La gestion économique des villes : Evry

Le maire d’Evry depuis le 24 mai 2012   est monsieur Francis Chouat‎. Le précédent, de 2001 à 2012, était Manuel Valls qui abandonna la fonction suite à sa nomination au ministère de l’intérieur, en souhaitant conserver une partie de son indemnité de Maire (ou plutôt d’adjoint au maire), pour des besoins de trésorerie comme il l’expliqua alors. De récentes polémiques et l’endettement de la ville d’Evry ont justifié une modification de notre planning d'études. Il ne sera pas dit que le Salon Beige aura refusé son soutien à Manuel Valls…

Evry compte 53 268 habitants. Nos chiffres sont tirés d’ici. Un rapport de la chambre régionale des comptes, publié le 22 novembre 2013 a facilité notre travail. Le rapport portant sur la période 2006/2011, quand nous nous en inspirons, nous y introduisons les données 2012.  Les électeurs d’Evry auraient grand intérêt à se plonger dans la lecture intégrale des 40 pages du rapport, qui est beaucoup plus complet que notre aperçu. Monsieur Chouat, qui semble avoir lu le rapport de la chambre régionale des comptes, le résume ainsi : « La Chambre Régionale des Comptes ne critique pas notre stratégie d’emprunt, elle la valide. Le recours à l’emprunt permet de construire des écoles (Poule Rousse, Aimé Césaire), la Médiathèque Albert Camus, de rénover des équipements sportifs ».

Le Maire est content. Les journalistes tirent la sonnette d’alarme. Tous affirment avoir lu le même rapport.

Des investissements programmés…

Pour restaurer l’image de la ville, l’équipe municipale s’est engagée dans de grandes rénovations urbaines : les quartiers des Pyramides et du Bois Sauvage en sont les principaux bénéficiaires. La période 2007-2014 prévoit notamment 91 millions de dépenses. Fin 2012, le montant investi approche les 88 millions. De gros investissements donc…

Pourtant, l’adjectif ne souffre pas la comparaison : de 2008 à 2012, Evry a investit 1886 € par habitant contre une moyenne de 1754 €. Avec 7,5% d’investissements supplémentaires, il est difficile de soutenir que l’effort consenti est hors du commun.

…malgré une capacité d’autofinancement structurellement faible.

La capacité d’autofinancement (caf) est le solde des produits de fonctionnement sur les charges. Quand toutes les charges sont payées, ce solde permet de financer les investissements, au moins partiellement. Mais la caf est faible à Evry.

Pourtant, bien que la ville soit considérée comme pauvre, les produits de la ville sont importants. L’équipe municipale en place n’a pas hésité, une fois les élections de 2008 passées, à augmenter les taux. En 2008, la taxe d’habitation augmenta de 4,8% et la taxe foncière de 12,6%. La fronde des propriétaires n’a pas calmé les ardeurs de la municipalité, cependant, en 2009, les impôts furent seulement augmentés de 1,9%. En 2012, la pression fiscale est toujours supérieure de 7,7% à la pression moyenne.

Mais les charges sont insuffisamment maîtrisées. Pourtant, des efforts certains sont consentis par la municipalité. Nous avons déjà évoqué M. Valls abandonnant son indemnité de maire, pour une indemnité d’adjoint quand il fut nommé ministre, indemnité d’adjoint qu’il aurait finalement abandonné suite à la pression médiatique. N’oublions pas non plus le transfert de la compétence ordure ménagère à la communauté d’agglomération en 2010. Rappelons encore l’absence de comptabilisation des personnes détachées (prêtées) à des associations, ce qui revient à réduire le montant des subventions versées aux associations. Malgré les efforts conséquents et l’imagination dont peut faire preuve la municipalité pour réduire ses charges, le coefficient de rigidité (= charges fixes) est au dessus de la barre des 60% depuis 2011 contre une moyenne nationale de 55 %, et une moyenne régionale de 56%.

Evidemment, la croissance des intérêts de la dette de 27,5%, de 2008 à 2012, y est pour quelque chose.

Evidemment, si le personnel communal appliquait les 35 heures hebdomadaires (Page 27 du rapport), et effectuait 1607 heures de travail annuel au lieu de 1533, cela générerait des économies.

Evidemment, à 33h20 min par semaine, beaucoup d’employés communaux cumulent des heures supplémentaires (Page 30 et suivantes) ce qui a coûté la modique somme de 3,5 millions d’euros à la commune de 2008 à 2012.

