Pierre Meurin est Président des Jeunes Pour la France. Cette tribune est son engagement personnel, qui n'engage pas le MPF dans son ensemble :
"« Une querelle entre des épiciers, des comptables, des grossistes, des épiciers » : ainsi qualifiée par Philippe de Villiers, la primaire « de la droite et du centre » apparaît comme le degré zéro de la politique. Et franchement, comment donner tort à l’ancien Président du Conseil Général de Vendée ? Cette anglo-saxonisation de notre démocratie, sorte d’opération survie d’un système partisan sclérosé, donne lieu à un spectacle qui ne laisse pas de nous affliger.
Tous les candidats à l’élection primaire rivalisent d’emphases pour tenter de convaincre qu’ils réussiront demain là où ils ont lamentablement échoué hier. Mais ils brillent surtout par leurs disputes de cours d’écoles pour tenter de masquer leurs responsabilités respectives dans l’impéritie sarkozyste (nivellement de la souveraineté de la France ; politique étrangère criminelle en Lybie ; abaissement de l’Etat régalien ; matraquage fiscal…). A défaut de pouvoir revêtir correctement le costume présidentiel, ils incarnent assez bien « les esprits amateurs de factions et nourris aux intrigues, qui ne sont ni de condition ni de mérite pour avoir part aux affaires » que fustigeait le grand Cardinal de Richelieu.
Formellement, sept candidats concourent à cette élection ; matériellement, ils ne sont que deux : l’ancien gouvernement Sarkozy contre Jean-Frédéric Poisson, seul à être exempt de tout reproche politique et moral. Ses adversaires ne s’y sont d’ailleurs pas trompé, en essayant de l’enfermer dans une polémique psychopathologique (les « lobbies sionistes ») dont les politiques et les médias ont le secret. Dans son dernier livre, Patrick Buisson note, non sans humour, que « la démonologie a ceci de commode qu’elle remplace le débat par l’exorcisme ».
L’ancien gouvernement Sarkozy est composé de ceux que Richelieu appelait encore « les princes de partialité qui troublent le corps de l’Etat ». L’Eminent Ministre de Louis XIII, qui aurait décidément pu être un chroniqueur politique de grand talent de nos jours, estime qu’ « il est certain qu’un homme de grande probité aura beaucoup plus de peine à subsister dans un siècle corrompu par tels gens (les princes de partialité) que celui duquel ils ne craindront pas la vertu pour n’être pas d’une réputation si entière ».
Cette analyse politique du XVIIème siècle nous percute par son actualité : à l’heure où la chose publique est prise à partie par des gestionnaires d’intérêts particuliers, il est pour le moins iconoclaste de vouloir lui réinjecter son essence : la mise en œuvre prudente mais zélée du bien commun dans la Cité.
Nous comprenons mieux, à la lumière de la démonstration du Cardinal, pourquoi un homme comme Philippe de Villiers qui a tant fait pour la Vendée ; qui a créé le Puy du Fou, cette œuvre louée à travers le monde et rayonnante de la richesse de notre histoire de France ; qui a anticipé dans toutes ses dimensions la folie sociale qui frappe notre Pays de plein fouet, n’a jamais eu les faveurs du système politico-médiatique, lequel a fait l’objet depuis quarante ans d’une OPA orchestrée par les susnommés « princes de partialité ».
Dans le contexte de la primaire – dite – de la droite et du centre, un nouvel iconoclaste attaché au bien commun a émergé ; c’est le second candidat : Jean-Frédéric Poisson.
Docteur en philosophie, l’homme ne goûte que peu la surenchère quotidienne de diatribes spectaculaires dans lesquelles ses concurrents, drogués au média training, excellent. Il s’est attiré la sympathie populaire en affichant sa solidité intellectuelle, sa constance et sa cohérence ; tout autant que par son refus de jouer dans le bac à sable de ses adversaires.
Il est bien connu que « la forme reflète le fond » ; cela semble applicable au cas d’espèce, car l’humilité de l’homme est le reflet d’une vision civilisationnelle à la consistance bienvenue en notre époque de grande sécheresse intellectuelle.
Jean-Frédéric Poisson a surpris tout le monde en étant tout à la fois opposé à l’internement administratif des « Fichés S », opposé au nivellement du Code du travail, défenseur des syndicats, réfractaire à l’état d’urgence ; mais pour autant souverainiste, opposé au multiculturalisme, chantre de la primauté culturelle de la religion catholique en France et critique de l’ « Islam tout court ». Inclassable selon le logiciel politique actuel. De gauche sur le plan économique et d’extrême droite sur l’identité et l’Europe.
Au-delà de l’étonnement, ceci est toutefois parfaitement logique : Jean-Frédéric Poisson n’est ni de gauche pour ses positions économiques, ni d’extrême droite sur l’idée qu’il porte de la civilisation française : il est simplement de droite, la droite la plus pure dans sa cohérence doctrinale : la droite – dite – légitimiste selon la classification contestable de René Rémond ; la droite essentielle par opposition aux « droites » situationnelles idéologiquement libérale pour l’une (orléaniste) ou jacobine et césariste pour l’autre (bonapartiste).
