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Valeurs chrétiennes : Education

La filière des « Humanités » : une nouvelle programmation culturelle

La filière des « Humanités » : une nouvelle programmation culturelle

Marion Duvauchel, Professeur de lettres et de philosophie, explique longuement en quoi cette réforme est mauvaise :

C’est l’été : il faut sauver la planète… Il fait 22 degrés au Groenland, les eskimos mangent des crèmes glacées, la fonte des glaces est notre faute à tous : moyennant quoi Greta Thunberg est venue haranguer les députés sur le réchauffement climatique et on a interdit l’usage des pailles dans les boissons fraîches. Au Congo, les milices de toute obédience violent les femmes pour détruire les communautés et s’emparer des terres riches en coltan. Un médecin les soigne et les recoud. Il a reçu le prix Nobel. Il le méritait amplement contrairement à bien d’autres, Obama le premier. La presse éclairée s’est effarouchée parce que Donald Trump n’a pas reconnu la jeune Yezidi, l’autre prix Nobel. Peut-être le président américain ne connaît-il que le médecin qui continue de recoudre les femmes violées au fond du Congo, sous haute protection? Sur TF1, M. Jean-Pierre Pernod montre avec un sourire désarmant les villages sauvés grâce à Villages de France. Et pendant que le petit peuple, les enseignants, les parents d’élèves et les responsables d’associations familiales sont sur les plages ou à la montagne, ou dans des séjours écolos dans les hauts plateaux du Laos, là où on vit dans les arbres et où on se déplace comme Tarzan, on a publié dans le BO les nouveaux programmes. Ils sont donc officiels. Et ils sont à tomber à la renverse.

Le niveau lycée impliquait comme prérequis la maîtrise de la langue française. Les instructions officielles nouvelles ont réintroduit des points de langue et de grammaire (dont certains du niveau de la classe de quatrième), preuve formelle et accablante de l’effondrement du niveau. Dans ce socle commun de classe de seconde, le français est désormais sur même plan que les arts du cirque. Les arts du cirque, c’est comme l’opéra ou la musique rock. On a le droit d’aimer ou de ne pas aimer. Avec tout le respect que j’ai pour Achille Zavatta, j’ai encore l’idée désuète que certaines disciplines sont comme certains ministères : régaliennes. Et que la maîtrise de langue française en tant qu’elle est encore une langue de culture est une matière régalienne. L’époque est au renversement de toutes les hiérarchies, c’est très nietzschéen, très « post-moderne », et totalement stupide, car comme l’avait vu Nietzche avec perspicacité, juste avant de devenir fou, les hiérarchies se reconstituent ailleurs et autrement. Le plus souvent avec encore plus de férocité, comme les périodes de Terreur nous en fournissent la preuve désolante et sanglante.

En classe de première et de terminale, les « Humanités » constituent donc une des spécialités désormais proposées aux lycéens et elle remplace la filière L.

Les objectifs en sont clairement formulés : il s’agit de

« contribuer au développement des compétences orales à travers notamment la pratique de l’argumentation. Celle-ci conduit à préciser sa pensée et à expliciter son raisonnement de manière à convaincre. Elle permet à chacun de faire évoluer sa pensée, jusqu’à la remettre en cause si nécessaire, pour accéder progressivement à la vérité par la preuve ».

Depuis quand la preuve d’une vérité est elle fournie par une sorte d’auto régulation de la pensée dans le cadre d’un dialogue enchanté au sein d’une classe d’adolescents nourris d’images télévisées, de cancans des people et de jeux informatiques ? Qui peut gober que dans des classes de trente élèves, le merveilleux dialogue socratique qui semble l’horizon transcendantal de cet objectif dément, a une quelconque chance de se voir réalisé. Tous les enseignants qui s’y sont essayé ont très vite repris leurs esprits. Il suffit de voir le modèle de ce type de dialogue sur les plateaux de télévision. Soit ils sont tous d’accord et se chamaillent avec politesse sur des points de détail (type : C’est dans l’air, ou sur Arte), soit ils s’insultent ou en viennent aux mains. Quant à celui qui a en charge la régulation et la distribution de la parole, l’usage de couper la parole avec grossièreté est devenue une coutume de cette presse qui a fait de l’absence de courtoisie une sorte de loi du journalisme.

Si on ne l’a pas compris, je le dis : la filière ou spécialité Humanités est un cadre destiné à la rééducation des esprits récalcitrants ou déviants par rapport aux normes toutes puissantes et aux dogmes nouveaux de la République laïque.

L’analyse des contenus proposés suffit à s’en convaincre. Ils « se répartissent en quatre semestres, chacun centré sur une grande  thématique ».