Evidemment, cet article évoque certains voyages à Dakar organisés par une association, CDANE, laquelle association est subventionnée devinez par qui, laquelle association a conduit des employés municipaux à Dakar en 2012, 2013…et devrait continuer en 2014, pour former les agents municipaux de Dakar.

Pour résumer la situation : malgré l’importance des produits, les dépenses de la ville empêchent la constitution d’un autofinancement suffisant pour investir. En 2008, la capacité d’autofinancement était de 81 € par habitant. En 2012, elle est de 58 € soit trois fois moins que la moyenne.

Le financement des investissements

La caf d’Evry est faible. La caf sert d’abord à rembourser les emprunts. A Evry, avec M. Valls, une fois les emprunts remboursés il ne reste généralement rien. Au contraire, il manque des fonds pour rembourser les emprunts. Or, l’économie obéit à des lois !

Traduisons : vous percevez vos revenus. Une fois payées vos charges fixes (électricité, nourriture, eau…) et remboursés vos emprunts (Voiture, maison), il ne vous reste …rien. Il vous manque de l’argent même. Vous prenez alors une carte bleue à débit différé, ou vous souscrivez un nouvel emprunt. Vous savez alors, que dans un délai plus ou moins long, vous devrez soit réduire votre train de vie, soit trouver d’autres ressources, soit vendre la maison.

Que décide la municipalité en place ? Elle engage des dépenses d’investissements. Comment les financent-elles ? Par des subventions reçues (département, région…qui lui versent 20.2 millions de 2008 à 2012), en récupérant la Tva (12 millions) en vendant une partie de son patrimoine, et en empruntant…surtout en empruntant (41.7 millions). Sans se soucier des lois de l’économie, M. Valls décide d’investir avec un porte monnaie vide ! De 47 millions en 2008, la dette atteint 71,8 millions en 2012, soit une croissance de 53% en 4 ans. La chambre régionale des comptes attire l’attention sur cette spirale de la dette. « Il est communément admis que la situation financière d’une collectivité devient préoccupante à partir d’une capacité de désendettement de 15 ans ». Depuis 2007, la ville a toujours été au dessus de 15 ans. En 2012, sa capacité de désendettement est de 23 ans et 4 mois. En outre, des emprunts sont contractés pour des durées très longues (25 ans, peut être plus). Depuis au moins 2008, à Evry, l’emprunt nouveau permet d’investir et… de rembourser les emprunts anciens. En 2014, la nouvelle municipalité devra en prendre pleinement conscience. Ayant lu le même texte que vous, Monsieur Chouat en retient que la chambre régionale des comptes « valide » sa stratégie d’emprunt. Curieux ! Les compétences en lecture ne sont pas les choses du monde les mieux partagées.

Tout travail mérite salaire

Ce n’est pas la faute du maire d’Evry si ses fournisseurs sont payés avec du retard. Le fonds de roulement d’Evry est structurellement négatif. Depuis 2006, pas une fois il n’a été positif. Pas de fonds de roulement, pas de réserve, pas de trésorerie. C’est élémentaire. C’est une loi économique. Enfin, je suis trop imprécis. En ne payant pas ses créanciers, on peut avoir un peu de trésorerie. Du coup, les délais de paiement de ces fournisseurs (page 34) peuvent dépasser les 121 jours. Par pudeur, le rédacteur n’a pas voulu donner plus de précision. L’entreprise qui souscrit un marché à Evry doit en même temps négocier avec son banquier une sérieuse avance de trésorerie. Une question stupide me vient à l’esprit : dans une telle situation (fonds de roulement négatif, délais de paiement des fournisseurs élevés, emprunt pour rembourser la dette), une entreprise n’est-elle pas placée en redressement judiciaire ?…

Conclusion : la conscience face aux lois de la république (Page 27)

Le 19 décembre 2001, une délibération a fixé le temps de travail, pour le personnel municipal, à 1533 heures annuel, soit 33h20min hebdomadaire. Le préfet, au nom des lois de la République, a contesté la délibération : le temps légal de travail étant 35h hebdomadaire, sauf cas particuliers. Le contentieux a suivi son cours. Contestation de la mairie. Appel du Préfet…

Le 30 mai 2005, la cour administrative d’appel a annulé la délibération du 19 décembre 2001. Motif : illégale. Une délibération ne peut s’opposer aux lois de la république. La mairie d’Evry s’est-elle inclinée ?

M. Valls, ignorant superbement la loi, a continué à appliquer la délibération illégale. Il n’a rien lâché ! La délibération, illégale, est toujours appliquée à Evry. Monsieur Chouat a continué à appliquer la délibération illégale en 2012. A Evry, décidément, on ne lâche rien !