Les publicistes et hommes politiques contre-révolutionnaires et légitimistes qui se sont distingués, lors des grands bouleversements politiques et sociaux des XVIIIème et XIXème siècle (révolutions institutionnelles et révolutions industrielles), étaient les premiers, pour faire face à la déshérence morale des élites capitalistes, à proposer des mesures sociales en faveur des plus faibles. Ces hommes représentaient le courant du catholicisme social.
Jean-Frédéric Poisson est de cette trempe là ; il n’est pas vraiment un démocrate-chrétien.
Il rompt avec l’économisme et le scientisme, ces deux sous-idéologies d’un matérialisme déshumanisant, lequel demeure le paradigme commun de la « droite » libérale, de la gauche libertaire et de la gauche marxiste, idéologies pour lesquelles la matière est finalité et modalité (la croissance, le pouvoir d’achat, la dette…).
Au fond, sa pensée pourrait se résumer par ce mot du Philosophe Joseph Droz, cité par Alban de Villeneuve Bargemont dans son remarquable « Traité d’économie politique chrétienne » (1834) :
« On dénature cette science (la science des richesses) si l’on ne considère les richesses qu’en elles-mêmes et pour elles-mêmes. A force d’attacher ses regards sur leur formation et sur leur consommation, on finit par ne plus voir dans ce monde que des objets mercantiles ».
Cette phrase explicite à elle-seule le clivage abyssal entre Jean-Frédéric Poisson et ses adversaires. Le Président du – à notre sens – mal nommé Parti Chrétien Démocrate renverse la perspective actuelle du débat public en faisant primer la communauté politique, dont l’humain est le premier matériau avec son besoin de transcendance et d’enracinement, sur la tyrannie des chiffres de la dette, de la croissance etc… Il démontre que le clivage entre politique de l’offre et politique de la demande n’en est pas un, puisque l’une comme l’autre procèdent de cet économisme qui réduit l’homme à un producteur-consommateur.
Jean-Frédéric Poisson reconnaît l’existence de la Loi naturelle, ce qui le conduit à être le seul candidat à promettre l’abrogation du mariage homosexuel ; également à souhaiter faire de la baisse massive du nombre d’avortements « un objectif de santé publique » ; à faire droit à ce besoin d’identité des Français, apeurés à l’idée de devoir disparaître en tant que Peuple ; à défendre les deux droits inaliénables dudit Peuple que sont « le droit à la continuité historique, le droit de cultiver ses richesses anthropologiques » selon le mot de Philippe de Villiers ; à défendre la souveraineté de la France.
Le fil conducteur de son projet consiste à mettre fin au contre-héritage de mai 1968, prolongement, en réalité, de la Révolution Française, laquelle a enfanté la lutte des classes (le Tiers-état théorisé par Sieyès contre les privilégiés du Clergé et de la Noblesse), lutte des classes aujourd’hui pluri-catégorielle (les patrons contre les travailleurs ; les homosexuels contre les hétérosexuels ; les immigrés contre les autochtones etc…). Mai 1968 a par ailleurs engendré une génération déracinée qui revendique « naître sans héritage, grandir sans apanage, mourir sans lignage », ainsi que le résume à nouveau Philippe de Villiers. Jean-Frédéric Poisson, comme le fondateur du Mouvement Pour la France, veut déconstruire cette philosophie du néant.
A « droite », on lui reproche de défendre les syndicats. Mais il ne défend pas l’esprit de classe de la CGT, FO, du MEDEF et consorts ; il estime, à l’instar des publicistes du catholicisme social évoqué plus haut, que l’économie doit être humaine et non seulement matérielle. Cela signifie que pour que l’économie tourne bien, il convient de revenir à l’ « esprit d’association » (contre l’esprit de classe) dans toutes les structures productives ; esprit d’association qui prévalait avant que le Décret d’Allarde (2 et 17 mars 1791) et la Loi Le Chapelier (14 juin 1791) ne suppriment purement et simplement les corporations de métiers, et ne détruisent par voie de conséquence le lien social qui unissait tous les chaînons hiérarchiques dans chaque secteur d’activité.
Jean-Frédéric Poisson réfute cette économie de classes, post-marxiste, dans laquelle s’opposent les intérêts du MEDEF à ceux de la CGT, et qui a pour conséquence la paralysie chronique de notre économie, alors que tous ces acteurs devraient s’associer pour mettre en œuvre un « bien commun économique ».
L’exemple économique nous a paru emblématique de la pensée du candidat. Mais sa cohérence doctrinale étant démontrée, il nous appartient de l’encourager, car il est de la trempe de ces rares hommes publics qui ont le courage d’affirmer haut et fort, à la suite de Gustave Thibon qu’ « être dans le vent, c’est l’ambition d’une feuille morte ». En quelque sorte, Jean-Frédéric Poisson est l’une des « lucioles » de résistance chères à Philippe de Villiers."