Extrait d’un article des Echos consacré au vin et notamment au vin de messe :
[…] Meursault, la Bourgogne et ses clos, celliers, granges, abbayes et hospices, terre bénie de la viticulture. L’histoire des climats est pleinement liée à celle de l’Eglise et des ordres religieux bénédictins et cisterciens. Partout en France, chaque monastère, chaque évêché, a planté des vignes pour satisfaire à ses besoins liturgiques, et produit bien au-delà. La carte de notre patrimoine bachique doit ainsi beaucoup à la chrétienté. Prenez et buvez-en tous… Bienheureuses sont les paroisses des régions viticoles, où la providence transfère parfois des bouteilles des chais aux sacristies sous forme de dons, comme c’est la tradition dans la paroisse de Sancerre. À l’abbaye du Barroux, en Provence, le paradoxe est que les vins des moines vignerons ne sont pas destinés à l’Eucharistie célébrée en son sein – un généreux donateur les leur fournit – mais sont commercialisés sur la boutique et en ligne.
Le plus souvent, les paroisses achètent selon leurs besoins et leurs moyens aux producteurs locaux, religieux ou pas, ou dans les catalogues des fournisseurs spécialisés en articles liturgiques (par exemple, Holyart, leader européen) qui affichent des vins nationaux ou internationaux, Bordeaux (pas les plus chers), Espagne, Italie…, entre 7 et 10 euros. Martinez, producteur de marsala en Sicile, est l’un des grands fabricants de vins de messe (issus de cépages locaux, certifiés par le diocèse) vendus partout dans le monde.
Spécialiste et leader sur le marché américain, le californien Cribari Altar Wines. Ironie de l’histoire, les vignobles de la Napa Valley ont survécu à la prohibition par la multiplication des vins de messe, les seuls alors autorisés. Leur consommation augmenta en flèche, pas seulement motivée par la piété… Que diable buvait-on dans les speakeasy ? Au Québec, un vilain trafic a abouti à ce que désormais les religieux se fournissent exclusivement auprès de la Société des alcools (SAQ) parmi onze vins approuvés par l’assemblée des évêques catholiques du pays. Quatre sont français : le Naturae Chardonnay de Gérard Bertrand, le muscadet Voyage Extraordinaire de Lieubeau, le Côtes du Roussillon Marie Gabrielle du Domaine Cazes, et les Premières Grives Côtes de Gascogne du domaine Tariquet. Loué soit le bon goût.
Quels que soient les chemins qui les mènent à la sacristie, tous les vins de messe sont régis par le canon 924 : « Le saint sacrifice eucharistique doit être célébré avec du vin naturel de raisins, pur et non corrompu, sans mélange de substances étrangères. […] Il faut prendre soin de [le] conserver en parfait état […] Il est absolument interdit d’utiliser du vin dont l’authenticité et la provenance seraient douteuses. » En 2017, le préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, au Saint-Siège, a rappelé aux évêques « qu’il leur appartient de pourvoir dignement à ce qui est nécessaire pour la célébration de la Cène du Seigneur […], et de veiller sur la qualité du pain et du vin destinés à l’Eucharistie ». Y aurait-il eu des tripatouillages peu catholiques des « matières » ? Si les communautés religieuses qui les confectionnent sont absoutes de tout soupçon, ce que l’on trouve dans les magasins ou en ligne est-il toujours bien valide ? Aux religieux de s’en assurer, CQFD. […]
Pitch
Un petit coup de pied de l’âne, au passage, au monastère du Barroux, accusé de s’enrichir avec sa production de vin pendant qu’un “généreux donateur” le régale en vin de messe…
Ce qu’il y a de bien avec la grosse presse, c’est qu’on n’est jamais déçu.
nicole2
La Règle de saint Benoît, chapitre 40 : ‘nous croyons qu’une hémine de vin suffit à chacun pour la journée”
(elle équivalait probablement à un quart de litre).