Normalienne et agrégée de philosophie, Marianne Durano a publié un essai intitulé Mon corps ne vous appartient pas. Elle raconte que, comme les filles de son époque, elle reçu une éducation sexuelle lambda, on l’a emmenée voir un gynéco dès la puberté, elle a perdu sa virginité relativement tôt, a pris la pilule pendant huit ans, fait des dépistages du Sida, pris des pilules du lendemain… Puis elle s'est mariée et a eu des enfants. Elle est interrogée par Adélaïde Pouchol dans l'Homme Nouveau :
"C’est seulement après mon accouchement que j’ai pu rationaliser, que j’ai relu toute ma grossesse, mon accouchement et tout mon parcours de contraception artificielle, mon parcours de jeune fille de notre temps, à l’aune de cette domination technique.
Ce terme de domination fait écho à celui d’aliénation qui revient souvent dans votre livre. Pourquoi ce terme – très marqué politiquement – et quel sens lui donnez-vous ?
Une domination, par définition, est vécue comme telle et implique que nous connaissions l’ennemi. L’aliénation, en revanche, décrit un processus qui peut être impersonnel (on peut être aliéné par une personne autant que par un système) et dont nous ne sommes pas conscients. Le mot vient d’alienus, d’où l’idée que nous devenons comme étranger à nous-même. Dans le rapport au médecin la femme se sent étrangère à elle-même, au corps qui la constitue mais qu’elle regarde comme un objet. J’emploie aussi ce mot car, lorsque je parle par exemple d’aliénation médicale, je ne veux pas dire que les femmes sont aliénées par les médecins en tant que personnes. Il ne s’agit pas d’un rapport d’individu à individu mais bien d’un système qui est aliénant, où chacun est à la fois coupable et aliéné. Car le médecin l’est lui aussi dans la mesure où le système lui impose de prendre en charge de plus en plus de demandes sociétales. […]"
Mais 68, c'est fini.
Irishman
Hélas, dans beaucoup (trop) d’esprits, la récré de mai 68 n’est toujours pas finie… Ca serait bien si quelqu’un pouvait siffler définitivement la fin de cette foutue récré !
Clarence
Cette personne paraît avoir eu un esprit ultra conformiste, bien que “normalienne et agrégée de philosophie” (ou plutôt, c’est ce conformisme qui lui a sans doute valu de s’adapter parfaitement aux valeurs véhiculées par notre société), elle semble n’avoir exercé aucun esprit critique sur les “évolutions sociétales”. A titre personnel, dès l’âge de 13 ou 14 ans, j’étais fascinée par la figure de Soljenitsyne et l’esprit de résistance au « système ». Je percevais à l’aube de l’âge adulte la prédation exercée sur le corps féminin, dans la publicité, le cinéma, jusque dans la rue…, prédation qui se traduit par l’impératif de jouissance sexuelle opposé à la Vie, le péché sanctuarisé par une armada de médicaments (pilule, procédés abortifs, etc.). Chemin de la jouissance bientôt pavé dans mon entourage de maladies et de morts précoces (cancers notamment), sans parler des mariages ratés, des addictions (notamment l’alcool) et des drames familiaux.
David
Merci, Clarence, pour votre commentaire.
Bien que je vous trouve trop sévère à l’égard de Marianne Durano qui a eu le mérite d’une prise de conscience salutaire, pour le reste de votre écrit, je me retrouve mot pour mot…
Edouard
Clarence, je partage votre vision actuelle de notre societe decadente mais Marianne DURANO a pris conscience de ce que vous citez, peut etre tard, ou plus tard que vous, mais pour etre en train de lire son livre, interessant, elle fait bien le constat critique et regrette qu’il soit plus facile aujourd’hui de distribuer des capotes et parler d’IVG a des adolescentes plutot que de leur apprendre le respect de leur corps et la fidelite
Horace
D’accord, le corps est le terrain privé de chacun. Mais lorsque ce corps génère un rejeton, il a un impact sur la société. La responsabilité est engagée. On ne fait donc pas n’importe quoi avec son corps même s’il est déclaré propriété privée. Mettre au monde des enfants dont on ne sait s’occuper est une faute envers tous.