Ceci n’est pas une blague : on peut lire dans un rapport du Sénat de novembre 2004 :
"il existe un niveau du chômage en dessous duquel apparaissent des tensions sur le marché du travail, des difficultés de recrutement et donc des revendications qui tendent à accélérer l’évolution des salaires et des prix ; ce niveau de chômage « accélérateur d’inflation » est actuellement estimé pour la France par la plupart des institutions économiques (OCDE ou Direction de la prévision) autour de 9 %. Donc, en première analyse, on pourrait craindre que le passage du chômage effectif en dessous de ce seuil n’entraîne des tensions inflationnistes".
Ce fameux niveau de chômage qu’il faudrait maintenir pour éviter l’inflation a été dénommé NAIRU (Non-Accelerating Inflation Rate of Unemployment – taux de chômage n’accélérant pas l’inflation). Cette théorie, certains y croient dur comme fer, comme ce conseiller d’Alain Juppé, alors Premier ministre, qui déclarait en 1995 :
"Dans la conjoncture actuelle, il n’y a que la pression du chômage qui évite une embardée sociale. Une amélioration sur le terrain de l’emploi entraînerait fatalement une pression salariale que le pays ne peut se payer".
Les chomeurs apprécieront. Dans un communiqué, Jean-Marie Le Pen affirme que le nouveau président du FMI, Dominique Strauss-Khan, a enseigné ce concept, ce qui évidemment, laisse planer des doutes quant à sa réelle volonté de favoriser l’emploi.
Le Compendium de la doctrine sociale de l’Eglise condamne sans équivoque cette théorie (§288):
"Le travail est un bien de tous, qui doit être disponible pour tous ceux qui en sont capables. Le « plein emploi » est donc un objectif nécessaire pour tout système économique tendant à la justice et au bien commun. Une société dans laquelle le droit au travail est déprécié ou systématiquement nié et où les mesures de politique économique ne permettent pas aux travailleurs d’atteindre des niveaux d’emploi satisfaisants, « ne peut ni obtenir sa légitimation éthique ni assurer la paix sociale ». Un rôle important et donc une responsabilité spécifique et grave incombent, dans ce domaine, à « l’employeur indirect », à savoir aux sujets — personnes ou institutions de toutes sortes — qui sont en mesure d’orienter, au niveau national ou international, la politique du travail et de l’économie."