Après une analyse de la gestion de Carpentras, d'Orange, de Béziers, de Metz, de Vierzon, d'Hénin-Beaumont, de Beguey, de Lisieux, de Limoges, de Nantes, voici Laval.
Laval, en Mayenne, avec 54020 habitants, a eu pour maire, de 2008 à 2012, Monsieur Guillaume Garot nommé Ministre de l’agriculture en 2012. Il a été remplacé par Monsieur Jean-Christophe Boyer.
2009. Coup de tonnerre à Laval ! Les impôts augmentent de 26% ! 26%, en une seule fois ! Le maire, Monsieur Guillaume Garot, justifie ce choix par les incompétences de son prédécesseur : dix millions d’emprunts toxiques ont été souscrits sur une dette de 86 millions. Quand les taux d’intérêts passent subitement de 1 à 7%, sur une telle somme, les charges financières deviennent vite insupportables. C’est la faute à François d’Aubert, le précédent maire ! Les Lavallois payeront ! M. Guillaume Garot prend son bâton de pèlerin. Pédagogue, il explique sans compter son temps, fait appel à un cabinet d’experts : les Lavallois doivent comprendre pourquoi ils vont payer ! Chacun a le droit de savoir qui porte la responsabilité de cette hausse, inévitable.
Face à une telle situation, se séparer des emprunts « pourris » reste l’alternative la plus efficace. Dégager alors des ressources propres pour financer le rachat devient essentiel. Le gestionnaire peut alors combiner trois possibilités : augmenter les produits (les impôts, crèche, stationnement…), réduire ses charges (personnel, subventions…) et différer des investissements. Pratiquement, pour racheter 10 millions d’emprunts quand les produits de fonctionnement avoisinent les 70 millions, un économiste devra nécessairement agir sur les 3 leviers. En bon gestionnaire, le Maire, tout jeune dans ses fonctions, le comprend parfaitement. En augmentant les impôts de 26%, Monsieur Garot prend une décision qui si elle n’est pas populaire peut être la bonne. Analysons.
Le diagnostic de M. Garot et l’art de la communication
En 2013, nous pouvons analyser la comptabilité de 2009. Le passé laisse toujours des traces. Les chiffres sont impitoyables. Suivons-les.
M. Garot n’a pas racheté les emprunts maudits en 2009. Ni en 2010 d’ailleurs. En 2009, le montant de dette remboursé est de 5,6 millions, soit sensiblement comme chaque année, et bien moins que 10 millions. Par contre, en augmentant les taux de 26%, le produit des impôts locaux de 2009 s’est amélioré de 6,3 millions. L’augmentation des impôts ne visait donc pas le rachat des emprunts. Ce que confirme l'opposition actuelle : les emprunts n'ont pas été rachetés à ce jour.
Un mensonge à l’épreuve des chiffres
N’ayant pas remboursé par anticipation les emprunts toxiques, il est alors permis de s’interroger sur le prix à payer de ces emprunts. Quel est le poids des charges financières de ces emprunts ? En 2008, la commune a payé 5 millions d’intérêts, et en 2009… 4 millions, soit 1 million de moins. L’argument de la hausse des taux d’intérêts sur les emprunts souscrits, pour justifier l’augmentation des taux d'impositions, était donc …une construction intellectuelle. N’épiloguons pas sur les chiffres : un mensonge a été communiqué pour légitimer une décision fortement impopulaire. Impopulaire d’autant plus que, de 2000 à 2008, les taux d’impositions et la pression fiscale diminuaient à Laval. Le changement fut raide ! Evidemment, la publication du compte administratif de la commune sur son site internet aurait permis aux citoyens avisés d’apprécier les propos de M. Boyer. Alors que des communes de moins de 20 000 habitants se font un devoir de publier sur internet leur compte administratif, Laval (54 020 habitants) oublie de produire ce document essentiel à la vie démocratique. Curieux !
Et l’audit financier ? (source)
Monsieur Garot a fait appel en 2008 à un cabinet d’audit, spécialisé dans la prospective financière. Comme pour tout travail prospectif, le cabinet commence par une analyse rétrospective, s’échelonnant de 2002 à 2007. Curieusement, on y intègre 2008. Sur demande de M. Garot vraisemblablement, puisqu’il est difficile d’analyser rétroactivement une situation qui n’est pas achevée. Le rapport sera publié en septembre 2008. En 2008, Monsieur Garot est déjà maire. En 2008, les charges réelles augmenteront de 2,9 millions (page 1 du rapport). Répétons-le : en septembre 2008, l’équipe municipale en place a déjà décidé qu’elle ne maîtriserait pas les charges de fonctionnement. Les charges réelles augmenteront, pour l’exercice 2008, de 5,3%. Cette donnée, essentielle, communiquée au cabinet d’audit, conditionne les conseils des experts comptables. Si la nouvelle équipe municipale ne peut pas (ne veut pas) maîtriser les charges, alors elle devra augmenter ses produits, donc ses impôts. Aucune interprétation de ma part : il suffit de lire le rapport attentivement.
