Lu dans Présent, sous la plume de Rémi Fontaine :
Interrogée dans le dernier numéro de Famille chrétienne, Christine Boutin estime que le discours du Latran constitue «une véritable rupture» :
«Ce serait un comble que ceux qui sont directement concernés par ce discours – les catholiques plus aptes que d’autres à comprendre le sérieux et la finesse de ce discours – se mettent à douter de celui qui l’a prononcé !» […]
En refoulant la séparation pure et simple des pouvoirs avec son concept de «laïcité positive» , Nicolas Sarkozy semble revenir à la bonne interprétation de la fameuse réponse du Christ aux Pharisiens qui voulaient le piéger. Dans son livre-clef, Martin Peltier démontre qu’il n’en est rien et que c’est le chef de l’Etat lui-même qui est en train de piéger les catholiques (au profit notamment des musulmans). […] Peltier révèle la sournoise inversion architectonique à laquelle procède le Président : rendre à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César suppose selon lui que les trois «religions du Livre» rendent finalement à César (la République) une certaine allégeance… […]
«La loi républicaine, élaborée et appliquée dans le cadre de l’Etat de droit, est toujours supérieure à la loi de la religion même si elles ne sont pas de même nature, l’une garantissant l’ordre public, l’autre l’ordre moral» (Sarkozy).
[…] Après avoir combattu la prétention (sociale) du spirituel comme telle, ce nouveau pacte républicain voudrait […] transformer chaque religion […] en une partie d’un plus grand tout (laïque) duquel elle reçoit, en quelque sorte sa légitimité, sa vie, son être […] L’ancien Grand Maître Alain Bauer cité par Martin Peltier le rejoint parfaitement dans le décryptage de la pensée sarkozyenne :
«Le discours de Sarkozy n’est paradoxalement pas un discours catholique. Catholiques, protestants, juifs, musulmans, aucun d’entre eux ne peut se retrouver dans l’absence de colonne vertébrale doctrinale de ce discours. C’est plus un discours de l’immanence que de la transcendance. Dès lors, on est tout à fait à côté de la critique qui en est faite par ceux qui se proclament laïques et de l’espèce de ravissement supposé que les catholiques devraient avoir face à cette merveilleuse reconnaissance. (…) On pourrait avoir ici une exégèse pointilliste qui démonterait à quel point Nicolas Sarkozy est entre Arius et le fondateur de la franc-maçonnerie Isaac Newton.»
Autrement dit, l’ouverture de Sarkozy est celle de l’humanisme maçonnique, non pas athée mais agnostique, ouvert culturellement au fait religieux dans une conception relativiste […]. Son culte de Dieu plus rationnel que spirituel, plus immanent que transcendant, dépend trop d’un culte de l’homme bien reconnaissable dans une cohérence troublante".
Ingomer
Personnellement, il me semble que le discours du Latran de Sarkozy va dans le sens d’une relégitimation de la religion sur la scène politique. Ce qui est une innovation qui à mon sens va dans la bonne direction.
La sécularisation qui est ce mouvement d’inféodation de la religion à l’Etat tout-puissant (césarisme) ne date pas de Sarkozy, mais de la loi dite de “laïcité” (une corruption de l’authentique laïcité) qui fait de la religion non pas un pouvoir parallèle mais un pouvoir inféodé à l’Etat. Alors qu’on devait se retrouver dans un régime de laïcité, on se rend comte qu’on nage en plein césarisme où César a tous les pouvoirs y compris religieux : la loi morale / religieuse est en-dessous de la loi civile. Cette hypocrisie doit donc être levée.
Enfin, si on voulait être complétement logique il faudrait aussi admettre que la doctrine “laïque” républicaine est un dogme, une religion, avec son catéchisme, ses prêtres et ses lois. Pas sûr que la religion laïque soit la meilleure réponse à la déchristianisation et à l’islamisation en cours.
[Je crois qu’il faut sortir du “il me semble” pour se pencher sur le concret. L’analyse de Peltier fait cet effort et aboutit plutôt à la conclusion que c’est le pouvoir politique, passablement écorné, qui se cherche une nouvelle légitimité, au moyen de la religion. MJ]
Ingomer
“c’est le pouvoir politique, passablement écorné, qui se cherche une nouvelle légitimité, au moyen de la religion”
Oui certainement.
Ceci dit, cela ne nous empêche pas de constater un retour de la religion sur la scène politique. Si nous ne devons pas être dupes de la volonté du système – sentant le sol se dérober sous ses pieds… – de vouloir se renouveller en cherchant à se légitimer, on peut se réjouir de cette inflexion, surtout quand on sait que depuis 1905, il s’agissait d’enfouir la religion et de reléguer l’expression publique (et même personnelle) de la foi au domaine strictement privé. Exemple : voir les dernières réactions de Ségolène Royal s’offusquant de photos la montrant en train de prier alors qu’aux Etats-Unis c’eut été plutôt bien vu.
[Suis-je aveugle ? Je ne vois ni retour ni inflexion. En revanche, je vois la poursuite de la destruction de la famille et de la vie. MJ]
cosaque
Que voulez-vous faire face à l’hypocrisie ?…
Mr Sarkozy dit oui aux cathos, aux juifs, aux musulmans et au buisnes fou…
Jugeons donc aux atces :
A quand l’obligation d’apprendre la vie des saints martyrs au primaire ?