En classe de Première, au premier semestre, ce sont les pouvoirs de la parole (Période de référence : De l’Antiquité à l’Âge classique).

La sèche phraséologie blanquérienne propose quelques développements :

L’art de la parole (Les arts et les techniques qui visent à la maîtrise de la parole publique dans des contextes variés, notamment judiciaires et politiques, artistiques et intellectuels) – L’autorité de la parole (les formes de pouvoir et d’autorité associées à la parole sous ses formes diverses). Les séductions de la parole (la variété de ses effets : persuader, plaire et émouvoir).

C’est réduire la parole humaine à sa seule dimension pragmatique et instrumentale, et donc en dénaturer le sens et en faire de la poussière. Toute l’histoire de la parole poétique rappelle l’interrogation profonde des sociétés sur la nature de la parole et du langage. La philosophie antique manifeste la plus grande prudence, la plus grande réserve et des réticences plus profondes encore envers la dialectique et la sophistique, que d’ailleurs elle distingue avec soin. La philosophie moderne a même inventé un mot nouveau pour désigner un aspect inhabituel de la parole « argumentative » : la  « phraséologie », ce vocabulaire qu’emploient tous les idéologues et qui convient à la prose journalistique.

Question qui paraîtra anecdotique à tous ceux qui ne sont pas enseignants : comment la philosophie et la littérature vont-elles se partager ce programme édifiant ?

Ces thématiques du premier semestre sont destinées à rééduquer tous ceux qui pensent ou croient encore que l’homme est un être de parole, tous ceux qui croient que la parole n’est pas d’abord destinée à séduire ou à persuader mais qu’elle guérit, console, soulage, expose avec clarté, garantit la communication des esprits, met la clarté du formulisme dans le monde informe de nos sentiments, en bref qu’elle n’est pas que l’instrument de l’interminable bavardage télévisuel ou radiophonique. Et surtout qu’elle nous fait naître à notre spécificité humaine.

Certes, l’un des thèmes proposés dans ce programme d’une féroce modernité, est l’autorité de la parole. Voilà qui est bon. Il y a en effet une parole d’autorité : celle de l’enseignant qui transmet un savoir et ne fait pas que conduire ou tenter de conduire un débat sur l’avortement, le droit de vote pour les étrangers ou la différence entre l’homme et l’animal. L’Education Nationale n’est pas le lieu pour cette parole pipée : elle est le lieu de transmission de savoirs partageables et partagés et celui de la construction d’une raison outillée et capable d’affronter avec intrépidité les problèmes qui se poseront à elle dans une existence droitement incarnée.

Au deuxième semestre de cette classe de première en spécialité Humanités, ce sont les représentations du monde à la Renaissance, à l’Âge classique et aux Lumières qui sont proposées aux lycéens comme thématiques. Trois thèmes là encore : Découverte du monde et pluralité des cultures – Décrire, figurer, imaginer  – L’homme et l’animal.

« La relation à l’animal constitue un révélateur de la place que l’homme s’attribue dans la nature et dans le monde, avec de fortes implications philosophiques, éthiques et pratiques. La période de référence se caractérise par une remise en question de la frontière entre l’homme et l’animal, telle qu’elle était généralement admise au Moyen Âge. De Montaigne à Buffon, cette séparation apparaît plus fragile ou discutable. Le statut de l’animal devient un enjeu majeur, comme en témoigne l’importance de la querelle sur « l’animal-machine ». Les questions de l’intelligence animale et de la communication entre animaux sont abondamment débattues. Les ressemblances, les analogies et les dissemblances entre hommes et bêtes sont méticuleusement explorées, par le fabuliste comme par le naturaliste. L’étude des textes de la période de référence permet d’explorer la complexité de ces relations et de réfléchir sur ce que la connaissance des autres espèces apporte à la connaissance de l’homme. Elle permet également d’aborder certaines questions vives d’aujourd’hui : l’exploitation animale, les droits des animaux, les « cultures animales ».