Sur la période précédente, jusqu’en 2006, avec l’ancienne équipe municipale, Laval a amélioré son « épargne en dépit d’une baisse des taux d’imposition. Cette amélioration s’explique par une maîtrise certaine des charges de fonctionnement […]. La capacité à contenir l’évolution des charges de fonctionnement semble atteindre ses limites [en 2007 et 2008 Ndlr]. […] en 2008 [se combinent] une augmentation sensible des charges de personnel et une progression forte de la subvention au CCAS. » En 2008, en laissant filer ses charges (+ 5.3%), M. Garot permet à son épargne nette de s’effondrer. Prélude volontaire justifiant l’augmentation des taux, ou compétence plus que limitée en matière de gestion ? Chacun jugera. Comme le souligne le rapport d’audit, la reconstitution de l’épargne nette est nécessaire. Mais cette reconstitution aurait pu s’appuyer sur la maîtrise des charges, comme cela se fit à compter de 2002, année où la situation avait été encore plus mauvaise qu’en 2008.
Le résultat comptable de 2009
6,3 millions d’impôts supplémentaires ont été collectés en 2009. Cependant, le résultat comptable, différence entre les produits et les charges, s’améliore de 6,2 millions. Déjà en 2009, une partie de ces nouveaux produits a été utilisée pour payer d’autres charges. Au risque de nous répéter, souvenons-nous qu’en 2009 les charges financières ont diminué de 1 million. Avec un peu de volonté, le résultat comptable se serait encore plus nettement amélioré, mais…
Faîtes savoir que les charges nous maîtrisent
En 2008, les charges de personnel représentaient 58,8% des dépenses. En 2012, leur poids relatif s’est encore aggravé : 60,3%, contre une moyenne de 54,38%. La lecture des comptes rendus des conseils municipaux permet d’avoir une idée de la possibilité d’aggraver les charges de personnel d’une commune. A titre d’exemple : 3 collaborateurs de cabinet (Compte Rendu avr 2008), 1 directeur des finances (CR nov 2008), 100 postes adjoints animateurs à temps plein (CR mars 2009), création de 20 emplois (CR déc 2012), et précédent les élections 2014 : 210 emplois saisonniers pour la saison estivale 2013, (CR fév 2013) (source). La liste est loin d’être exhaustive. Le dynamisme des charges de personnel peut légitimement préoccuper les Lavallois. Si elles augmentent de 8,3% sur la période, leur croissance est de 4% en 2012.
L’envol des charges de fonctionnement, particulièrement en 2012, alors même que les produits de fonctionnement enflent chaque année d’au moins un million depuis 2010, réduit régulièrement le résultat comptable. Ainsi, alors que les impôts locaux rapportent, en 2012, 8,6 millions de plus qu’en 2008, le résultat comptable ne s’améliore que de 4,5 millions. Les charges de personnel à elles seules ont grignoté 3,1 millions de ces nouveaux produits. En poursuivant cette trajectoire, le résultat comptable pourrait dès 2015 tendre vers zéro, autorisant…une nouvelle augmentation des taux de 26%, peut-être ?
Evidemment, il ne s’agit là que de vilains propos polémiques, fruits d’une vaine rhétorique ! Sauf qu’à bien y penser, 2015 sera après les élections municipales.
La fiscalité à Laval
Nous ne nous attarderons pas sur le sujet. La modification des taux de 2009 (+ 26% pour ceux qui ont oublié) a évidemment augmenté la pression fiscale. La pression liée à la taxe foncière est désormais légèrement supérieure à la moyenne (+ 2,7%) comme la taxe d’habitation (+ 7%). En outre, la pression est portée davantage sur les propriétaires (55%) que sur les locataires (45%), ce dernier point étant plutôt la volonté de l’ancienne municipalité, la municipalité présente s’étant surtout attachée à tout augmenter, faisant preuve d’un discernement très modéré.