A quand une politique familiale…
Ses actes sont pourtant clairs.
Denis Merlin
Que chacun puisse s’exprimer au nom de ses croyances c’est la saine laïcité, c’est la liberté religieuse. Donc l’Etat reçoit sa morale des croyants ou des athées rationels qui forment sa volonté.
Mais la seule “grammaire commune” à toute l’humanité, c’est la raison, c’est pourquoi la morale dépend de la raison, sur laquelle tous se retrouvent ou doivent se retrouver, sans distinction de croyances.
Si, par hypothèse, les croyances sont contraires à la raison elles ne peuvet former la loi civile dans la mesure de leur irrationalité. Seule dans l’Eglise se trouve parfaitement en harmonie foi et raison (Benoît XVI passim).
Le laïcisme est une croyance irrationnelle (même s’il prétend le contraire) que la morale commmune et donc l’Etat doivent être athées.
Cela dit, comme le fait observer cosaque la loi est aujourd’hui laïciste, donc contraire à la raison et à la doctrine chrétienne. Et l’on attend Sarkozy aux actes plus qu’aux discours. Mais sur ces questions, il n’est pas sûr qu’il soit hypocrite.
Ingomer
“Suis-je aveugle ? Je ne vois ni retour ni inflexion.”
Discours du Latran, 20.12.2007 : En autres inflexions, Sarkozy défend les “racines chrétiennes” de la France et l’affirmation publique de la foi.
– “La laïcité n’a pas le pouvoir de couper la France de ses racines chrétiennes. Elle a tenté de le faire. Elle n’aurait pas dû.”
– “dans ce monde obsédé par le confort matériel, la France a besoin de catholiques convaincus qui ne craignent pas d’affirmer ce qu’ils sont et ce en quoi ils croient»
S’il ne s’agit pas d’être dupes d’un Sarkozy adaptant son discours en fonction de l’auditoire, il n’en demeure pas moins que ce discours et par exemple ces deux déclarations marquent une inflexion nette dans le rapport de la république à la religion. Dorénavant, “dans ce monde obsédé par le confort matériel”, l’expression publique de la foi devient une qualité et la relégation de la foi au domaine strictement privé est infléchie.
[Ce n’est pas ce que j’appelle une inflexion, mais un discours. Avec Nicolas Sarkozy, vous trouverez aussi des discours pro-musulmans, pro-franc-maçons, etc.
Quand j’écris inflexion, je parle des actes politiques. Or rien, rien de rien depuis mai 2007 ne ressemble à un acte politique qui aurait une racine chrétienne. MJ]
Nicolas Journé
Le Cosaque a raison et malheureusement Christine Boutin se trompe.
Elle devrait pourtant savoir ce que valent les serments de fidélité de cet homme…non ? Le latran hier, le lendemain les francs macs,après demain se “amis les gays et lesbiennnes” le surlendemain les musulmans… etc.
Cet homme est pitoyable, mais c’est le président! De là à être aveugle, il faut nécessairement être ministre ou vassal!
Ingomer
“[Ce n’est pas ce que j’appelle une inflexion, mais un discours. Avec Nicolas Sarkozy, vous trouverez aussi des discours pro-musulmans, pro-franc-maçons, etc.
Quand j’écris inflexion, je parle des actes politiques. Or rien, rien de rien depuis mai 2007 ne ressemble à un acte politique qui aurait une racine chrétienne. MJ”
On est d’accord.
Francoisdesaintjean
La laicite positive a bien ete pronee par le Chef de l’Etat. Elle est indeniablement un progres par rapport au concept de laicite negative. Cependant, parce que nous sommes en republique (relativisme) et non en monarchie, la loi republicaine conserve une grande primaute et que les trois religions sont mises sur un pied d’egalite, ce qui n’a rien de nouveau. Mais pouvait-on s’attendre a mieux dans une republique relativiste ou le dogme de la foi catholique n’est pas inscrit dans la constitution? non bien sur! Alors pourquoi tourner en debat une question qui ne se pose pas dans nos republiques modernes, a savoir la primaute de la religion catholique, le relativisme etant inherent a la forme republicaine de gouvernement, sauf a incrire la primaute du dogme catholique dans la constitution?
[“Elle est indeniablement un progres” : c’est bien ce qui est mis à mal par Martin Peltier, qui explique que cet positivisme est en fait un moyen d’utiliser la religion au service de l’Etat. Napoléon avait essayé en son temps et les papes Pie VI Pie VII ont résisté, cf plus bas. MJ]
ludo
Bien d’accord avec MJ.
La campagne électorale avait bien montré tout cela à ceux qui ne se contentaient pas d’extraire LA phrase qui leur plaisait au milieu d’un discours très multiple par ses références et ses lectures.
C’est une des forces de NS.
Ce n’est pas forcément de l’hypocrisie.
Il dit peut être ce qu’il pense, mais ce qu’il pense ne repose sur rien de “transcendant” donc “tout est dans tout”.
VD
Quand donc allons-nous cesser de croire des paroles pour “juger l’arbre à ses fruits” ? Certains sont très forts pour manipuler les mots…