De la Petite Feuille Verte :
Nayla Tabbara, Zeina El-Tibi et Asma Lamrabet constatent la stagnation et le déclin de la condition féminine en Islam, mais elles refusent d’en imputer la responsabilité aux textes fondamentaux de cette religion.
HOMME ET FEMME : MÊMES DROITS, MÊMES DEVOIRS ?
N. Tabbara : « Si l’on prend la peine de revenir aux sources de l’islam, on constate que le Coran s’adresse aussi aux femmes à une époque et dans un contexte où elles avaient rarement une voix » (L’islam pensé par une femme, Bayard, 2018, p. 88). L’auteur cite un verset coranique où Dieu parle « aux croyants et aux croyantes » en énumérant les pratiques vertueuses qui vaudront à chacun « un pardon et une récompense sans limites » (33, 35). Sur ce plan, il y a effectivement égalité entre hommes et femmes, les uns et les autres étant appelés à « gagner » le paradis (cf. aussi Coran 4, 124 ; 9, 72 ; 16, 97).
Cependant, souligne l’islamologue libanais Ghassan Ascha, la description coranique du paradis réserve les jouissances sexuelles aux seuls hommes qui y disposeront de « houris ». Il cite plusieurs versets explicites sur ce thème (78, 31-33 ; 40, 54-58 et 70-74 ; 56, 10-22 et 35-38 ; 52, 19-20 ; 37, 48-49 ; 44, 51-55 ; 38, 49-53 ; 2, 25 ; 3, 15 et 4, 57). Mais rien n’est prévu dans ce domaine pour les femmes qui accèderont au paradis. Cet auteur mentionne aussi un hadîth attribué à Mahomet, selon lequel « l’enfer est surtout peuplé de femmes » (Du statut inférieur de la femme en Islam, L’Harmattan, 1987, p. 31-33).
Qui sont les houris ? « Au sein de l’exégèse classique, on trouve une pléthore de représentations fantasmagoriques des hûr décrites comme des femmes belles, chastes et jeunes, dont la seule fonction est l’accouplement continuel avec des hommes venus au paradis dans le seul but d’avoir des relations sexuelles éternelles » (A. Lamrabet, Islam et femmes. Les questions qui fâchent, Gallimard, 2017, p. 125-129).
Peut-on dès lors approuver Z. El-Tibi lorsqu’elle écrit : « Aucune religion ne s’est préoccupée de la femme et ne lui a donné autant d’importance que l’Islam » (La condition de la femme musulmane, Cerf, 2021, p. 46) ? Ou encore : « Le Coran fait l’éloge de nombreuses personnalités féminines » (ibid., p. 51) ? Comment comprendre alors la marginalisation des femmes dans le texte sacré de l’islam ?