Hypothèse : en 2009, la pression fiscale de largement inférieure à la moyenne a donc été replacée au dessus de la moyenne, assez légèrement pour la taxe foncière. Il me semble que la faiblesse de la pression fiscale avant 2009 explique l’attitude de la municipalité présente. A Laval, en 2009, quelqu’un a estimé que la pression fiscale était trop faible. A Laval, en 2009, quelqu’un a estimé que les citoyens pouvaient payer plus d'impôts. A Laval, quelqu’un voulait pouvoir dépenser sans compter. Rien ne devait freiner la prodigalité et l’ambition politique de certains élus.
Evolution de la communauté d’agglomération Laval
En 2008, la structure financière de la communauté d’agglomération est très différente de celle de Laval. Les produits de fonctionnement de la C A Laval (58 millions) sont certes moins importants que ceux de Laval (64 millions). Mais les charges fixes de la C A Laval sont plutôt faibles, de l’ordre de 15%, contrairement à Laval où elles avoisinent déjà les 68% (+ de 70% en 2012). Avec 15 % de charges fixes, tout est permis ! L’imagination d’un politique peut donner libre cours à son plein épanouissement. Faute de pouvoir pleinement agir à Laval, les dirigeants successifs de la mairie et de la C A Laval vont déployer leurs compétences dans le champ de la communauté d’agglomération.
Deux groupes de charges connaissent une évolution certaine dans le budget de la C A Laval. Les charges de personnel d’abord, flambent de 27%, alors que les produits de fonctionnement sont presque stables. Les subventions, ensuite, connaissent une croissance …exponentielle. Très faibles sous l’ancienne équipe (253 000 €), elles passent à …17,3 millions en 2012. Surprenant ! Prodigieux ! Epoustouflant ! N’ayons pas peur des superlatifs : quasi miraculeux ! Les subventions ont augmenté de…pardon, les subventions ont été multipliées par 68 ! Une augmentation dans ces proportions est presque irréalisable. Seules des compétences exceptionnelles permettent d’atteindre un tel résultat. Sur la période, ce n’est pas moins de 53,5 millions de subventions qui auront été distribuées. Un diplôme pourrait sûrement être remis à Messieurs Garot et Boyer. En attendant, l’observatoire des subventions devrait envisager un entretien de M. Garot : diffuser les bonnes pratiques est essentiel à l’approche des municipales.
Les charges ont augmenté mais les produits ont été stables. Le résultat s’est donc atténué. Alors que précédemment l’essentiel de l’investissement était réalisé sur fonds propres, désormais à la C A Laval on emprunte pour investir. Avec 69,9 millions fin 2012, la dette a augmenté de 46%. Si la C A avait continué comme la période précédente, la dette aurait pu être ramenée sous la barre des 17 millions. Sans de tels gestionnaires, la vie serait plus difficile pour les banques !
Résumons tout de même ce joli palmarès, qui mériterait une citation : + 26% pour les taux d’imposition (Laval), + 46% pour la dette (CA Laval), X 68 pour les subventions (CA Laval).
Conclusion : laissons la parole au Conseil Municipal
Deux décisions du conseil municipal de Laval. S’agit-il de préparer les prochaines élections municipales ou, pour l’une d’entre elle, de récompenser certains élus avant leur départ ? Chacun sera juge.
Compte rendu du 17 décembre 2012.
Le conseil municipal donne « mandat spécial au Maire et à Mme Françoise M…pour représenter la ville de Laval à l’occasion des échanges organisés entre la ville et des autorités étrangères […]. Au titre de l’année 2013, sont notamment prévus des déplacements à Gandra (Espagne), Modesto (Californie), Mettmann (Allemagne), Boston (Royaume Uni) et à Garango (Burkina Faso). […] les bénéficiaires de ce mandat spécial peuvent prétendre, pour les frais de séjour (hébergement et restauration) et de transport, à un remboursement aux frais réels. »
Les Lavallois, en 2013, payeront le prix de l’eau en moyenne 1 centime de moins par m3, soit pour la plupart d’entre eux une économie de 1 euro sur l’année.
Clément
N’y a-t-il donc pas une de ces villes anciennes qui ait gardé les écus armoriés dont elles ont hérité?
Là est la perte de mémoire des Français, et leur peu d’avenir. Ce sont quand même des Français qui composent les conseils municipaux et qui votent pour ces stupides et laides icônes sensées dire quelque chose de leurs cités!
marie
pourriez vous étudier le cas de st malo? merci