Ce programme répercute et renforce le préjugé qui veut que l’on ait découvert la pluralité des cultures à la Renaissance et que le Moyen âge chrétien ignorait tout de la culture du voisin ou du lointain. Mais plus encore, il est faux. Le statut de l’animal est loin d’être un enjeu majeur au XVIIème siècle. Quelques pages de Montaigne sur les animaux, un texte de Descartes, fût-il d’anthologie ne suffisent pas pour convaincre. Quiconque a lu avec soin les Fables de la Fontaine sait qu’il peut utiliser un animal dans le sens qui lui agrée : il a la liberté du fabuliste et il ne prétend pas décrire le monde animal, mais éclairer le monde humain en exploitant le monde animal. La connaissance des autres espèces peut nous éclairer sur l’espèce humaine, mais elles ne disent rien de ce qui est spécifique à l’homme: la nature humaine. Depuis quelques décennies, la philosophie a découvert l’historicité. La philosophie a interrogé la question de la différence entre le genre humain (qui implique la nature humaine) et les espèces animales. Elle n’a pas résolu la question. Il serait juste et bon de la laisser ouverte, et de ce fait, de laisser aux lycéens la liberté de croire ou de ne pas croire les dogmes du darwinisme devenu dogme occidental. Car dans toutes les sociétés qui n’ont pas perdu la tête comme les nôtres, on aime bien les animaux, on ne les torture pas inutilement, on leur tord le cou quand ce sont des poulets et on les mange sans faire tout un foin.

En terminale, au premier semestre, c’est la recherche de soi, du romantisme au XXème siècle, qui va occuper les esprits, selon trois thèmes : Éducation, transmission et émancipation – Les expressions de la sensibilité  – Les métamorphoses du moi. Comme le programme ne sera mis en place qu’en 2020, on ne dispose pas des développements et de la bibliographie proposée. Elle n’est pas prescriptive, mais vu le peu de temps laissé aux enseignants pour la préparation, cela revient à la rendre prescriptive.

Les Anciens n’éprouvaient pas comme l’homme moderne un narcissisme exacerbé. Ils regardaient le monde : les poètes cherchaient à en révéler et à en exprimer la beauté, les scientifiques cherchaient à en révéler les lois. La recherche de « soi » est une aventure spécifiquement moderne, et elle a conduit à l’enfermement dans toutes les narcissiques quêtes mémorielles, vaines autant qu’insensées. Comme l’avait vu Nietzsche, la mémoire est aussi une faculté d’oubli. Elle trie : ce qui est digne, ce qui ne mérite pas d’être retenu, ce qui encombre inutilement… L’activité mémorielle déployée par nos sociétés ne fait que cacher leur vide sidéral et leur fastueuse démagogie.

Au deuxième semestre, on attaque la notion d’Humanité, avec pour période de référence les XXème et XXIème siècles. Trois thèmes là encore car on reste hégélien dans l’âme : Création, continuités et ruptures – Histoire et violence – L’humain et ses limites.

Réfléchissons. Pour qu’il y ait continuité et ruptures, il faut un petit plus que deux siècles, il faut ce que Braudel appelle l’histoire de la longue durée, celle que ce programme évacue tout simplement. Il est absurde autant que contradictoire de prétendre aborder la « création » de cette idée d’humanité en se tenant à la seule période contemporaine. Car l’idée de nature humaine n’est pas née n’importe où, elle est née avec le judaïsme et le christianisme, comme l’a joliment rappelé Claude Lévi-Strauss. Elle vient d’un texte révélé, l’Ancien Testament dont le christianisme a été l’héritier. Les limites de l’humain, on les voit venir : le réchauffement climatique, les poulets en plein air. J’imagine avec une joie un petit peu maligne un enseignant qui montrerait un reportage sur la manière dont on saignait le cochon autrefois dans les campagnes. Aujourd’hui pareille expérience pédagogique le mettrait en danger mortel. Devant l’administration.

Comment réintroduire dans ce cadre nouveau d’une affligeante pauvreté toute la richesse notionnelle de l’interrogation philosophique : la question de l’existence et de la mort, celle de l’histoire, ou la nature humaine ? Qu’est-ce que c’est que l’homme, qu’est-ce que c’est que d’être homme ? Comment s’est élaborée la notion de personne au long de notre histoire occidentale ? Tout cela disparaît dans le naufrage général d’un programme de philosophie qui présentait cohérence et rationalité, et offrait encore de larges marges de manœuvre pour enseigner véritablement. Cette culture humaniste ressemble à ces modules organisés dans les écoles d’ingénieurs ou de commerce, sur la base de quelques thèmes bricolés dans des conditions pratiques improbables : la hâte, la précipitation, l’improvisation, et sans doute l’exaspération.

Soyons pratiques : à qui s’adresse cette formation ?

«  à tous les élèves désireux d’acquérir une culture humaniste qui leur permettra de réfléchir sur les questions contemporaines dans une perspective élargie », nous susurre le doux langage blanquérien.

Et voici les bienfaits supposés de pareille formation :

« Avec une pluralité d’aspects, et en prise directe sur un certain nombre d’enjeux de société, cette formation constituera un précieux apport pour des études axées sur les sciences, les arts et les lettres, la philosophie, le droit, l’économie et la gestion, les sciences politiques, la médecine et les professions de santé. Elle sera particulièrement recommandée aux élèves souhaitant s’engager dans les carrières de l’enseignement et de la recherche en lettres et sciences humaines, de la culture et de la communication ».

