur un tas d'or et sur des certitudes pédagogiques aberrantes. L'argent reçu lui permet de financer, à 800 000 exemplaires, une revue, Famille Education, qui lui sert surtout à siphonner les publicités mensongères des boîtes à bac et à cours particuliers du type Acadomia. Il est temps que les parents secouent le cocotier d'une organisation où l'autoritarisme le dispute à l'incompétence, et où les médiocres cooptent les médiocres en vivant – grassement – sur l'illusion qu'ils défendent l'école libre. […]"