Cardiologue et professeur né à Paris à la veille du second conflit mondial, Jean-Pierre Cousteau confie dans Fils de collabos, neveu de résistant ses souvenirs et réflexions. Plongée dès l’enfance au coeur des tribulations de la guerre et de l’Épuration, sa vie reflète les ombres et les lumières d’une époque oubliée où « les Français ne s’aimaient pas ». Fils de Pierre-Antoine Cousteau, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Je suis partout, condamné à la Libération pour intelligence avec l’ennemi, neveu chéri du commandant Jacques-Yves Cousteau, résistant de la première heure dont il fut le médecin et confident jusqu’à sa mort, Jean-Pierre Cousteau a le caractère d’un battant et le verbe incisif. Sans doute parce qu’il vécut la longue séparation du père, la pension anglaise et ses châtiments, Juilly et ses « humanités » forcées, la mort d’une mère alors qu’à peine adolescent, puis plus heureusement la passion médicale et l’affection et la protection de l’oncle providentiel. Par delà une étonnante carrière médicale achevée dans les coulisses de Roland-Garros, Jean-Pierre Cousteau témoigne ici des riches amitiés littéraires de son père autant que de l’odyssée des profondeurs de son oncle à bord de la Calypso au fil des océans lointains.
Il rend hommage à son oncle, le Commandant Cousteau, mondialement connu et pourtant très vite oublié :
Car cet homme fut remarquable.
Remarquable pour son frère dans les coups durs, les mauvais moments, mais moins présent, sûrement, avec le temps – ce que PAC [Pierre-Antoine Cousteau] lui reprocha – les années de détention devenant routine et sa gloire chronophage : il risqua sa carrière, voire davantage (rien que ça !) une première fois en lui rendant incognito, en secret de ses supérieurs, visite en Autriche en 1945 pour lui proposer de faux papiers et évasion, une deuxième fois en déposant à décharge au procès, en uniforme, toutes décorations au vent alors que ses supérieurs le lui avaient interdit (De Gaulle, qui n’avais pas la mémoire courte et la rancune bien tenace, ne le lui pardonna jamais et si Jacques-Yves fut par la suite bloqué dans son avancement dans l’ordre de la Royale, c’en fut la raison – excellent raison puisque mesquinement “verrouillé” dans l’attribution des galons, il quitta la Marine pour créer l’odyssée Calypso). Puis il nous accueillit à Sanary, ma soeur et moi, après la fuite de nos parents. Plus tard il fut mon subrogé tuteur, me considéra comme son fils, me fit participer à l’épopée Calypso et subvint à mes besoins jusqu’à ce que je fut nommé à l’Internat.
Remarquable par sa carrière. On se rappelle l’éblouissement de la découverte en 1956 du Monde du silence au festival de Cannes, dont le jury attribua, c’était une révolution, la palme d’or à un documentaire, puis dans un deuxième temps, après celui de la découvert des fonds marins, celui de la sauvegarde de la mer, enfin, troisième étape, de la planète, “écologiste” avant la lettre – et surtout sans connotation politique ! – c’est de sa bouche que j’ai entendu pour la première fois prononcer “générations futures”, aujourd’hui servi à toutes les sauces. […]
Comme c’était un être supérieur, il est aujourd’hui en France oublié, ou mieux vilipendé. […] Cherchez une rue Jacques-Yves Cousteau à Paris. Vous n’en trouverez pas. Or il fur le Français le plus connu au monde (et le Français préféré des Français – ce qui je l’avoue n’est pas forcément une référence).