De qui se moque-t-on ? Quel futur enseignant de physique, de mathématique ou de biologie pourra croire que cette spécialité va le préparer à son futur métier ? Quel futur avocat va s’imaginer que quelques cours sur les pouvoirs de la parole vont lui fournir une préparation solide pour le métier qui l’attend ? Quel futur médecin va croire qu’un enseignement de ce type va lui garantir une propédeutique adaptée pour faire médecine ? Car si on a brisé le numerus clausus, la formation en médecine reste aussi exigeante qu’auparavant et la sélection basée sur les mathématiques. Quel jeune rêvant de devenir vétérinaire va imaginer que le thème de l’homme et l’animal en terminale va le préparer à accoucher des vaches ou à soigner des chiens, des chats ou des poulets ? Quel futur enseignant de philosophie peut croire qu’il va s’initier ainsi à une matière exigeante et souvent mal comprise, réduite à quelques thématiques confuses et disparates.

Quel lycéen a déjà prévu à 16 ans de faire de la recherche en littérature ou en sciences humaines?

A qui s’adresse cette spécialité ? En vrai ?

En vrai, c’est la filière parfaite pour les futurs journalistes. Elle les prépare à leur futur métier : la propagande d’Etat. C’est aussi la filière parfaite pour les futurs animateurs de show télévisés, pour les hordes de sociologues, de psychologues et de politologues dont deux bons tiers sont inscrits au pôle emploi s’ils n’ont pas fait science-po. C’est sans aucun doute la formation idéale pour la filière SMS (sciences médico-sociales) : pour ceux qui vont s’occuper des vieillards, pour les futures assistantes sociales qui vont affronter les migrants, les femmes battues, les alcooliques, et toute l’immense détresse largement fabriquée par une société qui se défait, et dont la matrice chrétienne et l’anthropologie qui la sous-tendait est démolie.

Entrons à présent dans les spécificités de cette nouvelle filière :

« aucune de ces entrées n’est spécifiquement « littéraire » ou « philosophique ». Chacune d’entre elles se prête à une approche croisée, impliquant une concertation et une coopération effectives entre les professeurs en charge de cet enseignement qui doit être assuré à parts égales sur chaque année du cycle ».

Concrètement, qu’est-ce que cela signifie ? Pour les proviseurs, dès la rentrée, un épouvantable casse-tête. Pour les enseignants, d’interminables réunions pour déterminer qui va prendre tel ou tel créneau horaire. Combien d’heures pour les arts de la parole assumée pour telle partie par le professeur de philosophie passionné de rhétorique cicéronienne… Sur la base de quels programmes précis ? Car il faut élaborer un programme sur ces thèmes nouveaux ? Quand va-t-on le faire ?  La nuit ? Une liste d’œuvres et quelques lignes générales ne suffisent pas pour élaborer un programme cohérent, d’autant qu’il est difficile à des enseignants de travailler ensemble. C’est leur métier qui le veut, pas leur constitution psychologique ou quelque refus caractériel. L’ampleur de notre corpus culturel a conduit à ces spécialisations qu’on appelle des « matières », et qui n’ont jamais interdit, ni empêché des échanges, même si elles ne les ont pas facilité. On ne change pas une « épistémè » pédagogique par décret.

Faut-il rappeler que les enseignants de lettres ou de philosophie (mais les autres aussi) ont passé beaucoup d’heures à lire, à étudier, à travailler pour passer un concours difficile, demeuré exigeant malgré l’effondrement du niveau général. Les enseignants et les enseignantes de matières régaliennes (mais aussi des autres matières) ont le droit d’élever leurs enfants ; ils ont le droit et même le devoir de lire, de réfléchir, de murir un projet ou une expérience pédagogique; ils ont le droit de souhaiter transmettre à leurs enfants la culture dont ils sont largement encore les dépositaires.

Tout cela demande du temps.

Le corps professoral, n’en déplaise à tous ceux qui les méprisent et même les haïssent, constitue une classe sociale particulière, qui a ses travers, ses médiocrités, mais aussi ses vertus, ses mérites, ses grandeurs et ses servitudes. Qui a ses spécificités, comme les ouvriers du bâtiment ou la classe politique ont les leurs. Dans la retransmission culturelle, ils occupent une place centrale. Et cela n’enlève rien aux autres parties constitutives d’une société de le reconnaître. Dans la plupart des sociétés qui ne sont pas post-modernes et ne rêvent pas de le devenir, le respect dû à l’enseignant est une évidence sociale.

