"Ce qui est caractéristique de la perversion narcissique c’est, intrinsèquement, le déni d’une réalité qui contrarie le besoin d’une perfection rêvée. Le pervers narcissique ne supporte pas d’une part que l’on puisse avoir accès à l’ensemble des énergies qui convergent vers lui, mais, plus irréductiblement encore, il ne peut considérer sans se mettre dans tous ses états que l’image parfaite qu’il a de lui-même puisse être écornée par les faits. Partant de là, il va déployer une énergie incroyable et, pire, inconsciente pour que rien ne puisse briser son rêve immaculé.
Déni
Ce que nous observons depuis des décennies en France est du même acabit. La gauche a construit son image sur la conviction du progrès illimité. Très vite la réalité l’a rattrapée. Au lieu d’ajuster cette créativité débridée sur les impératifs et les contraintes du terrain, la gauche s’est non seulement entêtée à aller plus loin encore dans la déconnexion du réel (cf. les propositions entendues à la primaire) mais elle a surtout déclenché un processus dévastateur : le déni. […]
Najat Vallaud-Belkacem est la quintessence de ce flagrant délit de mensonge éhonté qui ne laisse pas pourtant d’agresser avec des airs d’inquisiteur et un aplomb sans limite qui a le malheur de la ramener à la réalité. Prenons parmi mille l’exemple du gender. Les enregistrements de la ministre ont beau être indiscutables, elle ne démordra pas de n’avoir jamais soutenu ni encouragé la théorie contestée et expliquera, avec la plus grande conviction du monde, que c’est l’opposition qui crée et voit du mal dans ce qui n’en fut jamais de sa part. Idem des 35h, de l’insécurité, du terrorisme islamique, de l’échec scolaire, du chômage, etc. […]
Les pervers narcissiques sont des victimes parfaites. Ce sont des créatifs en captation énergétique. Ils savent trouver les causes et les maux apparents qui détournent l’énergie collective à leur profit. Le bon peuple de France court, vole, se démène pour ses causes jugées supérieures qui font oublier l’incurie des silencieuses affaires courantes du pays. Les agressions quotidiennes pleuvent, l’insécurité règne, des voitures de police sont brulées avec des gardiens de la paix à l’intérieur mais le chef de l’Etat choisit de courir plutôt au chevet de Théo, victime collatérale mais pas forcément innocente, d’une lutte quotidienne de la Police contre les trafics. Les associations lui emboitent le pas pour en faire un symbole de la lutte contre le viol ! Mais ce n’est pas en revanche pour les viols plus nombreux qu’elles subissent, ni pour les violences ou la situation de quasi-charia que vivent certaines femmes en banlieues que vont se mobiliser les députés socialistes mais sur le délit d’entrave à l’IVG, grossière privation de liberté sur la base d’un danger fictif.
Logique incantatoire
Comme un enfant qui veut qu’on le console de son éraflure, la gauche crie son malheur jusqu’à ce que l’on s’émeuve. Les secouristes le savent bien : dans un accident il faut d’abord détecter ceux qui crient le moins, car ce sont généralement les plus touchés. Il faut dire qu’un secouriste recherche l’action et non les flashs. L’affaire Fillon est la parfaite illustration de ce processus grossier qui pourtant semble à chaque fois fonctionner. C’est l’histoire de la paille et de la poutre évangéliques. Il est urgent d’arrêter de céder aux caprices hystériques d’une gauche qui n’a plus comme arme que l’accablement par répétition de la moindre faute détectée chez ses adversaires et ce, sans le début du commencement d’une symétrie avec les siennes.
Fausses convocations
La soif du débat chez les uns, le sens scrupuleux de la vérité chez d’autres produisent, ce qui est classique dans les procédés de manipulation, de fausses convocations. L’objectif d’un manipulateur n’est pas l’échange mais l’emprise, pas plus qu’il ne cherche des excuses de la part d’autrui pour repartir sur une nouvelle base mais pour accroître sa domination. Croire qu’un débat utile va découler de la transparence, c’est croire que donner de la viande aux loups va leur enlever l’envie de manger vos moutons. Si nous avons la gauche la plus manipulatrice du monde, nous avons aussi la droite la plus idiote. Face aux accusations, certains, comme Juppé ou NKM, vont donner des gages voire faire de la surenchère, et n’auront, après absolution médiatique, de droite plus que le nom. D’autres vont s’épuiser à faire montre de leur bonne foi, se faisant trainer d’une affaire à l’autre sans jamais sortir du piège.
Règnes du silence et des faits
Comme je le préconise dans les entreprises où j’interviens pour gérer ce genre de cas (cf mon article sur Les pervers narcissiques au travail), il y a essentiellement trois postures face à ce genre de comportement : la confrontation collective (avec arbitre indépendant, ce qui n’existe pas de fait dans nos médias) et sinon le silence ou ce que j’appelle le « disque rayé », c’est-à-dire la répétition inlassable des faits. On ne répond pas à une fausse convocation, d’une part parce que c’est reconnaître aux médias un pouvoir d’arbitrage qu’ils n’ont pas, d’autre part et surtout parce qu’elle n’a pas d’enjeu pour l’action.
Dans l’espace-temps d’une élection présidentielle et surtout du mandat qui la suit, doivent régner des plages de silence qui ramènent les choses à leur juste place et produisent un discernement tout articulé à l’action future. C’est dans la distance silencieuse aux agitations factices ou mineures que commence à s’imposer, par une juste hauteur de vue, celui qui doit tenir un rôle de chef. Et c’est pour cela aussi qu’il ne doit pas chercher à jouer l’irréprochable au risque d’ouvrir pour les médias un champ de tir proportionnel à sa prétention affichée. Un chef est jugé sur ce qu’il fait, avec, on le sait, des aléas nombreux mais une trajectoire globale qui parle mieux que les points. Louis XIV a plus fait pour la France que Louis XVI, mais son bulletin médiatique aurait été calamiteux par rapport à celui de son descendant.
A l’heure des faits, parler de ceux-là et que de ceux-là, sans déraper vers l’émotion. A l’heure des fausses émotions, refuser la convocation et se concentrer sur l’action.
Partis ou bon sens
C’est là que la logique intrinsèque des partis touche sa limite car, droite ou gauche, elle cherche des occasions de débats et de positionnement davantage qu’elle ne rassemble de la « capacité à faire ». On dit que la France est un peuple traditionnellement de droite. Disons plutôt que la France a du bons sens, qu’elle a une conscience instinctive de ce qui marche, et qu’elle a connu, avant 200 ans d’agitation idéologique, 1 500 ans d’unité autour d’une identité incarnée et de construction partagée au gré des difficultés. Les opinions et les appartenances aux partis sont l’écume des peuples. Le vrai clivage, c’est celui du rassemblement autour de ce qui est réalisable face aux hystérisations sur des motions qui n’ont pas plus d’ambition qu’un passage au 20H."