Robert Redeker écrit dans Le Figaro :
"Les commémorations du D-Day ne doivent pas faire illusion. Pas plus que ne devra faire illusion le défilé militaire du 14 juillet. Au contraire, ces spectacles, relayés par les chaînes de télévision, ne feront que confirmer le constat suivant: nous vivons l'ère de l'effacement du soldat. Dans les trente dernières années, le soldat a été expulsé de la vie collective. On ne croise son uniforme ni dans la rue, ni à l'Assemblée nationale, ni à l'Académie française. Devenu invisible, il n'apparaît plus que sur les écrans de cinéma et de télévision, il ne se montre plus qu'aux cérémonies officielles. Comment expliquer cet effacement?
Vous vous trompez, nous dira-t-on! La France fête ses soldats au défilé du 14 juillet. Pourtant, cette fête est dénationalisée tout autant que le fête de Noël est déchristianisée. La France ce jour-là fait semblant de fêter l'Armée, le soldat, la nation, mais, un regard plus attentif nous indique que l'objet de la fête n'est pas l'Armée et le soldat, ni la nation ni la Révolution, mais la fête elle-même, comme au moment de la fête de la musique, de la fête du patrimoine, ou de la fête de Noël. […]
Notre culture est paralysée par l'ombre portée du nazisme. La défaite militaire du nazisme a été paradoxale. Elle s'est transformée en victoire non pas idéologique mais psychologique. Sa défaite militaire fut la condition de sa victoire psychologique. Preuve en est la référence constante au nazisme, à Hitler, la fréquence de la reductio ad hitlerum dans les discours politiques, journalistiques et, hélas, intellectuels. Hitler et le nazisme restent omniprésents dans l'époque actuelle, qui craint son retour, ou qui fait mine de le craindre, qui s'affole de ce retour, alors qu'il s'agit de réalités historiques mortes depuis 70 ans! Le souvenir du nazisme contamine tout ce dont le nazisme s'est servi, l'armée, la guerre, l'uniforme, le drapeau, la nation, provoquant un amalgame répulsif entre ces réalités et l'idéologie nazie. La haine de soi dont souffre la France fait partie de cette victoire psychologique du nazisme. Dans leur opposition à tout ce qui relève de l'ordre du militaire, de la puissance, de la nation, de la guerre, dans leur pacifisme autant que dans leur haine de soi, nos contemporains se révèlent psychologiquement dépendants du nazisme. […]"