Il est inutile de se faire la moindre illusion : dans un an, les concours sont supprimés. On gardera sans doute l’agrégation, pour fournir les futurs laquais de l’institution, ceux qui en seront les garants, feront les programmes et défendront, avec autant d’âpreté que de discrétion, leurs privilèges.

Mais soyons clairs : nos universités en sciences humaines sont déjà les lieux de prédilection des recherches nouvelles sur le genre, le transgenre et sur la nouvelle humanité qui s’annonce et prétend s’imposer, avec ses codes, ses lois et ses normes, le droit des animaux qui prévaut sur celui des vieillards et des enfants mongoliens. Et les lycéens de la filière « Humanités », dûment formés au cours de ces deux années de la nouvelle propédeutique, entreront dans les universités de sciences humaines résolument préparés à écrire des masters sur les droits des animaux ou des thèses sur les devoirs des politiques post-modernes envers les communautés de toute obédience.

La filière Humanités est une entreprise de rééducation des esprits. Elle est destinée à reprogrammer la culture et la pensée de demain : celles de la République post-moderne, de ses fantasmes et de ses impuissances, de ses cultes du moi et de ses fictions fantasmatiques. C’est une pensée d’eunuques et une épistémè châtrée : de la mémoire culturelle de la France, de sa langue en tant que langue de culture, de sa longue histoire religieuse et du socle anthropologique et religieux qui l’a portée et formée, un socle chrétien qui naît au IIème siècle, traverse dix siècles d’un Moyen âge parcourus de courants profonds et continus, et jusqu’à une Renaissance qui vint des Grecs de Byzance, lorsque Mahomet II conquit Constantinople. Surtout, cette nouvelle épistémè veut reprogrammer les esprits pour les convaincre que la nature humaine n’a aucune spécificité, que nous sommes des animaux comme les autres et le bien-être animal vaut largement l’existence des enfants soudanais ou des chrétiens d’Orient qu’on assassine.

L’épistémè nouvelle qu’on entend bien imposer à notre jeunesse dispose d’un nouveau cadre, plus performant encore s’il est possible, pour soutenir l’humanité nouvelle qui entend bien se faire tout en tous et gouverner le monde.

Annexe : voici les œuvres proposées pour le thème « les séductions de la parole ».

Homère, Iliade [chant VI, les adieux d’Hector].

Pauvre Hector, il va mourir, il le sait, il dit adieu à sa femme et à son fils, et il s’agit d’une parole séductrice…

Odyssée [chant VIII, Démodocos ; chant XII, les sirènes] (VIIIe-VIIe s. av. J.-C.).  Les sirènes ne parlent pas : elles chantent.

Tyrtée, fr. 12 [la cité pleure ses guerriers] (VIIe s.).

Gorgias, Éloge d’Hélène.

Aristophane, Les Nuées (Ve s.).

Platon, Ion, Gorgias, Phèdre, République [extraits]. Lesquels ? Il n’y a rien dans la République sur la parole, en revanche, il y a une théorie de l’inspiration dans le Phèdre et dans Ion. Et dans le Gorgias une théorie de la parole rhétorique.

Aristote, Rhétorique [deuxième livre sur la persuasion], Poétique (IVe s.). Sénèque, Consolations, tragédies (Ier s.). Boèce, La Consolation de la philosophie (VIe s.).  (Rien dans ce livre de vraiment utile sur la séduction de la parole).

Abélard, Histoire de mes malheurs (XIIe s.). André le Chapelain, Traité de l’amour (XIIe s.). Le jeu d’Adam (XIIe s.).

Tristan et Iseult (XIIe s.). Le pauvres : ils boivent un filtre et s’éprennent l’un de l’autre, le pauvre Tristan n’a rien d’un Don Juan. En revanche, on a omis Don Juan, dont on a fini par se fatiguer, j’imagine. Mais lui, c’est un as de la parole de séduction. Sauf pour l’ascète mendiant.

Boncompagno da Signa, La Roue de Vénus (XIIe-XIIIe s.).

Dante, La Vie nouvelle [extraits] (1292-1295). Le Roman de Renart [branches I, IV, X] (XIIe-XIIIe s.).

Le Roman de la Rose [le discours de Raison, Raison contre Amour] (XIIIe s.).

Le Roman de Flamenca (XIIIe s.). (pour le trouver cet ouvrage, dans une édition pas chère, cela va être difficile).

La Farce de Maître Pathelin (XVe s.) : elle est étudiée en classe de 6ème et très sincèrement, c’est une grosse farce médiocre qui fait un peu rire en classe de cinquième.

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