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Pays : Israël

“Il ne peut y avoir d’avenir fondé sur la captivité, le déplacement des Palestiniens ou la vengeance”

“Il ne peut y avoir d’avenir fondé sur la captivité, le déplacement des Palestiniens ou la vengeance”

Déclaration de Sa Béatitude Théophilos III, Patriarche grec-orthodoxe de Jérusalem, prononcée lors de l’ouverture de la conférence de presse sur la visite pastorale à Gaza, en compagnie du cardinal Pierbattista Pizzaballa, patriarche latin de Jérusalem :

Chers frères et sœurs en Christ,

Chers membres de la presse,

Que la paix soit avec vous tous, au nom de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, Celui qui « marchait parmi les malades et les affligés » et qui nous a enseigné que « tout ce que vous avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Matthieu 25, 40).

Nous sommes réunis aujourd’hui, le cœur lourd de tristesse, mais fermes dans notre foi, pour accomplir notre mission pastorale à Gaza, une terre meurtrie par des souffrances prolongées et transpercée par les cris de son peuple. Avec Sa Béatitude le cardinal Pierbattista Pizzaballa et en compagnie d’un clergé dévoué, nous sommes entrés en tant que serviteurs du Corps souffrant du Christ, marchant parmi les blessés, les endeuillés, les déplacés et les fidèles dont la dignité reste intacte malgré leur agonie.

Là, nous avons rencontré un peuple écrasé par le poids de la guerre, mais portant en lui l’image de Dieu. Parmi les murs brisés de l’église de la Sainte Famille et les cœurs blessés de ses fidèles, nous avons été témoins à la fois d’un profond chagrin et d’une espérance inébranlable. Nous nous sommes agenouillés en prière aux côtés des affligés et avons posé nos mains sur ceux qui aspiraient au réconfort, guidés par les paroles de saint Paul : « Portez les fardeaux les uns des autres, et vous accomplirez ainsi la loi du Christ » (Galates 6, 2).

La mission de l’Église en temps de dévastation est enracinée dans le ministère de la présence, de l’accompagnement de ceux qui pleurent, de la défense du caractère sacré de la vie et du témoignage de la lumière que nulle obscurité ne peut éteindre.

À la communauté internationale, nous disons : le silence face à la souffrance est une trahison de la conscience. Aux enfants de Gaza, nous affirmons : l’Église reste à vos côtés. Et à tous ceux qui exercent le pouvoir, nous faisons écho au commandement du Seigneur : « Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Matthieu 5, 9).

Comme il est écrit : « N’aimons pas en paroles et avec la langue, mais en actions et avec vérité » (1 Jean 3, 18). Que ce moment soit un appel à la conscience, et que la miséricorde de Dieu guide chaque main qui cherche à réparer ce qui a été déchiré.

Merci.

Déclaration liminaire de Sa Béatitude le cardinal Pierbattista Pizzaballa, Patriarche de Jérusalem pour les Latins, lors de la conférence de presse conjointe :

« Nous sommes affligés, mais toujours joyeux ; pauvres, mais enrichissant beaucoup ; n’ayant rien, mais possédant tout. »

(2 Corinthiens 6,10)

Chers frères et sœurs,

Le patriarche Théophile III et moi-même sommes revenus de Gaza le cœur brisé. Mais nous sommes également encouragés par le témoignage de nombreuses personnes que nous avons rencontrées.

Nous sommes entrés dans un lieu dévasté, mais aussi empreint d’une merveilleuse humanité. Nous avons marché dans la poussière des ruines, devant des bâtiments effondrés et des tentes partout : dans les cours, les ruelles, les rues et sur la plage — des tentes qui sont devenues le foyer de ceux qui ont tout perdu. Nous nous sommes tenus parmi des familles qui ont perdu le compte des jours d’exil parce qu’elles ne voient aucun horizon pour un retour. Les enfants parlaient et jouaient sans sourciller, déjà habitués au bruit des bombardements.

Et pourtant, au milieu de tout cela, nous avons rencontré quelque chose de plus profond que la destruction : la dignité de l’esprit humain qui refuse de s’éteindre. Nous avons rencontré des mères préparant à manger pour les autres, des infirmières soignant les blessures avec douceur, et des personnes de toutes confessions continuant à prier le Dieu qui voit et n’oublie jamais.

Le Christ n’est pas absent de Gaza. Il est là, crucifié dans les blessés, enseveli sous les décombres, mais présent dans chaque acte de miséricorde, chaque bougie dans l’obscurité, chaque main tendue vers ceux qui souffrent.

Nous ne sommes pas venus en tant que politiciens ou diplomates, mais en tant que pasteurs. L’Église, toute la communauté chrétienne, ne les abandonnera jamais.

Il est important de souligner et de répéter que notre mission ne s’adresse pas à un groupe spécifique, mais à tous. Nos hôpitaux, nos refuges, nos écoles, nos paroisses – Saint-Porphyre, la Sainte Famille, l’hôpital arabe Al-Ahli, Caritas – sont des lieux de rencontre et de partage pour tous : chrétiens, musulmans, croyants, sceptiques, réfugiés, enfants.

L’aide humanitaire n’est pas seulement nécessaire, elle est une question de vie ou de mort. La refuser n’est pas un retard, mais une condamnation. Chaque heure sans nourriture, sans eau, sans médicaments et sans abri cause un préjudice profond.

Nous l’avons vu : des hommes qui attendent sous le soleil pendant des heures dans l’espoir d’un simple repas. C’est une humiliation difficile à supporter quand on la voit de ses propres yeux. Elle est moralement inacceptable et injustifiable.

Nous soutenons donc le travail de tous les acteurs humanitaires — locaux et internationaux, chrétiens et musulmans, religieux et laïques — qui risquent tout pour apporter la vie dans cette mer de dévastation humaine.

Et aujourd’hui, nous élevons nos voix pour lancer un appel aux dirigeants de cette région et du monde entier : il ne peut y avoir d’avenir fondé sur la captivité, le déplacement des Palestiniens ou la vengeance. Il doit y avoir un moyen de restaurer la vie, la dignité et toute l’humanité perdue. Nous faisons nôtres les paroles du pape Léon XIV prononcées dimanche dernier lors de l’Angélus :

« Je renouvelle mon appel à la communauté internationale pour qu’elle respecte le droit humanitaire et son obligation de protéger les civils, ainsi que l’interdiction des punitions collectives, de l’usage indiscriminé de la force et du déplacement forcé de la population. »

Il est temps de mettre fin à cette absurdité, de mettre fin à la guerre et de faire du bien commun des peuples la priorité absolue.

Nous prions et appelons à la libération de toutes les personnes privées de liberté, au retour des disparus et des otages, et à la guérison des familles qui souffrent depuis longtemps de tous les côtés.

Lorsque cette guerre sera terminée, nous aurons un long chemin à parcourir pour entamer le processus de guérison et de réconciliation entre le peuple palestinien et le peuple israélien, après les trop nombreuses blessures que cette guerre a causées dans la vie d’un trop grand nombre : une réconciliation authentique, douloureuse et courageuse. Sans oublier, mais en pardonnant. Sans effacer les blessures, mais en les transformant en sagesse. Seule une telle voie peut rendre la paix possible, non seulement sur le plan politique, mais aussi sur le plan humain.

En tant que bergers de l’Église en Terre Sainte, nous renouvelons notre engagement en faveur d’une paix juste, d’une dignité inconditionnelle et d’un amour qui transcende toutes les frontières.

Ne faisons pas de la paix un slogan, alors que la guerre reste le pain quotidien des pauvres.

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