La question se pose aux Etats-Unis, comme l’explique Christian Daisug dans Présent :
[…] Dès qu’il se trouve devant un micro, ses yeux suivent fiévreusement le téléprompteur, mais lorsqu’il doit affronter sans filet la presse, c’est la panique parmi ses conseillers. A 78 ans, le plus âgé des locataires de la Maison-Blanche semble vouloir devenir le spécialiste de la lourde gaffe et du trou de mémoire. En visite en Californie, il salua dans une allocution le gouverneur de l’Orégon et lorsqu’il eut l’occasion d’évoquer le souvenir de son fils aîné mort à 46 ans, il rappela qu’il servit sous les drapeaux en Afghanistan, alors que c’était en Irak.
Un dispositif spécial a été installé sur le micro baladeur du 46e président afin de permettre à ceux chargés de le surveiller en permanence de couper aussitôt le son dès qu’un fâcheux incident s’annonce. Le système fonctionne assez bien. Un journaliste lui demanda des explications sur le sanglant chaos de Kaboul. On entendit la question mais pas la réponse : Biden ouvrit plusieurs fois la bouche devant un appareil muet. Le même scénario – en plus radical – se déroula pour l’ouragan Ida qui ravagea la Nouvelle-Orléans. Les médias voulurent savoir comment allaient s’organiser les secours. Biden empoigna inutilement son micro : Jen Psaki, porte-parole de la Maison-Blanche, l’avait devancé en annonçant que le président ne répondrait à aucune question. Un sondage récent montre que 59 % des Américains (dont près de la moitié s’identifiant comme démocrates) pensent que celui qui est censé les diriger « bataille contre les premiers symptômes de la démence ». Un diagnostic que confirme Carole Lieberman, psychiatre près de Los Angeles. « Les signes sont révélateurs, explique-t-elle : mémoire défaillante, propos incohérents, impulsions incontrôlées et irritabilité maladive. »
Pour l’instant, les démocrates ne bougent pas. Ils endurent sans émotion apparente ni calculs politiciens l’épreuve nationale que constitue la perte irréversible des facultés intellectuelles de l’homme qui fut leur champion. Seuls quatorze élus républicains s’agitent et tentent de maintenir l’événement sur le devant de la scène. Que peuvent-ils entreprendre de concret ? « Exiger des proches de Biden qu’ils l’obligent à démissionner », suggère Ronny Jackson, député du Texas. « Autre solution : appliquer le 25e amendement constitutionnel. » Cet amendement fut voté par le Congrès et ratifié par les 50 Etats en 1967, soit quatre ans après l’assassinat de John Kennedy.
Le drame de Dallas servit d’étincelle à l’intégration de quatre paragraphes supplémentaires aux articles du texte fondateur. L’un de ces paragraphes spécifie que le président peut être dépossédé de ses fonctions si un handicap physique ou mental ne lui permet plus de les assumer. Dans ce cas, le vice-président en exercice est tenu d’aviser par lettre le président du Sénat et le speaker de la Chambre que le chef de l’Etat doit cesser de l’être. Simple formalité qui permet à celui ou celle – en l’occurence, ce serait Kamala Harris – qui attendait dans les coulisses de sortir de l’ombre du second personnage pour entrer dans la lumière du premier. Jusqu’en 1967, toutes ces dispositions prévues pour faire face à l’exception médicale n’existaient pas. La seule façon de se débarrasser d’un président était de le destituer pour faute grave. Les troubles psychiques n’entraient pas en ligne de compte.
C’est un éditorialiste célèbre à l’époque, James Reston, qui, le lendemain de la mort de Kennedy, posa cette question : et si le président, au lieu de succomber sous la gravité de ses blessures, leur avait survécu ? Impotent, grabataire, mais vivant. Ou plutôt survivant mais trop faible pour gouverner. Il est là, le défi qui nous aurait été lancé. Rien n’est prévu. Les droits d’un président durent autant que sa vie. Mais quelle vie ? La réponse fut le 25e amendement. On comprend que les démocrates hésitent à l’utiliser. Trois raisons. Biden représente la victoire de la gauche sur la réaction national-populiste et cela compte pour les anti-Trump. Un changement à la tête de l’Etat à quelques mois d’élections législatives cruciales risquerait de troubler la clientèle du parti démocrate. Enfin, l’impopularité de l’arrogante et gauchiste Harris perturbe les stratèges globalistes, qui se retrouvent pris entre un demi-fou et une furieuse exaltée.