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Valeurs chrétiennes : Famille

Inceste : menace sur la définition de la famille

De Mélina Douchy-Oudot, Professeur à l’Université du Sud Toulon-Var :

"La notion de famille est aujourd’hui controversée. Si, de façon traditionnelle, la famille se définit en rapport avec la potentialité de la faculté d’engendrement, dans le cadre d’une union stable, le mariage d’un homme et d’une femme qui se sont engagés « à fonder » une famille, le droit lui tend à reconnaître une pluralité de modèles de couples – mariage, concubinage, pacte civil de solidarité – sans préciser pour autant s’il s’agit de pluralité de modèles familiaux. Que faut-il entendre par famille ?

Opérant un premier glissement par la voie procédurale, la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 dite d’allégement des procédures et de simplification du droit ainsi que le décret n° 2009-1591 17 décembre 2009 ont donné pour nouvelles compétences juridictionnelles à celui que le droit désigne comme « juge aux affaires familiales » la liquidation des indivisions entre partenaires d’un pacte civil de solidarité ou entre concubins.

Deux décisions récentes sur « QPC » du Conseil constitutionnel alimentent le débat portant sur le point de savoir ce qu’est une famille, qui est membre d’une famille et qu’est-ce qui faut entendre par lien familial. Rappelons que la « QPC » ou question prioritaire de constitutionnalité est un mode de saisine nouveau du Conseil constitutionnel, en vigueur depuis 2010, laissé aux citoyens qui prétendent qu’une règle de droit porte atteinte à leurs droits ou libertés fondamentaux. La voie d’accès à la notion de famille est, dans ces décisions, non plus procédurale mais pénale.

La loi n° 2010-121 du 8 février 2010 tendant à inscrire l’inceste commis sur les mineurs dans le code pénal a institué la qualification pénale « d’actes incestueux.» Les atteintes sexuelles sur mineur, aux termes de l'article 227-27-2 du code pénal, « sont qualifiées d'incestueuses lorsqu'elles sont commises au sein de la famille sur la personne d'un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s'il s'agit d'un concubin d'un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait ». Le 16 décembre 2011, le Conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité par laquelle il est soutenu « qu’en ne définissant pas les liens familiaux qui conduisent à ce que des atteintes sexuelles soient qualifiés d'incestueuses, ces dispositions portent atteinte au principe de légalité des délits et des peines ». L’analyse juridique est imparable ainsi que le relève le Conseil, dans sa décision du 17 février 2012 (n° 2012-222 QPC), « le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité des délits et des peines qui résulte de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis ». La conclusion est donc sans surprise, d’autant plus que le Conseil avait déjà eu à statuer sur une disposition légale relative à l’inceste il y a moins de six mois (Décision QPC n° 2011-163 QPC du 16 septembre 2011), « l'abrogation de l'article 227-27-2 du code pénal prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'à compter de cette date, aucune condamnation ne peut retenir la qualification de délit « incestueux » prévue par cet article ; que, lorsque l'affaire a été définitivement jugée à cette date, la mention de cette qualification ne peut plus figurer au casier judiciaire ».

A l’occasion de la réforme de la loi sur l’inceste rendue nécessaire par ces décisions, le législateur sera conduit à définir ce qu’il faut entendre par « membre de la famille » et ce faisant pourrait, non par la voie royale du droit des personnes et de la famille, mais par celle du droit pénal, donner une définition moderne, renouvelée et radicalement nominaliste du lien familial et de ce qu’est une famille. Qui pourrait, en effet, s’opposer à une définition large et compréhensive de la famille dès lors qu’il s’agit de protéger les enfants des atteintes commises par les personnes avec lesquelles ils vivent ? Restons vigilant !"

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4 commentaires

  1. Bravo Mélina Trés interressant juste et pertinant

  2. Il est évident que les remariages et concubinages augmentent considérablement les risques d’inceste en établissant un escalier de passage entre l’inceste absolu (consanguin) et le fait de goûter à l’amant (plus ou moins provisoire) de sa mère, etc.
    Ceci ne fait qu’accélérer la dégradation des mœurs et de ce qui reste de la famille, et bien évidemment, le législateur suivra (voire incitera…)

  3. Notre soi-disant “civilisation” va faire éclater, par son immoralité, le tabou fondateur de l’inceste, qui marque l’homme depuis toujours… difficile d’aller plus bas; ah! si! on pourrait cesser d’enterrer les morts.

  4. @marie laure.
    Je suis choquée par votre expression.
    “le fait de goûter à l’amant (plus ou moins provisoire) de sa mère”.
    Ce sont toujours les amants de la mère qui sautent sur les enfants et non le contraire. Arrêtons de diaboliser les enfants que l’on détruit.

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