Marcelo Gullo Omodeo, professeur d’Histoire à l’Université de Buenos Aires et à l’Université Fluminense de Rio de Janeiro, publie un ouvrage décryptant l’intox de la légende noire espagnole.
Son livre, traduit en français aux éditions L’Artilleur, met en lumière l’importance de l’héritage espagnol face aux atrocités commises par les ennemis de l’Espagne. Marcelo Gullo démontre que, devant le “Tribunal de l’histoire”, l’Espagne a été jugée par des juges partiaux et de faux témoins. Et il affirme, preuves à l’appui, que l’Amérique, avant 1492, ressemblait plus à l’enfer qu’au paradis, car les sacrifices humains, le cannibalisme, l’esclavage et la prostitution de masse régnaient partout. Il rappelle par ailleurs que, pendant des siècles, des pays comme la Grande-Bretagne, la Hollande ou les États-Unis ont exigé de l’Espagne qu’elle s’excuse pour les prétendus péchés commis lors de la conquête de l’Amérique, alors qu’en réalité, ce sont ces mêmes nations qui devraient le faire car leurs mains sont tachées de sang.
Parmi les inventeurs de cette légende noire, l’auteur souligne l’importance de la désinformation véhiculée par les protestants, pris d’une haine terrible envers l’Eglise catholique et ses soutiens, dont fait partie l’Espagne au XVIe siècle.
[L]a rébellion protestante a créé (ou contribué à créer) la légende noire avec pour seul objectif d’en finir avec l’unique nation qui avait assumé de manière désintéressée la défense du catholicisme et des catholiques, dont les droits étaient foulés aux pieds par les rois et les nobles qui se convertissaient au protestantisme afin de spolier les biens de l’Eglise et d’asseoir leur pouvoir politique. A ce sujet, Mario Vargas Llosa, que nul ne pourrait décemment accuser d’être un partisan du national-catholicisme, affirme la chose suivante :
“La légende noire antiespagnole a été une opération de propagande montée et alimentée tout au long des siècles par le protestantisme (surtout ses branches anglicane et calviniste) contre l’Empire espagnol et la religion catholique afin d’affirmer son propre nationalisme, les diabolisant jusqu’à des extrémités terrifiantes et les privant même d’humanité…”
L’auteur dénonce également le livre de Bartolomé de las Casas, qui présentait une fausse histoire de la conquête espagnole de l’Amérique, ouvrage diffusé par les protestants, “première fake news de l’histoire”.
En ce sens, il convient de nous arrêter quelques instants sur ces réflexions de l’historien français Jean Dumont (1923-2001) : “Si, par malheur, l’Espagne était passée dans le camp de la Réforme, elle serait devenue puritaine et aurait appliqué les mêmes principes que ceux en place en Amérique du Nord (c’est la Bible qui le dit : l’Indien est un être inférieur, un enfant de Satan). Un immense génocide aurait éliminé d’Amérique du Sud tous les peuples indigènes. Aujourd’hui, lors de leur visite des rares “réserves” s’étendant du Mexique à la Terre de Feu, les touristes prendraient en photo les survivants, témoins d’une épuration raciale menée de surcroît sur la base de motivations bibliques.”
C’est assurément ce qui serait survenu si les puissances protestantes (Hollande, Grande-Bretagne ou Allemagne) avaient conquis l’immense territoire s’étendant du Rio Grande à la Terre de Feu. Pour s’en faire une idée, il suffit de constater ce qui s’est passé en Amérique du Nord, en Australie, en Indonésie ou en Namibie.